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Engraissement en France et petites carcasses pour sortir l’élevage allaitant de l’impasse


TNC le 24/09/2024 à 11:52
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La FNH souhaite faire coller la production bovine française à la demande pour donner un nouveau souffle à la filière allaitante. Pour ce faire, elle préconise l'engraissement en France. (© Reddragonfly)

Dans un rapport publié le 24 septembre, l’ex-fondation Nicolas Hulot dresse le constat d’un élevage allaitant de plus en plus subventionné, et de moins en moins rentable. Pour casser le cercle vicieux, l’organisation propose de faire coïncider offre et demande, via la relocalisation de l’engraissement en France, et la production de bovins aux besoins d’entretien moins exigeants.

« Il faut assumer l’état de santé de la filière », lance Thomas Uthayakumar, directeur des programmes à la Fondation pour la Nature et l’Homme (FNH) lors de la présentation de leur dernière étude sur l’élevage allaitant français. En dix ans, les subventions publiques ont augmenté de 20 % pour voir le revenu des éleveurs passer de 0,85 smic net en 2010 à 0,6 en 2020. « Nous sommes sur une filière qui ne s’en sort pas, et qui laisse présager une catastrophe industrielle et économique ».

Une filière dominée par quelques mastodontes

En cause : le prix de la viande. « Le coût de production est supérieur de 99 centimes au prix de vente », tranche Thomas Uthayakumar. L’organisation de la filière induit une forte asymétrie des pouvoirs, qui rend difficile la négociation pour les éleveurs. Le marché de la viande bovine reste dominé par trois acteurs : Bigard (5,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022), Elivia (1,1 milliard d’euros de CA en 2022) et Sicarev (1 milliard d’euros de CA en 2022). « En 2020, 2 steaks hachés sur 3 étaient fabriqués par un seul groupe industriel », insiste la FNH dans son communiqué.

Mais tout n’est pas qu’une question de prix de vente. Nombre d’éleveurs ont fait le choix de l’agrandissement, espérant des économies d’échelles qui ne sont jamais arrivées. Pour l’expliquer, la FNH pointe du doigt le modèle d’élevage français, qui suppose la production d’animaux lourds, exigeants en termes de ration, et immobilisés plusieurs années sur les fermes.

Cette production au long cours est de plus en plus concurrencée par le marché des réformes laitières, environ 30 % moins chères, mais qui permettent tout autant de répondre à l’augmentation de la demande en steack-haché. « 48 % de la viande bovine consommée provient du troupeau laitier », rappelle Elyne Etienne, responsable agriculture et alimentation à la FNH.

« La filière est prise dans un cercle vicieux », poursuit la jeune femme. La décapitalisation pèse sur la rentabilité des abattoirs, qui se réorientent sur le marché du haché ou de la viande transformée pour capter de la valeur autrement. Mais ce positionnement convient davantage au marché des vaches laitières qu’au troupeau allaitant. « On a un modèle qui détruit de la valeur alors que la production bovine nécessite de très gros investissements », complète Thomas Uthayakumar.

Faire coïncider offre et demande

Pour sortir de l’impasse, la FNH propose quelques pistes. « Il faut lancer un plan de restructuration de la filière afin de faire coïncider l’offre et la demande de viande bovine sur le territoire », détaille le directeur des programmes de la FNH. Mais pour la Fondation pour la Nature et l’Homme, le salut de la filière ne dépendra pas de la seule rétention des broutards. Un nouveau modèle d’engraissement est à trouver, avec des productions à l’herbe pour assurer le maintien de prairies, et avec des bovins de race mixtes ou rustiques, moins exigeantes à l’entretien. Contractualisation, modification de la Pac… Le plan de relocalisation de l’engraissement ne pourra se faire sans politiques publiques d’ampleur.

La FNH souligne également la nécessité de soutenir le maillage en abattoir, notamment sur les structures publiques qui permettent de faire vivre les filières sous label, et invite à initier une commission d’enquête sur les financements publics dont bénéficient les entreprises agroalimentaires et la grande distribution, ainsi que sur leurs bénéfices. « Les éleveurs sont les seuls autorisés à vendre à perte », ironise Thomas Uthayakumar. Dans le viseur de la FNH : le respect et le durcissement de la loi Egalim, l’application de la contractualisation ou encore la mise en place de prix planchers.

Enfin, la Fondation pour la Nature et l’Homme concède une nécessaire baisse de la consommation de viande, sur le modèle du moins mais mieux. « L’idée est de préserver les filières bio ou en label, qui permettent une meilleure répartition de la chaîne de valeur sur la filière ».