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Le gouvernement prêt à aider si les mauvaises récoltes se confirment


AFP le 29/07/2024 à 16:20
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Marc Fesneau était en visite dans une exploitation céréalière d'Eure-et-Loir, lundi 29 juillet 2024, pour constater les dégâts des conditions météorologiques défavorables sur le rendement et la qualité des céréales françaises. (© @QGuillous)

Le gouvernement est prêt à activer des dispositifs d'aides exceptionnelles aux céréaliers si les moissons se révèlent vraiment mauvaises, comme le suggèrent les premières estimations, a indiqué lundi le ministre de l'agriculture, à qui le premier syndicat agricole FNSEA donne dix jours pour apporter des réponses. (Article mis à jour à 17h14)

Entre des pluies abondantes depuis l’automne dernier qui ont souvent retardé ou empêché les semis : les surfaces dédiées au blé tendre, la principale production française, ont ainsi reculé de 11 % par rapport à 2023 selon le dernier rapport du service statistiques du ministère de l’agriculture.

Le manque de soleil a ensuite entravé le développement des plantes et affecté les rendements, qui sont mauvais. La production céréalière pourrait baisser de « 10 à 20% » par rapport à l’an dernier, un phénomène qui est « national », a déclaré Marc Fesneau lors d’un déplacement sur l’exploitation d’Éric Genty, à Sainville en Eure-et-Loir.

Aux côtés de plusieurs représentants du monde agricole, le céréalier espère que le ministre « prendra conscience de la situation » dans le pays, premier producteur de céréales de l’Union européenne.

« Pleins d’épis vides ou remplis à seulement 40-50% »

Dans les parcelles du producteur, en pleine Beauce, un expert a récemment estimé que son blé dur donnerait 4,2 tonnes par hectare, contre 7,5 en moyenne, et son blé tendre 6 tonnes, contre 8,5 habituellement.

« Depuis la voiture, les épis de blé semblaient beaux. Mais dans le champ, pleins d’entre eux étaient vides ou remplis à seulement 40-50% », se désole-t-il. Pour lui c’est sûr, la moisson sera « pire que celle de 2016 », année souvent évoquée avec amertume par les agriculteurs.

Les agriculteurs présents ont évoqué des situations très disparates, avec des pertes allant jusqu’à 50 % dans certaines zones.

Presque la moitié du blé encore à récolter

« Pour le blé tendre, on est habituellement autour 36 millions de tonnes, certains évoquent 28, 27 voire 26 millions de tonnes pour cette année, c’est une baisse colossale », a souligné Éric Thirouin, président de l’Association générale des producteurs de blé (AGPB).

Les pluies empêchent encore régulièrement les moissonneuses-batteuses de s’activer dans les champs, ce qui rend difficile toute estimation, remarque Sébastien Poncelet, spécialiste du marché des céréales pour Argus Media.

Avec un peu moins de la moitié du blé encore à récolter, « on attend de voir si les blés des régions plus tardives vont redresser un peu la barre ou non », explique-t-il à l’AFP. Mais si les pires scénarios se confirment, la moisson serait la moins abondante depuis les années 1980, dit-il.

En parallèle, « même si les prix du blé sont au même niveau ou plus haut qu’en 2016, les coûts des agriculteurs ont énormément augmenté », rappelle Sébastien Poncelet.

Rendez-vous dans 10 jours 

Mais il faut attendre la fin des moissons, perturbées depuis début juillet par des pluies intermittentes, pour avoir une idée globale.

« On voulait que le ministre prenne conscience de la problématique », a souligné Arnaud Rousseau, le président du premier syndicat agricole FNSEA, présent lors du déplacement. « On lui donne maintenant rendez-vous dans dix jours, idéalement avec le Premier ministre, et il ne faut pas qu’il vienne avec les mains vides », a-t-il dit.

Le gouvernement est prêt à activer des dispositifs d’aides exceptionnelles si les moissons se révèlent vraiment mauvaises, a assuré Marc Fesneau. Même si le ministère gère surtout les affaires courantes, « cela ne veut pas dire qu’on ne fait rien », a indiqué Marc Fesneau.

Vers une mobilisation de la réserve de crise ?

« On continue à regarder la situation, on peut activer des dispositifs (…), on peut commencer des discussions avec un certain nombre d’instances pour que ceux et celles qui auront la charge de suivre les questions agricoles – et on verra qui – aient les choses prêtes pour la rentrée », a-t-il ajouté.

En plus de la mobilisation de l’assurance récolte, des dispositifs comme « le dégrèvement de taxe sur le foncier non bâti (TFNB) et la mobilisation de la déduction pour épargne de précaution (DEP) pourront également être mobilisés en complément, si nécessaire », a précisé le ministère dans un communiqué.

Le ministre a aussi évoqué la possibilité d’engager avec Bruxelles des discussions sur la mobilisation de la réserve de crise ou un possible report des cotisations à la Mutualité sociale agricole (MSA).

« Un risque de rebasculer dans la violence »

La Coordination rurale avait elle plaidé la semaine dernière pour « une année blanche de cotisations MSA, ainsi qu’une année blanche au niveau des banques ». Tous reconnaissent l’importance de soutenir la trésorerie des exploitations les plus en difficulté.

« La mauvaise récolte dans une vie de paysans, ça arrive, tout le monde a des souvenirs », a rappelé Arnaud Rousseau. « Il faut maintenant avoir assez de trésorerie pour pouvoir emblaver (semer des graines, NDLR) l’année prochaine ». Mais il faut aussi « changer l’état d’esprit », a-t-il ajouté.

Depuis la crise agricole, « des promesses ont été faites et n’ont pas abouti », sur les mesures de simplification par exemple ou le projet de loi agricole, dont l’examen au parlement a été suspendu avec la dissolution, a souligné le responsable syndical.

Des agriculteurs « vont penser qu’une fois de plus, on s’est fait avoir », a-t-il relevé en évoquant « un risque pour certains de basculer dans la violence ».