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Salon de l'agriculture

La souveraineté agricole dans toutes les têtes avec la guerre en Ukraine


AFP le 02/03/2022 à 15:06
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 La guerre en Ukraine « remet au cœur de l'actualité la souveraineté alimentaire », pour Arnaud Rousseau, président de la Fop. (©@Pascal Aubert/Sia)

La guerre en Ukraine avec des exportations de céréales provisoirement à l'arrêt a relancé le thème de la souveraineté alimentaire au Salon de l'Agriculture, les céréaliers en profitant pour attaquer la stratégie verte de la Commission européenne.

Dès le premier jour, le président Macron a donné le ton : à onze reprises, le terme de « souveraineté » est revenu dans son discours inaugural devant les responsables du monde agricole, dans la continuité d’une allocution télévisée au début de la pandémie de Covid-19.

Lui emboîtant le pas, les représentants des céréaliers, comme le premier syndicat agricole FNSEA, se sont largement appuyés sur la crise en Ukraine pour alerter contre la dépendance européenne aux importations de protéines végétales, notamment pour nourrir le bétail. « Il faut vraiment se poser maintenant la question de la réappropriation de la production et de la transformation agricoles », explique à l’AFP Jean-François Loiseau, président d’Intercéréales, interprofession des grains français.

Si l’Europe est exportatrice nette de blé, ce n’est pas le cas pour toutes les productions céréalières : en maïs par exemple, elle n’est pas auto-suffisante et faisait venir ces dernières années la moitié de ses importations de l’Ukraine, dont les flux commerciaux sont aujourd’hui stoppés.

Les céréaliers en profitent pour lancer une nouvelle attaque en règle de la stratégie européenne pour la sécurité alimentaire, baptisée « De la ferme à la fourchette » et visant notamment à utiliser moins de pesticides au nom de l’environnement et de la santé. Hostile depuis le départ à cette feuille de route, le syndicat a dans le viseur un rapport du service scientifique de la Commission, qui projette des baisses de rendements de 10 à 15 % pour les céréales, oléagineux, viandes bovine et porcine, selon les divers scénarios intégrant cette stratégie.

Bruxelles se défend en mettant en avant l’essor des biopesticides, une meilleure sélection des variétés, ou des standards durcis pour les importations qui ne sont pas mentionnés dans le rapport. Qu’importe pour Arnaud Rousseau, président de la Fédération des producteurs d’oléoprotéagineux, la guerre en Ukraine « remet au cœur de l’actualité la souveraineté alimentaire ».

« Accompagner la transition des modes de production »

« Dans ce contexte, autant le volet transition écologique du Green Deal a du sens, autant son volet décroissance est à revoir. 4 % des terres européennes en jachère, ce n’est pas raisonnable. La solution passe par plus de rotations, du couvert… mais pas par une baisse de production », poursuit-il. Une offensive contre le projet européen dénoncée par la Confédération paysanne, qui déplore « l’effet d’aubaine » de la crise ukrainienne pour mettre à mal le verdissement de l’agriculture de l’UE et le « cynisme redoutable » de l’entreprise.

« Pour nous, la souveraineté alimentaire, c’est vraiment le droit des peuples et des Etats à décider de la façon la plus démocratique possible leur choix d’agriculture et d’alimentation », réagit Laurence Marandola, secrétaire nationale de ce syndicat, qui défend l’agroécologie, plus soutenable pour les sols et les hommes.

Interrogé dans les allées du salon sur une possible remise en cause de la stratégie européenne dans ce contexte géopolitique, le commissaire européen à l’Agriculture Janusz Wojciechowski a paru un peu gêné pour répondre, à quelques heures d’un conseil informel des ministres européens de l’agriculture consacré aux répercussions de la guerre. « Nous devons poursuivre cette politique et les plans stratégiques qui sont en préparation mais bien sûr nous devons analyser tous les impacts potentiels », a déclaré le commissaire. « Si on n’accompagne pas une vraie transition des modes de production agricole, à court terme, on sauve peut-être notre balance commerciale, mais on se tire une balle dans le pied sur nos capacités de production à dix ou vingt ans, tellement nos sols sont fatigués, tellement on puise de l’eau, tellement on a perdu de la biodiversité », prévient Mme Marandola.

Pour la Confédération paysanne, seule cette transition permettra de parvenir à la souveraineté alimentaire et à cette « résilience » vantée par le président Macron, en inaugurant un salon à l’ombre des canons.