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Ergonomie au travail

Sortir de la salle de traite avec le sourire


TNC le 20/10/2023 à 17:01
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Avoir une installation ergonomique permet d'éviter les TMS dus à la répétition des gestes. (© TNC)

Une étude menée actuellement sur l’ergonomie de traite a pour ambition de recenser toutes les situations à risque pour le trayeur, soit d’accident, soit de trouble musculo-squelettique. Objectif : améliorer leur santé en réduisant ces risques.

Traire en ménageant son corps. C’est ce qui pourrait résumer le travail mené conjointement par l’Idele, la chambre d’agriculture de Bretagne, l’institut Agro Rennes-Angers et la MSA. Ce Casdar IP (Innovation et Partenariat), nommé ErgoTraite, veut donner des pistes pour améliorer à la fois le bien-être des trayeurs et le bien-être animal, ainsi que pour prévenir les accidents et les TMS (troubles musculo-squelettiques).

Observer les vaches et les trayeurs

Pour la première phase du projet, des observations ont été réalisées, sur les vaches comme sur les trayeurs, pour identifier les risques.

Côté animaux, 750 vaches, prim’holstein et normandes, ont été mesurées, notamment la hauteur de plancher mammaire et la distance d’atteinte horizontale. Ceci pour savoir à quelle distance et à quelle hauteur le trayeur doit porter ses mains pour brancher la griffe.

Côté humain, des hommes et des femmes ont été équipés de capteurs dans le but de réaliser une description technique des gestes de traite. Par comparaison avec un modèle médical, une note a été attribuée à chaque situation étudiée. Les trayeurs ont aussi été filmés et observés par des ergonomes. Par exemple, les angles d’épaule ont été mesurés, car on sait que le fait d’avoir souvent le bras très au-dessus de l’épaule constitue un risque de développer une pathologie musculo-squelettique.

Jusqu’à 82 cm de hauteur de plancher mammaire

Les résultats ont confirmé les expériences rapportées par les trayeurs. Il peut y avoir, surtout chez les primipares, des hauteurs de plancher mammaire importantes. En moyenne, 65 cm chez les Prim’holstein.

« Chez certaines primipares prim’holsteins, il peut y avoir jusqu’à 82 cm de hauteur de plancher mammaire, révèle Sébastien Guiocheau, chargé d’études bâtiment à la chambre d’agriculture de Bretagne. Si la fosse de la salle de traite a une profondeur d’un mètre, la mamelle se trouve donc à 1,80 m. Pour une femme qui mesurerait 1,60 m, cela veut dire lever les bras à 20 cm au-dessus de sa tête. »

Des gestes en dessous du cœur

« L’idéal est de travailler avec, le plus possible, le coude au corps. Et plus généralement, il faut des hauteurs d’intervention inférieures à celle du cœur », explique Sébastien Guiocheau. Il encourage donc les constructeurs à revoir la hauteur des quais de traite, parce que les vaches sont plus grandes, et plus généralement, la conception des salles de traite. « En TPA, les pare-bouses devraient être remontés, pour éviter d’avoir à passer en dessous », détaille-t-il.

L’ambiance de la traite : la base d’un bon travail

La prévention des risques passe certes par les aspects biomécaniques : hauteur d’intervention, poids de la griffe, répétition des gestes, nombre de traites par semaine, etc. Elle passe aussi par l’ambiance de traite. Un environnement stressant, la pression subie par le trayeur, engendrent en effet des tensions musculaires qui favorisent les TMS. Une atmosphère calme et sereine est, à l’inverse, favorable à tout le monde.

Quant aux risques d’accident, ils sont aussi diminués par une bonne ambiance de traite. Il est donc conseillé d’avoir une installation qui favorise une circulation fluide, pour les vaches comme pour les humains. La luminosité doit être équivalente entre l’aire d’attente et la salle de traite. Une barrière poussante, qui évite d’avoir à aller chercher les vaches et des escaliers sécurisés sont indispensables. Le sol doit être libre, pour éviter les risques de trébuchement et permettre de rouler les équipements lourds. Les transports de bidons, qui pèsent souvent 20 ou 30 kilos, doivent être facilités ou même supprimés. « Il faut raisonner la conception d’une salle de traite le plus en amont possible », conseille Jean-Louis Poulet, responsable de projet R&D traite à l’Idele.

Se faire aider

« Quant aux installations anciennes, il est possible de se faire aider, par exemple par la MSA, pour les rénover. Il s’agit de repérer les gestes les plus fastidieux ou les situations dangereuses et de mettre en place des modifications », souligne Sébastien Guiocheau. Certaines subventions permettent également d’accéder à des équipements qui améliorent le confort du trayeur, et donc, sa santé à long terme.

Enfin, que ce soit pour la conception ou la rénovation, il faut penser aux différences de taille entre les trayeurs s’ils sont plusieurs : des équipements permettent des hauteurs différenciées de fond de fosse. « Et se rappeler qu’on n’aura pas toujours 20 ans, rappelle Sébastien Guiocheau. Pour, du début à la fin de sa carrière, sortir de la traite avec le sourire. »