Accéder au contenu principal
Qualité de l’air

Les solutions pour limiter les émissions d’ammoniac en élevage


TNC le 11/12/2023 à 14:05
Curage_fumier_24211

94 % des émissions d'ammoniac françaises sont d'origine agricole. (© TNC)

La feuille de route européenne invite la France à réduire ses émissions d’ammoniac de 13 % d’ici 2030. Pour y parvenir, la gestion de l’azote sur les exploitations agricoles est en première ligne.

Si le carbone est sur toutes les lèvres, l’ammoniac devrait bientôt se faire une place parmi les considérations des éleveurs. Et pour cause, il est à l’origine de l’acidification des sols, mais impacte également la santé humaine. Précurseur de nitrate de sulfate d’ammonium, il est à l’origine de particules en suspensions qui dégradent la qualité de l’air.

94 % des émissions d’ammoniac proviennent de l’agriculture

Une feuille de route européenne fixe un objectif de réduction des émissions d’ammoniac en France de l’ordre de 13 % (19 % à l’échelle de l’Europe). L’objectif : limiter les dépassements de valeurs limites dans l’air des principaux polluants. Et pour limiter les émissions d’ammoniac, nul autre choix que de miser sur l’agriculture : c’est elle qui était à l’origine de 94 % des émissions françaises en 2018.

Dans ce contexte, le Cniel et Interbev ont présenté leur politique RSE pour faire face à ce nouvel enjeu à l’occasion du Space 2023. En cause, la gestion de l’azote sur les exploitations.

L’élevage bovin génère des émissions d’ammoniac à différentes étapes de la production. Parmi les tâches les plus émettrices figure l’épandage des effluents, à l’origine de 29 % des émissions de la filière bovine. Vient ensuite l’élevage en bâtiment qui est à l’origine d’un quart des émissions.

Réduire les apports en MAT

Pour atteindre les objectifs fixés par l’Europe, les interprofessions invitent à diminuer la valeur en MAT des rations de l’ordre de 10 %. Pour Vincent Manneville, ingénieur agronome de l’Idele, l’objectif est « d’ajuster la ration pour éviter de donner de la matière azotée en excédent aux vaches laitières ». En diminuant de 10 % la valeur azotée de la ration d’une vache laitière à 8 000 kg de lait, on passerait d’un niveau de 116 kg d’N rejeté par an et par animal à 111 kg d’N.

Mais l’expert tempère, « c’est plus facile d’ajuster la part de concentré dans la ration lorsqu’on a un Dac. Difficile d’avoir la main sur les volumes lorsqu’on est en ration complète ».

Couvrir les fosses

Le second levier concerne la couverture des fosses. 21 % des émissions d’ammoniac proviennent du stockage des effluents. En cause : le contact avec l’air.

Pour cela, il est conseillé de penser ses nouvelles fosses pour pouvoir les bâcher, afin d’amorcer le processus de méthanisation. Sur les dispositifs les plus aboutis, il est possible de réfléchir à la valorisation du méthane ainsi capté. Le bâchage des fosses permet de réduire 60 % de la volatilisation d’ammoniac.

À défaut, il est possible de favoriser la formation d’une croûte naturelle sur les fosses en limitant les arrivées brusques de lisier. Pailler le dessus de la fosse peut être un plus pour favoriser la mise en place d’une croûte. Un paillage de 10 cm d’épaisseur, complété à chaque brassage de la fosse peut permettre de limiter de 50 % les émissions.

La couverture des fosses assure des cobénéfices. Compter un gain de 2,5 kg d’azote par UGB.

Des travaux axés sur le pH des lisiers ont également permis de démontrer que plus un lisier est acide, moins il émet d’ammoniac.

Augmenter la durée de pâturage

Allonger la durée de pâturage, sur les exploitations où la ressource fourragère n’est pas valorisée à son maximum permet également de limiter les émissions. « En bovin viande, il est possible de diminuer de 5 % les émissions en augmentant le temps de pâturage de 4 % pour atteindre les 70 % de temps de présence à l’herbe ». Même constat en vache laitière, ou une hausse du temps de pâturage de 10 % permet de réduire les émissions de 7 %.

Cette solution sous-tend que les exploitations soient dans un cadre favorable à la pousse de l’herbe, avec des parcelles accessibles.

Bien penser ses épandages

29 % des émissions du secteur bovin proviennent de l’épandage des effluents d’élevage. Mieux vaut donc réfléchir à la manière dont on les apporte au champ. Les émissions d’ammoniac sont réduites de 40 % en cas d’épandage avec un pendillard, en comparaison aux buses à palettes. Enfouir le fumier dans les 4 h suivant l’épandage permet de limiter 60 % des pertes en CH3.

Les alternatives aux engrais azotés sont également à prendre en considération. L’introduction de légumineuses dans le système cultural est un plus. « En prenant l’exemple de la luzerne maintenue pendant 4 ans, la quantité d’azote restituée à la culture qui lui succède atteint les 150 kg la première année, et les 70 kg la deuxième année », rappellent les interprofessions.