La pouponnière, un élevage de précision pour les veaux

Élever les veaux en bâtiment fermé nécessite une conception rigoureuse du bâtiment qui les abrite. Pour qu’ils soient en bonne santé, il faut pouvoir maîtriser des paramètres tels que la température, l’hygrométrie, les courants d’air. Pour ce faire, le GDS Bretagne propose une pouponnière, qui permet un contrôle strict des conditions d’élevage des veaux.

Un veau n’a pas de petit pull. C’est pourquoi il a besoin d’un environnement contrôlé. Une étude, réalisée par le GDS Bretagne sur 60 élevages, a montré un taux de mortalité de 10 à 12 % et un taux de morbidité de 30 % chez les veaux dans les premières semaines de vie. Parmi les pathologies concernées, 40 % sont de nature respiratoire. Et le logement des animaux est souvent en cause.

Daniel Le Clainche, responsable technique au sein du GDS Bretagne, fait le tour des types de dysfonctionnements des nurseries telles qu’elles sont souvent conçues aujourd’hui. « Elles se résument souvent par le fait qu’elles ont été conçues pour l’ergonomie du travail mais pas pour le confort des veaux », explique-t-il. Les bâtiments sont vastes et permettent l’entrée du tracteur. Mais ces « cathédrales » sont défavorables aux veaux nouveaux nés. La température est souvent trop basse et l’amplitude entre le jour et la nuit, trop grande. Il y a fréquemment des courants d’air. La préparation des buvées à proximité des veaux fait monter l’hygrométrie, la cohabitation avec des veaux sevrés ou même des adultes favorise la contagion, etc.

Gérer l’ambiance du bâtiment

C’est en se fondant sur ces résultats que le GDS Bretagne a élaboré un concept innovant : la pouponnière. « L’idéal, développe Daniel Le Clainche, c’est une naissance en box de vêlage ou au pâturage, puis les premières semaines en pouponnière. Ensuite, le veau peut aller dans un autre bâtiment et y rester jusqu’au sevrage ». La durée minimale en pouponnière, pour y trouver un avantage, est de quinze jours, et le maximum réglementaire est de huit semaines.

Un des principes de base consiste à gérer l’ambiance du bâtiment. La température doit être constante : entre 12 et 22 degrés. Les courants d’air doivent être supprimés : la circulation de l’air ne doit pas dépasser une vitesse de 0,25 mètre par seconde.

Le bâtiment doit être étanche pour éviter les courants d’air. Cela signifie que les portails tels qu’ils sont souvent conçus, avec un jour en dessous, ne conviennent pas. Mieux vaut préférer une porte qui descend jusqu’au sol ou, au minimum, installer une bavette de caoutchouc en bas du portail.

Pour éviter la contagion, les veaux non sevrés doivent avoir un bâtiment spécifique. Il ne doit y avoir aucun contact, ni mélange d’ambiance, avec des animaux sevrés.

Et pour éviter le froid, il est souhaitable de réduire le volume d’air avec une toiture basse, en limitant le volume d’air à 10 m³ par place ; moins si possible. Ce volume peut encore être réduit en période froide, en posant au-dessus des cases un plafond poreux respirant. L’isolation du plafond de la nurserie est souhaitable si le volume total par animal est supérieur à 4 m³/veau.

Ces caractéristiques peuvent être en contradiction avec l’ergonomie du travail. Il est possible d’y remédier en prévoyant des installations amovibles, qui permettent malgré tout l’intervention du tracteur.

La pouponnière idéale

Le logement des veaux se fait en cases individuelles. Ce procédé permet un suivi personnalisé des animaux. Il y a ainsi moins de risques de laisser passer un problème de santé ou d’alimentation. Autre intérêt : il diminue les risques de contagion par rapport au logement collectif.

Le logement individuel limite aussi les stress comportementaux qui peuvent être créés par les logements collectifs, parce qu’il n’y a pas de concurrence pour l’accès à l’alimentation. Enfin, l’imprégnation est plus facile à pratiquer en case individuelle.

Il est néanmoins indispensable que les veaux se voient entre eux, sans quoi ils risquent d’avoir des réactions d’ennui et d’apathie. C’est un point important de la Directive Bien-être.

Limiter l’ammoniac et l’humidité

Pour limiter les émissions d’ammoniac et l’humidité, il faut éviter le contact entre les bouses et les urines et évacuer les liquides rapidement. L’idéal est de créer une rigole qui acheminera les jus de manière efficace. Celle-ci doit se trouver à l’arrière des cases, et non pas à l’avant, pour ne pas être sous le nez des animaux. Une pente de 1 à 2 % vers l’arrière des cases pourra drainer les liquides vers elle.

Toujours pour ne pas faire augmenter l’hygrométrie, les buvées doivent être préparées à l’extérieur de la pouponnière. Un taxi à lait peut alors se révéler très utile pour ménager le dos de l’éleveur.

Éviter les parois froides

Concernant le matériel, Daniel Le Clainche conseille de mettre en place des cases surélevées, posées sur des caillebotis à lames fines (semblables à ceux des porcelets) en bois ou en plastique. Par-dessus, il préconise une litière en paille ou en sciure « pas en BRF, ni en plaquettes, qui ne sont pas adaptés pour les veaux », précise-t-il.

Le choix des matériaux est fondamental pour le confort thermique. Les métaux et le béton nu, trop froids, sont peu propices au confort des veaux. Il en va de même pour les parois froides, auxquelles il vaut mieux ne pas adosser les cases. L’isolation des murs en contact direct avec elles est donc fortement conseillée.

Le bois, le béton banché isolé ou le PVC conviennent en revanche beaucoup mieux. « Le PVC est idéal mais plus cher que les autres matériaux », commente Daniel Le Clainche. Dans tous les cas, le nettoyage et la désinfection doivent être simples à réaliser.

De l’eau en toute saison

Les périodes de fortes chaleurs sont autant à craindre que le froid. Comme pour les autres animaux, les plaques translucides ou transparentes sont à proscrire en toiture ou en haut des longs pans, d’autant plus qu’elles peuvent créer un effet loupe fatal, si un rayon de soleil persiste sur un veau.

Et pour éviter la déshydratation, les veaux doivent avoir de l’eau à disposition en permanence, quelle que soit la saison, en plus du lait.

La biosécurité avant tout

L’avantage de la pouponnière telle qu’elle est proposée par le GDS Bretagne, c’est qu’elle permet de pousser la biosécurité à fond. Pour que celle-ci soit effective, seul l’éleveur doit être autorisé à entrer dans le bâtiment. Le négociant, notamment, parce qu’il va d’un élevage à l’autre, ne doit pas y être admis. Si cela pose problème, il est possible de n’installer que les femelles en pouponnière et de réserver des niches en extérieur pour les mâles.

Si un intervenant de l’élevage doit absolument y entrer (le vétérinaire, par exemple), un pédiluve à sec, avec de la chaux éteinte, peut être mis en place.

« La pouponnière devrait se raisonner un peu comme un bâtiment en porc, résume Daniel Le Clainche. En veillant à observer une marche en avant, depuis les veaux jusqu’aux vaches, et en changeant de chaussures entre les deux ».

Le vide sanitaire doit durer au minimum huit à dix jours, après un protocole comprenant lavage au détergeant et désinfection avec un produit bactéricide, virucide et fongicide. Si la pouponnière comporte plusieurs salles, réaliser un vide complet dans chacune d’elles à chaque fois que c’est possible est idéal.

La santé des veaux est-elle meilleure dans ce type de logement ? « Comme elle est multifactorielle, il est difficile de mesurer l’impact d’un changement d’installation, précise Daniel Le Clainche, mais sur les élevages que nous avons suivis, nous avons constaté une amélioration des pathologies respiratoires ».

Reste le prix d’une telle installation. Les chiffres de 2017-2018 font d’état de 1 200 € la place. « Mais c’était avant l’inflation, remarque Daniel Le Clainche. Aujourd’hui, il s’approche probablement de 2 000 €. »