Accéder au contenu principal
Syndicalisme

Un éleveur bio seul candidat à la présidence de Jeunes agriculteurs


AFP le 04/06/2024 à 10:05
4630ede6-0-un-eleveur-bio-a-la-tete-de-jeunes-agriculteurs

Pierrick Horel,(premier à gauche) est le seul candidat pour succéder à Arnaud Gaillot à la tête de JA. (© Compte X Jeunes agriculteurs)

Pas de révolution en vue pour le syndicat allié de la FNSEA mais un profil « un peu différent » à sa tête : le seul candidat déclaré à la présidence de Jeunes agriculteurs Pierrick Horel est éleveur bio et ne se voit pas toute sa vie sur la ferme. (Article mis à jour à 12h08)

 L’élection du nouveau président, pour un mandat de deux ans, aura lieu jeudi, au dernier jour du congrès de Jeunes agriculteurs (JA) dans la Vienne, a précisé le syndicat mardi à l’AFP, soulignant que « rien n’interdit » à un autre postulant de se manifester entretemps. S’il est élu, l’exploitant des Alpes-de-Haute-Provence de 33 ans Pierrick Horel succédera au producteur de lait à Comté, Arnaud Gaillot, qui n’a pas
souhaité de second mandat.

Pendant la crise agricole de l’hiver, les deux hommes se sont trouvés « au cœur du réacteur », selon les mots de M. Horel : sur les plateaux télé et dans les multiples réunions avec le gouvernement, en duo avec le premier syndicat français FNSEA. « C’était éprouvant et très formateur. On apprend très vite à négocier », relève l’éleveur bovin.

La crise a abouti à une moisson inédite de 70 engagements gouvernementaux, le plus souvent alignés sur les revendications FNSEA-JA. Toutefois, observe Pierrick Horel, « il faut qu’on soit bons pour gagner des voix » aux élections professionnelles, « parce qu’il y a encore beaucoup d’incompréhensions » chez les agriculteurs.

Les élections aux chambres d’agriculture, prévues en janvier 2025, déterminent la représentativité des différents syndicats et en conséquence le financement public qu’ils reçoivent. M. Horel reconnaît que l’alliance majoritaire est « un petit peu plus « challengée » cette fois-ci par d’autres syndicats », qui selon lui font preuve de « beaucoup de populisme ».

La Coordination rurale, classée plus à droite, demande notamment le plafonnement du gazole agricole à un euro le litre. La Confédération paysanne, à gauche, espère un million de paysans en France, plus du double d’aujourd’hui.

En face, les syndicats majoritaires, unis pour l’allègement de la fiscalité et des contraintes environnementales, portent un « discours de vérité », en prise avec la « complexité » du monde, affirme M. Horel.

Pas un métier à vie

Axé prioritairement sur les enjeux liés à l’installation et la transmission, JA a longtemps milité pour que tous les départs d’agriculteurs soient remplacés (« un pour un »). Le principe, « pas réaliste », a été abandonné, le syndicat estimant que l’agrandissement des fermes est encore parfois nécessaire pour être compétitif.

Dans un monde agricole de moins en moins peuplé, JA (né en 1957 sous le sigle CNJA) compte 18 000 adhérents. Ses élus doivent avoir moins de 38 ans.

L’organisation refuse d’être étiquetée branche jeunesse de la FNSEA, même si elle joue souvent le rôle d’antichambre de formation des responsables de « la grande maison ». La présidente du syndicat européen Copa et ex-patronne de la FNSEA Christiane Lambert (2017-23) a ainsi fait ses armes au CNJA (1994-1998).

Un grand-père commerçant en bestiaux, une mère éleveuse de poulets fermiers… Pierrick Horel dit avoir « toujours voulu être agriculteur et éleveur d’Aubrac », ces ruminants couleur froment élevés pour la viande, aux yeux comme maquillés de noir.

Agriculteur à 19 ans sur une dizaine d’hectares, il est désormais à la tête d’une exploitation atypique, à cheval entre les Alpes de Haute-Provence et la Saône-et-Loire : trois associés (lui, son père et un cousin), plus de 150 animaux (en partie commercialisés en vente directe), 420 hectares de prairies et grandes cultures.

Les bovins passent l’hiver dans le sud et le reste du temps en Bourgogne, où ils pâturent à l’abri du loup, dont la présence provoquait un « niveau de stress trop élevé » chez les vaches, dont « 20 % à 40 % » perdaient le veau en gestation, affirme-t-il.

Il est en bio mais n’en fait pas un étendard. « J’essaie de combattre le clivage agriculteur conventionnel parce qu’on a besoin de chacun. » Ce père de deux enfants, en couple avec une employée de banque faisant du conseil agricole, tient à distance la dimension sacrificielle qui a longtemps prévalu dans le monde paysan : fan de voile et de surf, il se ménage plusieurs semaines de vacances en famille, « pas mal de week-ends », et surtout « ne souhaite pas forcément rester dans le métier d’agriculteur jusqu’à 67 ans ».

Il espère montrer aux jeunes ayant comme lui un « profil un peu différent » qu’ils ont leur place dans le syndicat.