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Entre moisson chaotique et sécheresse, les prix des céréales rebondissent


AFP le 24/07/2024 à 18:14
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En France, et dans d'autres pays européens, la récolte du blé est perturbée par des pluies intermittentes. (© spiritofamerica, Adobe Stock)

Les prix du blé, du maïs et des oléagineux sont repartis à la hausse ces derniers jours, aiguillonnés par une moisson décousue en Europe, un temps chaud et sec en mer Noire et au Canada ainsi que par la décision du président américain de ne pas se représenter.

Les cours du blé et du maïs avaient lourdement chuté entre fin mai et juillet, à l’approche de la moisson 2024 qui devait à nouveau remplir les silos. À Chicago mi-juillet, le blé a même atteint son plus bas niveau en 4 mois, le maïs depuis octobre 2020 et le soja depuis novembre 2020.

Mais en France, et dans d’autres pays européens comme l’Allemagne, la récolte du blé est perturbée par des pluies intermittentes, remarque Sébastien Poncelet, analyste d’Argus Media France.

« On sait que la récolte sera mauvaise, mais on ne sait pas dans quelle ampleur », souligne-t-il auprès de l’AFP. Les volumes de blé moissonnés ne changeront plus maintenant mais il faudrait « six jours d’affilée de beau temps » pour avoir de premières estimations sérieuses.

Le blé français peu compétitif

En attendant, ce « manque de visibilité » raffermit les cours, la tonne de blé à Paris pour livraison en septembre évoluant mercredi autour de 222 euros.

Le blé d’origine française reste peu compétitif sur le marché mondial face aux blés russe ou ukrainien notamment, « comme l’ont encore illustré des appels d’offre passés la semaine dernière par l’Égypte et l’Algérie », souligne le spécialiste.

Pour le maïs coté à Euronext, qui évolue autour de 221 euros la tonne pour l’échéance d’août, la hausse est surtout alimentée par le temps sec et chaud qui sévit autour de la mer Noire et dans les Balkans, selon Sébastien Poncelet. Les récoltes en Bulgarie, Roumanie, Hongrie, Serbie, Ukraine et Russie pourraient en être fortement affectées, dit-il.

Les stocks de fin de campagne devraient rester élevés

Côté américain, le rebond des cours des grains à Chicago est « technique, pour l’essentiel », avec des spéculateurs achetant des contrats pour se protéger contre les fluctuations du marché, selon Dewey Strickler du cabinet Ag Watch Market Advisors.

« Fondamentalement, rien n’a vraiment changé. On s’attend toujours à des stocks de fin de période élevés », estime-t-il dans une interview à l’AFP. « Comme les prix sont bas, les producteurs ne vendent pas. Donc les utilisateurs commerciaux (ceux qui achètent vraiment les céréales, NDLR) achètent à terme jusqu’à ce qu’ils puissent récupérer de la marchandise », dit-il aussi.

Mais avec l’approche de la récolte de maïs et de soja, le marché s’attend à ce que les fermiers soient contraints de vendre prochainement pour libérer des capacités de stockage.

« Selon les informations qui nous parviennent, les États-Unis vont avoir une grosse récolte, peut-être plus importante encore qu’on ne l’attendait », souligne Jake Hanley de la société d’investissement Teucrium Trading pour qui le rebond récent est aussi surtout technique, « lié à des algorithmes ou à des achats de couverture ».

Tarifs douaniers ?

Pour Jon Scheve du cabinet Superior Feed Ingredients, la décision de Joe Biden de retirer sa candidature à la prochaine élection présidentielle a aussi pu jouer.

« L’idée était que sous (Donald) Trump, il y aurait plus de tarifs douaniers, mais qu’avec (Kamala) Harris (pressentie pour être la candidate démocrate, NDLR), la probabilité serait moindre. Donc les fonds cherchent à se couvrir » pour prendre en compte cette évolution, analyse-t-il auprès de l’AFP.

Le colza coté à Euronext est de son côté repassé lundi au-dessus de la barre symboliques des 500 euros la tonne pour l’échéance de novembre avant de se tasser un peu.

En France, comme pour le blé, la moisson est laborieuse et « pas facile à évaluer », remarque Sébastien Poncelet. Le prix est surtout dopé selon lui « par le cousin canadien du colza, le canola, au plus haut depuis 7 semaines ».

« La végétation était encore luxuriante il y a deux semaines mais les prairies canadiennes sont tout a coup affectées par l’absence de pluies et des températures qui montent jusqu’à 35-40 degrés », selon l’analyste.