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Louise Denis : « Croire dans le lait pour produire 1,250 Ml demain »


TNC le 30/08/2024 à 04:27
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Louise veut vivre de sa passion de l'élevage laitier. (© TNC)

Louise est satisfaite et même fière de sa première année d’installation, aux côtés de son mari, sur une ferme de 115 vaches laitières en Normandie. Plusieurs mois certes intenses en démarches, projets et temps de travail, mais le couple a continué de développer l’exploitation. À la clé : productivité et autonomie, grâce à leur système pâturant et leur conduite du troupeau. « Il y a de l’avenir dans l’élevage et le lait », estime la jeune éleveuse. Pour preuve : un troisième jeune va bientôt les rejoindre sur la structure.

« Il faut croire dans le lait ! L’élevage a de l’avenir, avec des structures viables et transmissibles, comme ici avec l’arrivée de deux jeunes sur l’exploitation de mon mari Maxime. Avec notre troupeau, nous avons l’objectif de développer l’entreprise et de saturer le bâtiment pour produire 1,250 Ml demain. »

Louise Denis, installée depuis le 1er mars 2023 à Bernières-le-Patry (Calvados), est confiante quant à la pérennité de la production bovine laitière et celle de sa ferme. 13 fermes dans le village et une moyenne d’âge de 35 à 40 ans : la zone est dynamique.

« Autour de nous : 35-40 ans de moyenne d’âge »

« Il y aura forcément des volatilités sur les marchés, anticipe-t-elle. Mais notre plan d’entreprise (PE) nous incite à sécuriser la gestion de l’exploitation, à ne pas prendre trop de risques. » Elle en est convaincue : « avec nos animaux et notre système pâturant, qui amènent autonomie et productivité, nous savons que nous pourrons y arriver. »

Concrétiser un projet commun

Passionnée de vaches depuis toute petite, la jeune femme a choisi de devenir éleveuse par « volonté d’être autonome dans la prise de décision », d’avoir sa propre entreprise et de « vivre de sa passion de l’élevage laitier », celui de ses parents dans le Pas-de-Calais ne pouvant l’accueillir. Alors elle a d’abord mis cette dernière au service d’autres éleveurs en tant que conseillère alimentation au sein de la coopérative du secteur.

Elle y rencontre en 2017 son futur mari, adhérent. Auprès du producteur laitier, sa passion des animaux se ravive. Un temps, elle mène en parallèle sa profession et la ferme. Avant de devoir faire un choix. « Au départ en retraite de ses parents, Maxime n’aurait pas pu produire seul 980 000 l de lait, à moins d’embaucher. À la naissance des enfants, j’ai décidé d’arrêter mon activité professionnelle, même si elle me plaisait, pour concrétiser un projet commun. »

Cela ne se passe jamais comme sur le papier, mais ça se gère !

Au bout d’un an d’installation, la jeune éleveuse ne voit que « du positif », malgré quelques imprévus (dont l’achat d’une mélangeuse automotrice) auxquels chaque installé peut s’attendre : « Cela ne se passe jamais comme sur le papier, mais ça se gère ! Avec la passion, on parvient toujours à avancer et à atteindre les objectifs qu’on s’est fixés. » Et d’ajouter : « Dans l’ensemble, on respecte notre PE. »

Elle les aime, Louise, ses animaux. (© Terre-net Média)

« Reprendre une ferme pérenne aide à franchir le cap »

Seconde fosse à lisier couverte, tunnel pour stocker la paille ensilée des logettes, automoteur pour les entretenir, agrandissement du silo à maïs : le couple a continué de moderniser l’élevage. Surtout, il a augmenté en production et nombre de vaches. « Nos objectifs ne sont pas atteints en totalité mais ça avance bien », répète Louise. En termes d’organisation, « chacun a trouvé sa place, c’est déjà bien rodé », souligne-t-elle.

Amortir une entreprise qui a investi et fonctionne bien.

Il faut dire que la ferme était en vitesse de croisière, son conjoint l’ayant rejointe en 2008. En 15 ans, les exploitants ont investi dans une stabulation pour les vaches laitières et une salle de traite rotative. Des outils fonctionnels, qui ont plus de 10 ans certes, mais ne sont pas trop anciens et peuvent encore durer 10-15 années.

Autant d’atouts indéniables pour s’installer en agriculture, reconnaît la jeune productrice : « Rentrer dans une structure pérenne, où des investissements ont été réalisés régulièrement, m’a aidée à franchir le cap. Cela revient à amortir une entreprise qui fonctionne bien. »

Les outils sont fonctionnels : l’exploitation a investi, ces 15 dernières années, dans une stabulation logettes et un roto de traite. (© Terre-net Média)

Bientôt un troisième associé

D’ailleurs bientôt, Paul, 22 ans, va lui aussi entrer dans le Gaec. « Maxime le connaît depuis l’enfance. Il venait pendant les vacances, puis a été apprenti durant son CS lait et salarié deux ans. Le temps de se sentir prêt à être chef d’exploitation. » Via la reprise d’une ferme à 10 km, cette association permet d’agrandir la SAU de 65 ha pour être 100 % autonomes en fourrages : plus besoin, entre autres, d’acheter 5-6 ha/an de maïs ensilage. « Il nous manquait juste un peu de surfaces en herbe et nous allons augmenter celle en cultures de vente », indique Louise.

On n’a qu’à poser nos valises !

S’il n’est pas tout proche, le site est bien entretenu et les terres en bon état. « On n’a qu’à poser nos valises ! » Les éleveurs récupéreront aussi quelques bâtiments d’élevage. « Car qui dit plus de lait, dit forcément plus de vaches et de génisses à loger », enchaîne l’agricultrice. Le post-sevrage sera géré là-bas, de même qu’un petit troupeau allaitant. Ainsi, les veaux et les élèves seront moins à l’étroit. « Cela évite de construire une stabulation, qui aurait gonflé les coûts. »

« Reprendre une exploitation dans les environs et intégrer Paul dans le Gaec : une opportunité que nous ne pouvions pas laisser filer ! » (© Terre-net Média)

« Se libérer davantage »

Autre avantage à être trois associés, pouvoir se libérer davantage : un week-end sur deux en gardant deux semaines de congé par an, l’une l’hiver, l’autre l’été. « Il est important, pour soi et ses proches, de décrocher, profiter de la vie en dehors de l’élevage, voire partir ailleurs », juge l’éleveuse. En parlant d’astreintes, Louise s’occupe actuellement seule de la traite du soir (1h20 + 20′ de nettoyage) lors des pics d’activité (moisson, ensilage, semis…) et en binôme sinon.

Savoir décrocher et profiter de la vie.

Le matin, puisque le couple n’habite pas sur place, elle se charge des soins aux veaux jusqu’au sevrage (et de la nursery : nettoyage et vide sanitaire), puis prépare les enfants (2 et 4,5 ans) pour l’école et la nourrice. D’ici la fin d’année, ce sera plus facile, la jeune femme perdra moins de temps sur la route et pourra traire le matin, une fois terminée la rénovation de la maison du premier corps de ferme.

Paul sera plus présent auprès des animaux sur celui de Moncy, où se situera son logement. À part ça, le collectif de travail s’organisera de la même manière qu’aujourd’hui : les travaux des champs, l’alimentation, le paillage et l’entretien des stabulations pour Paul et Maxime, la traite, les veaux et l’administratif pour Louise.

Habiter sur la ferme facilitera l’organisation du travail, en particulier pour la traite et les soins aux veaux. (© Terre-net Média)

« Fière des évolutions apportées »

« Reprendre une exploitation dans les environs et intégrer Paul dans le Gaec, une opportunité que nous ne pouvions pas laisser filer ! », s’exclame Louise. Même s’il faut modifier le plan d’entreprise par un avenant. « C’est toutefois assez classique, précise-t-elle. Au départ, nous devions nous installer au même moment, mais la recherche de la ferme, plus longue que prévu, a différé son installation dans l’élevage. Un mal pour un bien, car ce report étale les prêts. »

Beaucoup de projets à mener de front.

La jeune agricultrice qualifie cette première année de « transitoire », avec beaucoup de projets et travaux à mener de front, professionnels et personnels (habitation et mariage). « Tout s’est bien déroulé. On a réussi à tout boucler ! Le bout du tunnel approche. Paul sera notre associé en septembre et dans trois mois, nous aurons fini de rénover notre maison. Je suis contente et fière de ce que nous avons accompli, en particulier des évolutions apportées à notre entreprise. » Et les trois chefs d’exploitation entendent bien poursuivre la modernisation de la ferme.

S’impliquer en dehors de l’exploitation

Louise trouve encore le temps de s’engager dans les organisations agricoles, au sein de sa laiterie Eurial (1), dans le Comité de bassin du bocage virois et ornais, et dans la commission jeune. De même qu’au niveau perso, au comité des fêtes de sa commune. « Quand j’étais conseillère en élevage, j’ai pris l’habitude de bouger, je compte bien la conserver ! »

Essentiel pour l’équilibre personnel et celui du Gaec.

« Nous parlons de la conjoncture, nous échangeons sur le prix du lait, c’est très intéressant. Nous remontons les problématiques terrain, touchant en particulier les jeunes, pour faire progresser les choses. Maxime et Paul ont aussi des engagements, essentiels pour l’équilibre de chacun et celui de la société. » Les journées sont bien remplies mais « avec une orga bien huilée, tout rentre dans l’emploi du temps et si on peut gagner 10 min, c’est toujours bon à prendre ! », fait remarquer l’exploitante.

(1) Le plan jeunes agriculteurs de la coopérative propose des aides à l’installation, à la capitalisation (reprise de parts sociales), à la trésorerie, ainsi que des remises commerciales sur les services de la coopérative, appros, etc. et des échanges, notamment, autour de visites de fermes. Des voyages d’étude sont organisés en France et à l’étranger.

La relève est assurée ! (© Terre-net Média)