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Il faut « cultiver plus de blé dur » en France, plaident les fabricants de pâtes


AFP le 15/10/2024 à 12:14
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« La meilleure façon de sécuriser la production de blé dur française passe par l'augmentation des surfaces cultivées », affirme Albert Mathieu, président du syndicat des industriels fabricants de pâtes et semoule (Sifpaf). (© Johannes Wilke/Adobe Stock)

A quelques semaines des semis, les fabricants de pâtes et semoule appellent à « cultiver plus de blé dur » en France et renouvellent leur engagement de « s'approvisionner à 100 % » dans le pays en dépit de l'impact économique de la mauvaise récolte en 2024.

Si les industriels sont inquiets, c’est que les surfaces cultivées, actuellement d’environ 240 000 hectares, « ont été divisés par deux en l’espace de quinze ans », alors que la consommation de pâtes ne cesse de croître (+ 8 % depuis 2019), explique à l’AFP Albert Mathieu, président du syndicat des industriels fabricants de pâtes et semoule (Sifpaf) et par ailleurs PDG de Panzani.

« La meilleure façon de sécuriser la production de blé dur française passe par l’augmentation des surfaces cultivées », affirme-t-il.

Les industriels cherchent à convaincre les agriculteurs, qui « prendront dans les prochaines semaines des décisions sur leurs semis » pour la récolte 2025, de faire le choix du blé dur.

En 2023, la France a produit près d’1,3 million de tonnes de cette céréale exclusivement destinée à l’alimentation humaine, des coquillettes au couscous. Cette année, « alors que les surfaces cultivées sont identiques, donc faibles, on estime que le volume récolté sera d’un peu plus d’un million de tonne », indique Albert Mathieu.

La récolte de blé dur, comme celle de son cousin le blé tendre, a été catastrophique cette année, du fait des aléas climatiques – essentiellement des précipitations – qui ont retardé les semis et affecté les rendements : la production de blé dur d’hiver est estimée en recul de 20 % sur un an, selon le dernier bilan du ministère de l’agriculture.

Pour les pastiers et semouliers français, qui consomment chaque année quelque 650 000 tonnes de blé dur, on s’approche du « seuil critique ».

Outre la question qui pourrait devenir cruciale de la disponibilité, alors que la France exporte traditionnellement son surplus de grains, notamment vers l’Italie, la mauvaise récolte 2024 a eu « un impact économique » négatif pour les industriels, selon le Sifpaf.

« On est là »

« On n’a pas un blé de mauvaise qualité – le taux de protéine est excellent et fera de très bonnes pâtes -, mais les grains sont plus petits, moins remplis : il faut 10 % de blé en plus pour produire la même quantité de pâtes », explique le président du syndicat professionnel.

Cela n’aurait pas d’impact majeur sur les pastiers français si 65 % des pâtes vendues en France n’étaient pas importées, souligne-t-il.

Or les concurrents des industriels nationaux se fournissent en blé dur sur un marché mondial où les cours tendent à baisser, du fait d’« une récolte mondiale en hausse, notamment au Canada, qui est le plus gros pays exportateur, et aussi du fait de la montée en puissance de la Turquie, qui a un excédent par rapport à ses besoins domestiques », détaille Albert Mathieu. La bonne nouvelle pour le consommateur est que le prix des pâtes, lié aux cours, devrait rester orienté « à la baisse » en France, dit-il.

Côté industriels, en dépit de l’impact de la concurrence, les fabricants nationaux – Panzani, Lustucru, Alpina – « ont fait le choix de s’approvisionner à 100 % en blé dur français » et « se tiendront à ce choix », martèle-t-il.

« C’est notre message aux agriculteurs : on est là, on assure les débouchés des récoltes, on fait ce qu’il faut et on ne remettra pas en cause nos engagements en blé français même si il y a aujourd’hui d’autres blés sur le marché qui nous rendraient la vie plus facile », a-t-il déclaré.

Pour relancer la production en France, « il faut donner de la visibilité aux agriculteurs » : « c’est ce que nous faisons et que nous portons collectivement, dans le cadre du plan de souveraineté blé dur », initié par les céréaliers et annoncé par le gouvernement en février dernier.

Ce plan, doté de 43 millions d’euros dont 11 millions promis par l’Etat sur cinq ans, met notamment l’accent sur la recherche variétale, pour trouver des blés plus résistants face au changement climatique (maladies, manque ou excès d’eau…).

Il s’agit aussi de reconquérir des parts de marché pour les pâtes françaises, souligne Albert Mathieu, alors que les usines françaises ont la capacité d’absorber 10 à 20 % de blé dur en plus.