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Réglementation bien-être animal : les mesures dans les tiroirs de Bruxelles


TNC le 16/10/2024 à 05:46
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Les recommandations de l'Efsa donnent un premier aperçu de la manière dont va évoluer la réglementation européenne sur le bien-être des bovins. (© St. Kolesnikov)

Alors qu’un premier projet de loi sur le transport des animaux d’élevage a été présenté par la Commission européenne fin 2023, d’autres textes devraient voir le jour d’ici 2026. Au programme : fin des cages, enrichissement du milieu de vie, interactions sociales ou encore fin des mutilations.

En 2019, Ursula von der Leyen est élue à la tête de la Commission européenne. Son ambition : mener un mandat sous le signe de la transition environnementale. Le Green Deal, présenté en 2020, sera sa profession de foi, marquée par la volonté d’améliorer le niveau général de bien-être animal eu Europe.

Cinq ans plus tard, le flou se précise. Luc Mounier, responsable de la chaire bien-être animal à VetAgro Sup, expose les principales tendances avec lesquelles les éleveurs devront composer. « L’objectif initial, c’était d’avoir des projets de lois avant 2024, soit la date des élections européennes. » Mais entre guerre en Ukraine, inflation et manifestations des agriculteurs, le Green Deal a pris du retard. « Seul le texte sur le transport des animaux d’élevage a été présenté en décembre 2023 », résume l’enseignant-chercheur.

Actuellement en examen au sein des États membres, le projet de loi évoque, entre autres, l’interdiction du transport des veaux de moins de cinq semaines. « Le texte définitif devrait être présenté au parlement l’année prochaine. » En d’autres termes, il est fort probable que la mesure soit adoptée. Reste à voir quels seront les délais de mise en conformité.

Vers une nouvelle réglementation en 2028

D’autres mesures sont dans les tiroirs. « La plupart des avis de l’Efsa ont été rendus. Reste celui concernant les vaches allaitantes, qui devrait sortir courant 2025. Cela laisse présager de propositions aux États membres courant 2026, avec peut-être un vote en 2028 ».

Repenser l’élevage des veaux laitiers

S’il est encore trop tôt pour connaître le contenu des textes, les avis de l’Efsa donnent le ton. Du côté des exploitations laitières, « les évolutions vont surtout concerner l’élevage des veaux », avertit Luc Mounier. Abaissement de l’âge de vie en groupe, valorisation du contact mère/veau ou nourrice/veau, enrichissement du milieu de vie… « Il ne faut pas penser un bâtiment en 2024 sans s’interroger sur la manière dont on compte intégrer ces problématiques », insiste le chercheur.

En ce qui concerne les vaches, « il y aura peut-être des évolutions en termes de surfaces minimales par animal, mais ça ne devrait pas être très impactant ». Le prochain texte pourrait toutefois porter le coup de grâce aux étables entravées, encore présentes en zone de montagne. « C’est un vieux loup de mer », poursuit Luc Mounier. « Il y avait déjà le projet d’interdire l’attache en 2004. Ça ne s’est pas fait à l’époque, mais je ne suis pas sûr qu’il y ait encore les soutiens nécessaires aujourd’hui pour maintenir de genre de systèmes ».

D’autant qu’interdiction ne veut pas forcément dire fermeture immédiate. « En volaille, il n’est plus possible de construire de nouveaux bâtiments pour l’élevage en cage. Ça permet d’avoir une transition progressive. Mais c’est assez sournois, parce qu’on se retrouve avec des éleveurs qui ont des structures vieillissantes, dans lesquelles ils n’investissent plus. »

Plus de place pour l’engraissement

Le cheptel allaitant devrait être peu impacté. « On est sur des systèmes plutôt herbagers, et sans cages en règle générale ». C’est surtout du côté des engraisseurs que pourraient intervenir les plus gros changements, avec une modification de l’espace réglementaire nécessaire pour l’engraissement des taurillons, comme pour la production de veaux de boucherie. Des recommandations sur les types de sols dans les bâtiments d’engraissement pourraient voir le jour. L’utilisation du gène culard pourrait également être questionnée.

Il faut dès à présent intégrer ces problématiques dans les nouvelles conceptions de bâtiment.

Difficile pour l’instant de dire ce qui relèvera du réglementaire, et de la tendance. Mais pour le chercheur, « il serait très audacieux de concevoir un nouveau bâtiment sans prendre en compte ces considérations. Si ça n’est pas la réglementation qui l’impose, les différents cahiers des charges iront dans ce sens, alors autant l’anticiper ».

La reconduction d’Ursula von der Leyen à la tête de la Commission européenne rend peu probable un changement de cap. Le discours stratégique sur l’avenir de l’agriculture, de début septembre, confirme la volonté de poursuivre le travail. Les priorités restent toutefois portées sur la souveraineté alimentaire, et le renouvellement des générations. « Nous sommes sur un parlement un petit peu plus à droite qu’en 2023. Les textes iront peut-être un peu moins loin que ce qui aurait pu être fait sous la précédente mandature, mais il y aura des évolutions », tranche l’enseignant-chercheur.