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Du Texas à l’Inde, des ambitions viticoles décuplées


AFP le 17/10/2024 à 15:59

Peut-être formeront-ils demain le « nouveau nouveau monde » de la vigne : au congrès du centenaire de l'Organisation internationale du vin (OIV), des Indiens, des Japonais, des Texans, sont venus en Bourgogne exprimer leurs ambitions viticoles, à l'heure où le climat mondial change.

Il y a trois ans, le Texas a rejoint l’OIV et ses 50 Etats membres comme observateur, à l’initiative de son département à l’Agriculture. Dans cet Etat plus grand que la France et puissance agricole, le vin, réinstallé dans les années 1980, connaît un boom depuis 10 ans, soutenu par l’afflux de nouveaux habitants, explique l’agronome Amit Dhingra, de l’université Texas A& ;M, lors de ce congrès, organisé à Dijon, capitale de la région viticole française de Bourgogne.

« C’est un marché croissant, dans un Etat ouvert aux affaires. Et puis le vin réunit les gens, et cela va très bien avec la culture du Texas », dit-il. Ici, c’est un cardiologue qui se lance, là un expert des sols. « C’est un mélange de parcours, tous des gens nouveaux » dans le métier.

En 2022, 800 exploitations (près de 1 400 vignobles) ont embouteillé 38 millions de litres, propulsant le Texas dans le top 3 américain, après les Etats de Californie et Washington. 80 variétés sont cultivées, malbec, trebbiano, tannat…

« La qualité s’est améliorée », dit M. Dhingra, qui invite à « ne pas comparer » à d’autres régions : « chacune a son terroir », et puis des vins texans ont eu plusieurs « médailles d’or » à des concours internationaux.

En se rapprochant de l’OIV, organisation intergouvernementale à vocation technique créée en 1924, il s’agit d’« internationaliser le business ». Avec 10 appellations, le Texas se rêve aussi en « laboratoire du monde pour la recherche climatique appliquée à la vigne ».

« Nous avons 1 300 types de sols, nous pouvons essayer différentes variétés », poursuit l’expert, qui travaille sur les sujets de soutenabilité (eau, amendement des sols, plantation d’herbe pour limiter l’évaporation, etc).

« Températures bourguignonnes »

Venu de l’autre côté du globe, Keisuke Saito, maire de Yoichi, dans le nord du Japon, a lui aussi décrit une île d’Hokkaido idéale pour le pinot noir et le chardonnay, avec « sa neige poudreuse et ses températures bourguignonnes ». Sa bourgade de 18 000 habitants est passée en dix ans de deux vignobles à 19, dit l’élu, venu chercher informations et collaborations.

« Pendant longtemps, on a dit que le Japon n’était pas favorable à la vigne car il y pleut beaucoup. Mais cette année le climat a été meilleur qu’ici », en France, constate, malicieux, Kensuke Ebihara, de l’université Meiji Gakuin à Tokyo.

Mais pour un réel essor national, le juriste, spécialiste du droit du vin, plaide pour une adhésion de son pays à l’OIV, qui oeuvre à harmoniser les normes et diffuser les recherches.

Pour autant si ces régions montent, comme aussi la Suède, la Belgique… il leur reste du chemin avant d’avoir un impact sur la production mondiale. Les régions nouvelles ont « des taux de croissance élévées, mais les volumes restent très petits », souligne Giorgio Delgrosso, responsable de la division statistiques à l’OIV. En revanche, « on suit avec intérêt les évolutions de l’Inde, qui reste petit mais avec un potentiel énorme », ajoute-t-il.

Aujourd’hui « l’Inde est le seul pays au monde » où les ventes d’alcool vont à 92 % sur les spiritueux, 7 % la bière et… 0,3 % le vin, souligne Sumit Jaiswal, de l’Association des producteurs de vin d’Inde (GWAI), fondée en 2022 et fortement soutenue par l’Australie. Il décrit l’ampleur des défis : régulation, fiscalité, marketing… Mais « nous allons dans la bonne direction », insiste-t-il.

Le marché part de loin, mais connaît une croissance annuelle à deux chiffres. Sumit Jaiswal croit aussi en la jeunesse, qui voyage, et doit se voir proposer autre chose « entre la bière et le gin ».

En Inde, le premier plant de vigne a été planté en 1988 et les premiers vignobles vraiment développés en 2004, pour une production aujourd’hui de 30 millions de litres.

Alors que le réchauffement mondial se fait sentir mais aussi la pression immobilière, plusieurs terroirs viennent d’être défrichés au nord et à l’est de Bombay. « Il y a de très nombreux micro-climats et types de sols en Inde, que nous sommes toujours en train de découvrir ».