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Fermeture de l’abattoir de Sablé : un coup de pouce supplémentaire à l’import ?


TNC le 24/10/2024 à 11:44
AbattoirAdobeStock

La site de Sablé-sur-Sarthe va arrêter son activité d'abattage en 2025. Il sera transformé en centre logistique pour le groupe Bigard. (© vipavlenkoff)

Alors que l’ombre de l’accord UE-Mercosur plane sur l’élevage bovin, la fermeture de l’abattoir de Sablé-sur-Sarthe sonne comme un mauvais signal pour les éleveurs français.

Laurent Ragot, président de la section bovine de la FDSEA de la Sarthe, n’était pas optimiste en quittant les négociations avec le groupe Bigard au sujet de la fermeture du site de Sablé-sur-Sarthe, ce mardi 22 octobre. « L’abattoir va fermer début 2025. Ils ne veulent pas maintenir ne serait-ce qu’une petite activité d’abattage sur le site », confirme l’élu.

Les quelque 1 200 bovins abattus chaque semaine sur la structure seront répartis entre les sites, plus récents, de Cholet dans le Maine-et-Loire, et de Cherré-Au dans la Sarthe. L’arrêt de l’activité d’abattage n’est pourtant pas une grande surprise : « actuellement, ils ne travaillent que deux jours sur cinq. Cela permettra de renflouer les autres structures », précise Laurent Ragot.

« Ce qui nous inquiète, c’est l’éloignement des autres sites », poursuit l’élu. Compter au minimum une heure de transport supplémentaire, à laquelle s’additionne le temps des rassemblements logistiques. « C’est un mauvais signal envoyé à l’abattage de proximité pour la vente directe, et la boucherie traditionnelle », résume Laurent Ragot.

Le groupe Bigard s’est toutefois engagé à prendre en charge les frais de transport pour les animaux destinés à l’abattage familial et à la boucherie.

On envoie un très mauvais signal aux jeunes

Mais plus que la fermeture du site, l’élu de la FDSEA regrette le message envoyé aux agriculteurs. « L’arrêt de collecte de Lactalis, la fermeture de l’abattoir Charal… On envoie un très mauvais signal aux jeunes qui veulent s’installer en élevage ».

Pour l’élu, les pouvoirs publics peinent à prendre en main le problème de la décapitalisation bovine. « Il y a une grosse inquiétude sur l’approvisionnement des abattoirs, mais on n’a pas vraiment de prise de conscience de l’interprofession, ou même de l’État. Tout semble très déconnecté de ce qui se passe sur le terrain ».

Une fermeture mal venue avec la réémergence de l’accord UE-Mercosur

Les récentes avancées sur le traité UE-Mercosur sonnent comme une trahison. Si rien n’est encore officiel, la rumeur plaide en faveur d’une ratification à l’occasion de la rencontre du G20 à Rio, les 18 et 19 novembre. Dans les tuyaux, un vote à la majorité qualifiée (15 États membres sur 27). Un mode de scrutin qui ne permet pas à la France de faire barrage à l’accord, d’autant que des poids lourds européens, comme l’Allemagne, plaident en sa faveur.

« Nous avons peur d’être la monnaie d’échange pour permettre à l’Allemagne d’exporter ses voitures en Amérique du Sud », résume le président de la section bovine de la FDSEA 72. « Est-ce qu’on va nous laisser aller dans le mur pour se faire sauver par l’Amérique du Sud ? »

Un dépôt logistique pour valoriser de la viande d’importation ?

À la place de l’activité d’abattage, le groupe Bigard va faire du site de Sablé-sur-Sarthe une plateforme logistique. « Il faut comprendre que la structure deviendra un site de stockage de produits congelés. À voir ce qu’ils mettent dans les congélateurs ! » regrette l’élu. « Bigard reste un des chefs d’orchestre de la décapitalisation. Est-ce qu’un jour ils n’en seront réduits à transformer du PAD issu d’importation ? »

La situation dépeinte par l’éleveur est loin d’être rose. « J’estime que dans deux ou trois ans, ça sera fini. J’ai 62 ans, beaucoup de mes collègues ont mon âge et n’arrivent pas à transmettre leurs fermes. Si rien n’est fait pour garder des vaches en France d’ici là, il sera trop tard ».