Chez T. Rondier : l’engraissement de JB a généré 2,9 Smic par UMO en 2023
TNC le 05/11/2024 à 05:33
Dans le Cher, Thomas Rondier garde régulièrement un œil sur le coût alimentaire de sa ration d’engraissement des broutards. Le pari a été gagnant sur l’année 2023, avec une marge sur coût alimentaire autour des 500 € par broutard. Mais pour que la pratique reste aussi attractive, l’éleveur espère que le cours du JB suivra celui du maigre dans les mois à venir.
Naisseur engraisseur de bovins, Thomas Rondier n’aime pas voir sortir un animal maigre de chez lui. En plus du produit de ses 92 mères allaitantes, l’agriculteur achète 360 broutards chaque année pour l’engraissement. En comptant les vaches finies et les génisses, pas moins de 500 animaux bien en chair sortent de la structure chaque année.
Son objectif : « rechercher de la valeur ajoutée en finissant tous les animaux avec les produits de la ferme » explique l’éleveur, à l’occasion d’une conférence de l’Idele au Sommet de l’élevage. Pour ce faire l’agriculteur alloue ses 190 ha de SAU à l’élevage, dont 89 ha de grandes cultures.
2 à 3 kg de fourrage dans la ration d’engraissement
Le pari est gagnant. En 2023, la structure a dégagé 2,9 Smic par UMO. Ses secrets : rigueur sanitaire, et surtout, autonomie alimentaire. « J’ai du fourrage pour tout le monde. Pour les allaitantes, comme les bovins à l’engraissement » explique Thomas. Ensilage en avril, enrubannage en mai… Sur l’EARL Rondier, on vise le fourrage de qualité.
Pour l’agriculteur, l’autoproduction est un moyen de maîtriser les coûts. « C’est difficile de donner des rations précises, parce que ça évolue selon la qualité des récoltes, mais je sécurise toujours ma ration d’engraissement des JB avec 2 à 3 kg de fourrage de qualité » insiste Thomas.
Une marge nette de 180 € par JB
Pour la ration d’automne, compter 2 kg d’ensilage de prairies multi-espèces et sorgho, auquel s’ajoutent 2 kg de maïs grain humide, 4,1 kg de blé broyé, 1,9 kg de tourteau de colza et 500 g de paille. « On vise les 1 700 g de GMQ sur 200 jours, avec une ration facile à distribuer ». Côté coût, l’éleveur estime sa ration à 2,60 € par jour et par broutard, pour une marge sur coût alimentaire de 517 € par jeune bovin. « On tourne autour des 180 € de marge nette par animal » tranche Thomas.
« Pour moi, engraisser ou non n’est pas une question qui se pose à l’année. Les chiffres présentés sont ceux de 2023. Ils sont bons. Nous verrons bien ce que 2024 va donner, mais pour être rentable, il faut du fourrage, et c’est quelque chose qui se produit sur le temps long ».
Mais achat d’aliment ne rime pas forcément avec mauvaise affaire. Tout est question d’équilibre. « L’an dernier, je n’avais pas assez de céréales. J’ai dû acheter du Wheatfeed, [un coproduit issu de la fabrication de bioéthanol de blé] ». L’engraissement n’en a pas été moins rentable, avec une marge sur coût alimentaire de 497 € pour les animaux en question.
Pour rester rentable, l’éleveur est très attaché à sa calculatrice. Chaque année, les rations sont repensées en septembre selon le volume et la qualité des stocks récoltés, et planifiées sur l’année. Une manière d’avoir de la visibilité sur les volumes à acheter, ne serait-ce que pour le tourteau. « Comme on sait ce dont on a besoin, on essaie de saisir des opportunités de marché ».
Il faut que le prix du JB suive la hausse du prix du maigre
Mais c’est surtout le prix du maigre qui inquiète l’engraisseur. « Le maigre a passé la barre des 3,80 € le kg vif, et les contrats mis en place ne suffisent pas » estime Thomas Rondier. « Il faut soutenir le maigre pour garder du naissage en France, mais il faut aussi que les JB se vendent bien pour répondre au besoin de consommation. Sinon, on aura des vaches, mais les broutards continueront de partir à l’export » estime l’agriculteur. « Et pourtant, je suis un engraisseur, j’ai du mal à voir partir un animal qui n’est pas fini ».
Si certains voient en l’engraissement une manière d’atténuer la décapitalisation bovine, la pratique reste très demandeuse en capitaux. « Pour démarrer, la mécanique est longue. Il faut immobiliser beaucoup d’argent avec les broutards, et les taux sont élevés » remarque Thomas Rondier. La vente de broutard a quant à elle l’avantage de rapporter rapidement de la trésorerie aux exploitants. « Si l’on veut développer l’engraissement, il faut que le prix du produit fini soit vraiment attractif, car même pour un éleveur en place, la trésorerie disponible est grignotée par la hausse du prix du broutard » conclu l’engraisseur.