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Quels paramètres influencent la disparité des revenus agricoles ?


TNC le 08/11/2024 à 15:30
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Quels facteurs influencent les écarts dans les revenus agricoles ? (© Adobe Stock)

Si les revenus agricoles sont globalement soumis à d’importantes fluctuations conjoncturelles liées au climat et aux marchés mondiaux, on constate de très fortes disparités entre filières et entre exploitations. Quels facteurs expliquent en partie ces différences ?

Avec 22 800 € par an (en 2020), les agriculteurs ont un niveau de vie médian comparable à celui de l’ensemble des ménages français, dont la médiane s’élève à 22 400 €. Cependant, ces résultats sont obtenus avec une charge de travail supérieure, puisqu’en 2022, les agriculteurs travaillent en moyenne 15 heures de plus par semaine (52,5 heures par semaine, contre 37,1 heures par semaine pour l’ensemble de la population), et plus régulièrement le soir, la nuit, et le week-end.

Pour autant, des disparités importantes existent au sein même de la population agricole. Le premier décile de revenus des ménages constitués d’au moins un exploitant agricole s’établissait en 2020 à 10 900 € par an, soit 4,1 fois plus faible que celui du dixième décile, un rapport qui n’est que de 3,4 pour l’ensemble des ménages français résidant en France, souligne une note de la Direction générale du Trésor, publiée le 15 octobre.

Taille et type de production

« La taille des exploitations est un déterminant important du revenu agricole : le tiers constitué par les plus petites exploitations a généré un revenu par actif quatre fois plus faible que le quart constitué des plus grosses exploitations », indiquent les auteurs, Félix Bastit et Emmanuelle Poujaud, s’appuyant sur les données Agreste de 2023.

De même, le revenu diffère en fonction du type de production : le revenu moyen par actif s’établissait en moyenne, sur 2017-2022, à 20 000 € pour les élevages bovins viande contre près de 55 000 € pour les grandes cultures, et 53 000 € pour la viticulture.

Le taux de pauvreté reflète également cet état de fait. En 2020, celui des ménages agricoles variait de façon importante entre les productions, s’établissant à 12 % pour les grandes cultures, 22 % pour les producteurs de bovins viande, 24 % pour les producteurs d’ovins, caprins et autres herbivores, et 25 % pour les maraîchers et horticulteurs, avec un taux moyen de 16 % pour l’ensemble de la population agricole. Ce qui n’empêche pas de fortes disparités au sein des mêmes productions.

Investissement dans l’appareil productif

D’après Philippe Jeanneaux et Nathalie Velay (dans Capitalisation du revenu agricole et formation du patrimoine professionnel des exploitations agricoles, 2021), la moyenne du taux de rendement interne des exploitations serait négativement corrélée au niveau des prélèvements privés. En tant que chefs d’entreprise, les agriculteurs arbitrent en effet leur excédent de trésorerie entre rémunération de leur travail (prélèvements privés) et investissement dans l’appareil productif de l’exploitation. Il apparaitrait ainsi que les exploitations ayant extrait trop de revenus n’auraient pas suffisamment investi dans leur outil de production et auraient perdu en compétitivité.

L’importance de ces investissements dans l’activité agricole, au détriment parfois du revenu, explique par ailleurs un patrimoine net des ménages agricoles nettement supérieur à celui de l’ensemble de la population française, avec une médiane à 437 900 € en 2018, contre 117 000 €. Cependant, « arrivé au terme de sa carrière, l’agriculteur n’est pas assuré de pouvoir réaliser son capital professionnel. En effet, la valeur de cession des actifs de l’exploitation peut se révéler inférieure à leur valeur comptable, ce qui pourrait être expliqué par une quantité de départs à la retraite supérieure au rythme d’arrivée des jeunes agriculteurs », constate la direction générale du Trésor.

Trois autres paramètres

Enfin, quel que soit la taille ou le type de production, trois autres facteurs contribuent à expliquer la disparité des revenus agricoles : productivité du travail, efficience productive des intrants, et capacité à faire face à la dette. « Les agriculteurs les plus performants (au-dessus de la médiane), dans au moins deux de ces trois critères, ont les revenus les plus importants », soulignent les auteurs.