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Colostrum : la qualité détermine la quantité à distribuer (même en allaitant)


TNC le 13/11/2024 à 05:30
veau

(© Pixabay)

Éleveurs laitiers et allaitants : comment gérez-vous la prise de colostrum ? Quelle quantité en distribuez-vous ? Connaissez-vous sa qualité ? Rencontré au Sommet de l’élevage, le vétérinaire Jean-Philippe Gartioux nous fait réfléchir sur la stratégie de distribution de ce premier lait précieux.

Source d’énergie, de défense, mais également de croissance, le colostrum est LE partenaire du premier jour d’un veau. « C’est le premier lait pour le veau, mais également pour la vache. Sa qualité est un indicateur de santé la concernant. » Pour Jean-Philippe Gartioux, vétérinaire dans le Cher, il faut avoir en tête la règle des 5Q pour la distribution de ce premier lait (en anglais quality, quantity, quickly, quite clean, quantify) :

– qualité du colostrum (à mesurer),
– quantité (à ajuster en fonction de la qualité),
– rapidité d’administration (dans les 4 premières heures de vie),
– hygiène et propreté,
– et mesure.

À l’occasion d’une conférence organisée par Virbac au Sommet de l’élevage, il rappelle en premier lieu : « un bon colostrum est un colostrum administé au veau déjà, ce n’est pas le cas partout. Ensuite il faut quantifier les éléments qui le constituent. »

La quantité de colostrum à distribuer dépend de la qualité

« C’est seulement en fonction de sa teneur en immunoglobulines G qu’on définira la quantité à distribuer au veau. Et il faut mesurer à chaque fois car au sein d’un même élevage, avec une même préparation au vêlage, on peut avoir de gros écarts de qualité. » Le vétérinaire a réalisé un tableau pour les éleveurs allaitants qu’il suit :

Teneur IgG
colostrum (g/l)
Poids du veau
35 40 45 50 55 60 65 70 75 80
20 6,3 7,2 8,1 9 9,9 10,8 11,7 12,6 13,5 14,4
30 4,2 4,8 5,4 6 6,6 7,2 7,8 8,4 9 9,6
40 3,2 3,6 4,1 4,5 5 5,4 5,9 6,3 6,8 7,2
50 2,5 2,9 3,2 3,6 4 4,3 4,7 5 5,4 5,8
60 2,1 2,4 2,7 3 3,3 3,6 3,9 4,2 4,5 4,8
70 1,8 2,1 2,3 2,6 2,8 3,1 3,3 3,6 3,9 4,1
80 1,6 1,8 2 2,3 2,5 2,7 2,9 3,2 3,4 3,6
90 1,4 1,6 1,8 2 2,2 2,4 2,6 2,8 3 3,2
100 1,3 1,4 1,6 1,8 2 2,2 2,3 2,5 2,7 2,9
110 1,1 1,3 1,5 1,6 1,8 2 2,1 2,3 2,5 2,6
120 1,1 1,2 1,4 1,5 1,7 1,8 2 2,1 2,3 2,5
130 1 1,1 1,2 1,4 1,5 1,7 1,8 1,9 2,1 2,2
140 0,9 1 1,2 1,3 1,4 1,5 1,7 1,8 1,9 2,1

« C’est assez facile de mesurer la qualité d’un colostrum, il suffit de s’équiper d’un réfractomètre. » En ce qui concerne la lecture, voici un indicateur :

Réfractomètre Concentration en IgG Qualificatif
> 28 % Brix > 80 g/l Excellent
Entre 22 et 28 % Brix De 50 à 80 g/l Bon
Entre 15 et 22 % Brix De 28 à 50 g/l Insuffisant
< 15 % Brix < 28 g/l Très pauvre

Traire les vaches allaitantes

Plutôt axé sur l’élevage allaitant de par sa région d’exercice, Jean-Philippe Gartioux recommande dans la mesure du possible de traire la vache plutôt que de laisser le veau téter de lui-même. « Il vaut mieux passer un peu de temps à traire que de soigner des veaux malades. » L’idée encore une fois c’est de contrôler la qualité et la quantité, le nerf de la guerre pour le colostrum !

Il faut 15 minutes au jeune veau pour boire 1 litre

« Si le veau est tonique et a envie de téter, on peut le laisser faire mais il faut avoir en tête qu’il lui faudra au moins 15 minutes pour tirer 1 seul litre. Et l’objectif c’est qu’il ait eu sa dose le plus rapidement possible après le vêlage. » Son conseil pour traire une vache allaitante : s’équiper de barrières de contention. « On a aussi un court temps après le vêlage où la vache est relativement calme. Parmi les éleveurs que je suis, il y en a un qui trait systématiquement ses Charolaises au vêlage. C’est une habitude, il s’est équipé pour et ça s’intègre dans son travail quotidien. » Pour le vétérinaire, en lait comme en viande, le drenchage des veaux est aussi à étudier pour maîtriser une bonne absorption du colostrum.

Le colostrum : indicateur de santé du troupeau

Depuis 4 ans, l’entreprise de santé animale Virbac suit plus de 280 élevages afin de récolter des données de colostrum pour réaliser un observatoire de la qualité colostrale. Plus de 10 000 échantillons ont été analysés sur 13 races laitières et allaitantes. D’après les données recueillies, un bon colostrum chez les éleveurs laitiers contiendrait plus de 80 g/l d’IgG en vaches laitières et 115 g/l en allaitantes.

La phase d’après se nomme Day 1. C’est une application pour les éleveurs désireux de suivre et améliorer leurs pratiques colostrales. Ils saisissent quelques critères d’élevage (alimentation, mode de tarissement, traitement antiparasitaire, etc.) et leur vétérinaire pourra les accompagner selon les objectifs ciblés. « On ne s’améliore que lorsqu’on connaît son niveau de départ, assure Jean-Philippe Gartioux qui utilise Day 1. Le suivi se fait dans la durée car l’amélioration des pratiques colostrales se fait sur le long terme. »

D’ailleurs, le vétérinaire rappelle : « On parle beaucoup de qualité du colostrum mais pensons aussi à la quantité. Les apports alimentaires jouent un rôle important, notamment par la qualité des fourrages. N’oublions pas non plus la préparation vaccinale et les traitements antiparasitaires qui jouent sur le volume et la concentration en IgG. »