Sous Trump, la carte climat va « soit rétrograder dans les priorités, soit disparaître »
TNC le 20/01/2025 à 10:00
Agroenvironnement, alimentation de proximité, concentration des marchés : comment l’administration Biden a-t-elle traité ces sujets liés à la durabilité des filières agricoles ? Quel sera l’impact du retour de Trump ? Retrouvez l’éclairage de Jean-Christophe Debar, consultant à Agri US Analyse.
Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, comment vont évoluer les filières agricoles américaines en termes de durabilité ? Nous avons posé la question à Jean-Christophe Debar, spécialiste de la politique agricole américaine.
« L’administration Biden s’est vraiment distinguée par l’accent mis sur la décarbonation des filières agricoles, rappelle-t-il. Au sein des programmes agroenvironnementaux, l’approche était d’essayer de spécifier des mesures climatiques et cette carte climat va soit rétrograder dans les priorités, soit disparaître ».
Mais dans un sens plus général, les initiatives tournées vers l’agroenvironnement devraient perdurer : « sur la qualité de l’eau, la lutte contre l’érosion, peut-être d’autres dossiers, aider les agriculteurs à adopter des pratiques favorables est un programme qui existe depuis longtemps et il y a d’énormes demandes du côté agricole.
En ce qui concerne l’alimentation de proximité, il y a eu sous Biden des programmes de soutien, « ce n’est pas énorme mais ça fait partie des objectifs de l’USDA jusqu’à présent ». Que deviendront-ils sous Trump ? Ce qui peut déplaire à son administration, « c’est l’étiquette un peu progressiste voire « woke » selon les appréciations. Ce n’est évidemment pas une priorité ».
À noter cependant que Robert Kennedy Jr, possible futur directeur de la Food and Drug Administration (FDA), qui « a des positions un peu bizarres, antivax notamment, et paraît un peu insaisissable », a « sur les OGM et les pesticides des points de vue assez radicaux, qui se rapprochent des Démocrates ».
Et « il pourrait incarner un courant de pensée plutôt favorable aux circuits alimentaires de proximité, mais cela reste à voir, et de toute façon il ne dirigera pas le département de l’Agriculture », précise Jean-Christophe Debar.
Quid du sujet de la concentration des marchés, axe fort de l’administration Biden et argument de campagne de Kamala Harris ? « Il y a eu une inflation de 20-25 % des prix alimentaires après le Covid, et l’argument démocrate était de dire que c’est notamment parce que les industries agroalimentaires et les gros distributeurs n’ont pas joué le jeu, se concentrent de plus en plus et réalisent des marges très élevées », explique-t-il.
Pour autant, « c’est un sujet très débattu chez les économistes, l’argument purement technique est quand même de dire que ça a été un facteur relativement secondaire, comparé à la désorganisation des chaînes d’approvisionnement due au Covid ».
Sous le mandat Biden, « le ministère de la Justice a de temps en temps mis un veto lorsqu’il y a eu des projets de concentration à grande échelle dans la distribution ou l’industrie, mais c’est difficile de tout arrêter ».
Autre action de l’administration Biden sur ce sujet : elle a versé « des subventions de plusieurs centaines de millions de dollars à des PME produisant des engrais et autres intrants, pour promouvoir la concurrence sur ces marchés très concentrés et alléger ces problématiques de concentration ».
Mais cette approche n’est « pas du tout trumpienne », note le spécialiste : « on peut s’attendre à un net ralentissement sur ce dossier, a priori. Mais ça reste de la politique, donc ça peut ponctuellement changer ».