Les études d’ingénieur aident-elles à se fixer des objectifs en tant qu’éleveur ?
TNC le 22/01/2025 à 10:06
Alex et Paul, élève et ancien élève à l'École supérieure des agricultures (Esa) d'Angers, mettent en avant, en vidéo, les atouts de la formation ingénieur pour devenir éleveur, notamment pour construire son projet d'installation, et se fixer des objectifs précis, technico-économiques mais aussi en termes de revenu et de temps de travail.
Quels sont les avantages de votre formation d’ingénieur pour s’installer en élevage ?
« En premier, le bagage technique solide, répond Paul Villerbu, diplômé en 2021 de l’École supérieure des agriculteurs (Esa) d’Angers. Il y a beaucoup d’enseignements zootechniques notamment. » Le jeune éleveur de 25 ans est installé depuis le 1er janvier 2024, en polycultures-bovins lait.
Il a rejoint le gaec familial (4 associés) aux côtés de ses parents et de l’un de ses frères, dans la région de Fougères (Ille-et-Vilaine), après une expérience professionnelle dans le conseil en élevage. « Au niveau technique, zootechnique, biologie cellulaire, les cours sont très poussés, confirme Alex Belloche, en 5e année en spécialité « productions animales ». On voit vraiment comment fonctionnent les animaux, les plantes. »
Paul prône surtout « l’ouverture d’esprit » que lui a donnée la formation ingénieur, grâce « aux nombreux stages dans différentes entreprises, dont certains à l’étranger », et aux échanges entre étudiants, « aux profils variés », au sein de grandes promos, sur diverses productions, systèmes, pratiques, visions de l’agriculture.
Ouverture d’esprit et vision à 360°.
« Comprendre le monde, le décrypter, appuie Alex. On prend conscience que les problématiques sont multiples, et les solutions jamais binaires, blanches ou noires, mais faites plutôt de nuances de gris » « Nous apprenons à réfléchir sur tous les sujets, aux conséquences de nos décisions qui ont un impact, en fait, dans plein de domaines. »
Le jeune homme de 22 ans apprécie cette « vision à 360° », tournée vers « les filières ». Avec ses cousins, il prévoit de reprendre l’exploitation familiale de polycultures-vaches laitières et allaitantes, disposant d’une unité de méthanisation.
En quoi vos études ont-elles influencé votre projet d’installation ?
« En école d’ingénieur, j’ai pu appréhender l’intérêt de s’investir en dehors de l’exploitation, pour défendre nos produits, dont nous sommes super fiers, nos filières, notre métier d’éleveur, souligne Alex. C’est pour cette raison que j’aimerais ne pas travailler à 100 % sur la ferme, pour pouvoir consacrer du temps et de l’énergie à cet engagement. »
Ne pas seulement produire, mais défendre nos filières, produits et métiers.
Il estime qu’en agriculture, comme dans d’autres secteurs, des progrès sont encore possibles, en matière de décarbonation, de biodiversité entre autres. Et il entend mobiliser, pour cela, « les compétences acquises ». D’ailleurs, les producteurs ont besoin de communiquer sur ce qu’ils font, sur les efforts réalisés, et l’école d’ingénieur forme très bien à cela, ajoute-t-il.
Même s’il « connaît bien » la structure dans laquelle il baigne depuis tout petit, Paul reconnaît que son cursus lui a permis de mieux cerner tous les aspects du système d’exploitation mis en place par ses parents. « Avant mon installation sur l’élevage, je savais qu’il me satisfaisait et que je n’envisagerais pas de changements radicaux. »
Cela vous a-t-il aidé à fixer vos objectifs ?
Tous deux en ont défini en termes de revenu et temps de travail. Paul aspire à se libérer un week-end sur deux, au moins le dimanche, pour des activités hors de la ferme. Côté rémunération, il escompte pouvoir vivre décemment, reconnaissant que la conjoncture laitière est relativement favorable depuis 3-4 ans.
On demande juste à vivre de notre métier,
et comme le reste de la société !
« À la différence des grands-parents et parents, les jeunes et futurs éleveurs ont envie de gagner de l’argent et d’avoir du temps libre, comme tout le monde », résume Alex. « On demande juste ça ! Alors on s’organise autrement pour y parvenir. »
Des points faibles ?
Là encore les deux jeunes sont unanimes : la partie gestion de l’entreprise et management ne va pas assez loin. « Alors qu’on aura à gérer une exploitation et sûrement des salariés », fait remarquer Alex. « On est sans doute moins armés sur ces sujets que des BTS Acse », juge Paul.