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Ensilage de maïs : le climat influe à 85 % sur le risque mycotoxine


TNC le 12/02/2025 à 05:19
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« Benjamin Collin, ingénieur régional Arvalis, rappelle qu’on peut limiter le risque de mycotoxines par de bonnes pratiques agronomiques : enfouissement des résidus de récolte, limitation de la pression en insectes foreurs, récolte avant la fin septembre et choix de variétés tolérantes ». (© TNC)

Ces toxines, produites par des champignons présents sur les cultures ou lors du stockage, ont des effets délétères sur la santé des animaux. Des mycotoxines peuvent contaminer les ensilages de maïs. Si le climat est un facteur déterminant pour leur apparition, de bonnes pratiques culturales aident à contenir le risque.

Entre les conditions humides et la récolte tardive, les ensilages de maïs 2024 se sont révélés plus contaminés en mycotoxines qu’habituellement, a constaté l’Observatoire des mycotoxines, qui réalise, depuis 2018, des analyses et cartographie les risques.

Les mycotoxines sont des toxines produites, au champ ou en silo, par certains champignons, comme les fusariums. Plus de 300 sont identifiées. Dans les ensilages de maïs, on trouve le plus souvent des DON et Nivalénol produit par les tricothécènes, de la Zearalénone, de la fumonisine.

De très petites quantités de ces toxines peuvent suffire à engendrer des problèmes de santé. Les ruminants sont moins perturbés que les porcs ou les volailles car leur flore ruminale arrive à dégrader ces molécules, ce qui les rend moins toxiques. « Mais cette capacité de détoxification est saturable et variable selon les individus, prévient Alix Pierron, maître de conférences en toxicologie à l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, le 4 février lors de la journée Mycotoxines ruminants. Un mélange de toxines peut induire un effet additif ou modifier la flore ruminale, ce qui rendra moins efficace cette détoxification ».

Malgré cette certaine résistance naturelle, les performances et la santé des bovins peuvent être altérées par les mycotoxines. « Les impacts très variables, remarque Alix Pierron. Les effets peuvent être différents selon les élevages, avec des symptômes non spécifiques, ce qui complique le diagnostic. En cas de suspicion, il faut analyser les différents aliments pour connaître les mycotoxines présentes et leur dose ». La présence de DON ou de Fumonisine entraîne généralement des baisses de production, des réponses immunitaires perturbées. La Zéaralénone cause des troubles de la reproduction. Le cumul de plusieurs mycotoxines augmente les risques de perturbations. Comme une production élevée, un fonctionnement ruminal pas optimal, par exemple en cas d’acidose, la période du peripartum.

Il n’y a pas de traitement face à une intoxication aux mycotoxines. La prise en charge va passer par l’élimination de l’aliment contaminé ou, a minima, une déconcentration de la ration en maïs et par l’ajout d’un capteur de mycotoxines.

Limiter les risques par l’agronomie

Le climat pèse pour 85 % dans le risque d’un contamination de son ensilage par des mycotoxines. Un climat chaud et humide favorise la croissance des champignons. « La hausse des températures pourrait favoriser les fumosines. A contrario, des étés secs pourraient limiter risque DON », anticipe Benjamin Collin, ingénieur régional Bretagne chez Arvalis. Le réchauffement climatique pourrait favoriser l’émergence de l’Aflatoxine, une mycotoxine de stockage très dangereuse, présente en Espagne et en Italie, qui arrive dans le sud de la France. Sa zone de présence pourrait s’agrandir avec la hausse des températures.

De bonnes pratiques agronomiques permettent de ne pas amplifier l’effet du climat et de contenir les risques. Il est possible de diminuer le potentiel infectieux en évitant la monoculture du maïs et par une bonne gestion des résidus, qui abritent des spores. « Les semis directs avec des résidus de maïs sont la situation la plus à risques, ne cache pas Benjamin Collin. Enfouir les résidus facilite la dégradation et la perte de viabilité des spores. Un labour diminue de 30 % le risque DON, de 70 % celui de Zéaralenone. Si on travaille sans labour, il faut au moins broyer finement les résidus ». Les trous faits par les insectes foreurs — pyrales, sésamies, héliothis — sont les portes d’entrée des champignons. Il faut donc être vigilant et agir en cas de présence d’insectes. La date de récolte joue aussi sur le risque de contamination. « Plus la récolte est tardive, plus il y a de risque de teneur élevée en mycotoxines, souligne Benjamin Collin. En adaptant la date de semis et la précocité variétale, il faut pouvoir ensiler au plus tard du fin septembre ». Dernier facteur de prévention, la tolérance variétale. Toutes les variétés n’ont pas le même comportement face aux champignons. Il faut donc privilégier les variétés les moins sensibles dans les parcelles à risques, en cas de précédent maïs par exemple. Enfin, de bonnes conditions de conservation (silo propre, mise en anaérobie rapide) aident à limiter la prolifération de champignons.