La méthanisation va prendre une taille industrielle, estime la Cour des Comptes
AFP le 06/03/2025 à 09:45
Le développement de la filière biogaz française, qui s'appuie surtout sur la méthanisation agricole, risque désormais de se faire au profit de structures plus industrielles en raison du mécanisme de soutien retenu pour ne pas peser sur les comptes publics, estime mercredi un rapport de la Cour des comptes.
« La production de biogaz permet de répondre à de multiples objectifs de politique publique : la décarbonation de la production d’énergie, la transition agroécologique et la résilience des exploitations agricoles, la gestion et le traitement des déchets », rappelle la Cour dans son rapport.
Ce biogaz, issu de la fermentation de matières organiques, la « méthanisation », fournit une énergie renouvelable utilisée pour produire de l’électricité ou de la chaleur, « par cogénération », ou injectée directement dans les réseaux de gaz après épuration sous forme de « biométhane ».
Des soutiens multiples ont permis l’émergence d’une filière en France, constituée désormais de plus d’un millier de méthaniseurs « essentiellement de nature agricole et de taille modeste », par laquelle la France « se singularise » des autres pays européens, où les installations sont de taille plus conséquente, comme au Danemark.
Or, la troisième Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) établies par les pouvoirs publics prévoient « un important développement de la production de biogaz », avec 50 TWh à l’horizon 2035 contre 12 en 2023, rappelle la Cour.
Une production essentiellement agricole actuellement
Pour atteindre cet objectif, l’État a prévu un soutien principalement via un mécanisme extrabudgétaire, les « certificats de production de biogaz », qui visent à faire contribuer les fournisseurs de gaz au développement de la filière et à « limiter » ainsi son impact sur les finances publiques. Les coûts liés à ces certificats « sont donc supportés in fine par les consommateurs finals de gaz et non par le budget de l’État », indique la Cour. Mais cela « favorise les installations de grande taille et le portage des projets par des industriels ou des énergéticiens ».
Cela « constitue une rupture avec le paysage de la filière française actuelle, essentiellement agricole, et dont l’organisation demande à être davantage structurée », souligne l’institution de la rue Cambon.
Fin 2023, la France comptait 1 911 méthaniseurs et la production d’électricité à partir de biogaz s’est élevée à 3 TWh en 2023, représentant 0,7 % de la consommation électrique française au cours de cette période, indique le rapport.
La production de biométhane injecté dans le réseau de gaz, s’est élevée à 9,1 TWh et a représenté 2,4% de la consommation française.
La Cour rappelle par ailleurs que la disponibilité de biomasse pour la méthanisation pourrait être insuffisante dès 2030, ce qui « est susceptible de susciter des conflits d’usages » entre le développement du biogaz, la production alimentaire ou entre certains biocarburants.