ZAN : nouvelle offensive du Sénat pour assouplir les contraintes
AFP le 12/03/2025 à 09:47
Faut-il assouplir les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols ? Le Sénat se penche mercredi sur un texte visant à revoir certains principes du « zéro artificialisation nette » (ZAN), régulièrement ciblé par la droite et dont la remise en cause inquiète la gauche et une partie de la macronie.
Les débats s’annoncent assez animés à la chambre haute sur l’un des chevaux de bataille de la majorité sénatoriale, une alliance entre Les Républicains et les centristes.
Ces derniers ne cessent de fustiger les contraintes pesant sur les élus locaux dans le cadre du ZAN, qui fixe un objectif très ambitieux depuis la loi Climat de 2021 : stopper l’étalement urbain d’ici 2050. À cette date, toute nouvelle surface urbanisée devra ainsi être compensée par la renaturation d’une surface équivalente.
« Une logique planificatrice et dirigiste des gouvernements successifs » qui crée de la « lassitude » chez les maires et qu’il faut « contrecarrer », s’alarme le sénateur LR Jean-Baptiste Blanc.
Avec le centriste Guislain Cambier, il réplique donc avec une proposition de loi pour proposer divers aménagements, après de premiers assouplissements déjà votés en 2023.
Supprimer l’objectif intermédiaire
La mesure phare du texte entend supprimer un objectif intermédiaire fixé à 2031, qui prévoit de diviser par deux le rythme d’artificialisation des terres au cours de la décennie 2021-2031 par rapport à la décennie précédente (2011-2021)…
Sans remettre en cause, néanmoins, l’échéance de 2050 et l’objectif du « zéro artificialisation nette ».
Pour lutter contre une loi jugée « descendante » et « désasphyxier » les collectivités, les sénateurs entendent aussi lever le caractère « prescriptif » des documents régionaux de planification en matière de sobriété foncière, au profit d’une « simple prise en compte » au niveau local.
Ils souhaitent également repousser les calendriers prévus par la loi pour intégrer ces objectifs de sobriété foncière dans les documents d’urbanisme.
Loi « Trace » après loi « ZAN »
Plus symbolique, le Sénat propose de supprimer l’appellation du ZAN au profit de l’acronyme « Trace », pour « Trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux ».
Autant d’aménagements qui inquiètent au plus haut point une partie de la gauche et notamment le groupe écologiste, qui a tenu mardi une conférence de presse pour dénoncer une « loi de détricotage complet du ZAN ».
« Nous dénonçons cette capitulation par rapport aux enjeux essentiels de sobriété foncière », a fustigé le sénateur de Paris Yannick Jadot. « Son collègue Ronan Dantec estime lui ce texte téléguidé par les ténors de la droite et notamment le chef de file des députés LR Laurent Wauquiez, qui avait envisagé l’année dernière de ne pas respecter les objectifs du ZAN dans la région Auvergne-Rhône-Alpes qu’il présidait alors.
Position ambigüe du gouvernement
La position du gouvernement reste encore ambigüe sur certaines mesures du texte. Si la procédure accélérée d’examen a été activée, signe d’une volonté de l’exécutif de voir le texte aboutir rapidement au Parlement, le ministre de l’aménagement du territoire François Rebsamen s’oppose à ce stade à la mesure phare du texte.
Il jugeait en effet « indispensable », ces derniers jours, de faire un point à « mi-étape » d’ici 2050, afin d’ « évaluer objectivement l’avancée pour identifier les écarts, rectifier la trajectoire ». Un amendement gouvernemental propose ainsi de rétablir l’objectif intermédiaire d’une artificialisation réduite de moitié, mais en le repoussant de trois années, à 2034.
L’initiative du Sénat va rapidement être éclairée par une mission parlementaire de l’Assemblée nationale, menée par la députée Renaissance Sandrine Le Feur et dont les conclusions, attendues fin mars, « s’opposeront à la proposition de loi du Sénat », selon l’entourage de la présidente de la commission développement durable de l’Assemblée.
« Il est temps d’accompagner réellement les collectivités, et non de détricoter nos objectifs », assure Mme Le Feur, pour qui le ZAN reste « un levier essentiel pour préserver la biodiversité et limiter les inondations ».