« Produire un maximum de lait, traire un minimum de vaches »


TNC le 17/04/2025 à 08:31
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Aujourd'hui à 10 555 l/VL/an, Thomas vise 14 000 l d'ici quelques années. (© Oulailux, Adobe Stock)

Tel est l’objectif de Thomas Guilbert, éleveur depuis 2014 dans la Somme. Produisant 10 500 l/vache/an, il vise d’ici quelques années 14 000 l. Pas le moindre « faux pas » possible alors concernant la reproduction. Les investissements sont également raisonnés : pas de « folklore » inutile, mais des outils de monitoring performants, ainsi qu’un bâtiment confortable, plutôt que des machines ou du foncier.

10 ans que Thomas Guilbert et sa femme Bénédicte sont installés à Fontaine-lès-Cappy dans la Somme, mais sur deux exploitations distinctes. Lui sur une structure d’une trentaine de vaches laitières et d’hectares de cultures (reprise hors cadre familial) ; elle sur une ferme équestre – élevage de poneys et pension de chevaux – et 18 ha de prés (création d’atelier).

Un couple, deux exploitations

Tous deux, du milieu agricole, ont été salariés neuf ans dans ce secteur d’activité, au Contrôle laitier pour Thomas et dans le journalisme pour Bénédicte. Depuis 2014, la SCEA des deux Vallées s’est bien développée : 90 VL produisent 950 000 l de lait sur une surface de 44 ha (20 ha de blé, 14 ha de betterave, 10 ha de maïs ensilage). L’Écurie de la Vallée des Frênes compte une centaine d’équidés sur 35 ha de prairies (15 ha réimplantés). Deux entités juridiques, mais les éleveurs travaillent ensemble.

Deux structures cohérentes et complémentaires.

« Dans cette zone du Santerre, où certaines parcelles sont malgré tout à faible potentiel, vallonnées et inondables, les deux exploitations s’avèrent à la fois cohérentes et complémentaires, fait remarquer le technicien d’Yséo qui suit les éleveurs, lors des Rallyes de l’ambition organisés en mars par l’union de coopératives et Novial SA, qui en fait partie, spécialisé dans l’alimentation animale. Les bovins valorisent notamment les terres peu productives de plusieurs voisins qui vendent leurs fourrages à l’élevage. »

Investir dans les bâtiments/salariés plus que dans du foncier

Aucune prairie dans la SAU de la SCEA des deux Vallées en effet : les bêtes sont donc en 100 % bâtiment. « Vu les prix du foncier dans la région, j’ai préféré investir, en 2017, dans une stabulation (libre paillée de 90 places) et dans le salariat agricole, pour le confort de travail en élevage, plutôt que dans la terre », explique Thomas Guilbert. « Même de petites structures peuvent accueillir un salarié, voire plus », souligne-t-il.

Travailler avec d’autres personnes nous tenait à cœur.

Pour preuve : ici, il y en a deux, un à 80 %, l’autre à mi-temps. « Le travail en équipe, les relations humaines, nous tiennent à cœur avec mon épouse, insiste le producteur qui entretient également des rapports de partage avec le voisinage, sur le plan agronomique entre autres : échanges paille/fumier, approvisionnement en fourrage (ensilage de maïs par exemple). « La qualité de vie est aussi essentielle à nos yeux », ajoute l’agriculteur.

Rien de superflu

« Sur la ferme, pas de folklore », poursuit-il. Autrement dit : pas d’investissement superflu avec une salle de traite d’occasion, des tracteurs à 10 000 h, etc. Alors « le projet bâtiment a été réfléchi pour être rentable – remboursement du prêt et revenu – et en cohérence avec la main-d’œuvre », appuie le conseiller d’Yséo. En 2016, une simulation de trésorerie avec matrice de gain a été réalisée en fonction de la production laitière et du prix du lait.

Sur la ferme, pas de folklore.

Résultat : un montant seuil à investir de 5 000 €/VL pour un prix du lait à 300 €/1 000 l. Ce type de calcul « rassure les banques », fait remarquer l’exploitant. « En 2016, le lait n’était pas bien payé, mais on y a cru », se souvient-il. Les 300 000 l de référence laitière, accordés à l’installation, ont apporté une garantie supplémentaire.

En 2016 : le prix du lait était bas, mais on y a cru !

Pas le droit à l’erreur sur la reproduction

Les outils de monotoring, eux, ont été renouvelés pour une gestion optimale de la reproduction du troupeau, de la fertilité en particulier. L’objectif du producteur est « de traire le moins de vaches possible et de livrer le maximum de lait ». « Aujourd’hui, je suis à 10 555 l/VL/an et je vise 14 000 l d’ici quelques années », détaille-t-il.

Ajoutant : c’est pourquoi « le système ne permet pas le moindre faux pas qui pourrait pénaliser les vêlages ». Les rations, à base de maïs, de pulpes surpressées (600 t/an via le contrat betterave avec la sucrerie), sont elles aussi optimisées. « Pour le maïs, en cas de printemps sec, c’est un peu tendu mais jusqu’à présent, j’y arrive. »

Chargement élevé : réduire l’empreinte carbone

Au vu du chargement, assez important, la SCEA des deux Vallées a effectué un diagnostic carbone pour mesurer son empreinte nette : celle-ci s’élevait 1,06 kg éq CO2/l de lait. Plusieurs leviers ont été identifiés pour réduire les émissions de CO2, sur différents aspects. Au niveau des cultures, l’exploitation implante des haies et des couverts végétaux.

En termes de ration, elle cherche à accroître la qualité des fourrages (UFL). Côté cheptel, il s’agit de maximiser la production laitière/vache, de maîtriser les mammites et les cellules, et d’améliorer la génétique. Enfin, concernant l’énergie et la gestion des effluents, l’installation d’un pré-refroidisseur et la production d’électricité devraient limiter les rejets. En 2024, des panneaux photovoltaïques ont été installés sur 1 400 m2 de toiture (220 kWc).