Irrigation et luzerne insuffisantes pour lutter contre les futures sécheresses
TNC le 21/01/2019 à 10:44
Climalait, un programme visant à évaluer l’impact du changement climatique sur les systèmes d’élevages laitiers dévoile ses premiers résultats. Dans ce cadre, les éleveurs de la région de la Saintonge ont réfléchi à différents leviers d'action, même si la région est déjà bien préparée à lutter contre les sécheresses estivales.
Le système de production choisi dans le cadre du programme Climalait(1) dans la région de la Saintonge, en Charente-Maritime, « était déjà bien préparé à surmonter une sécheresse estivale par l’utilisation de l’irrigation et de la luzerne », selon les résultats de l’étude. Et pourtant, lorsque la sécheresse estivale est longue, ce qui devrait arriver bien plus souvent à l’avenir, le système s’en retrouve fortement affecté. La ferme modèle étudiée comportait 170 ha de SAU dont 79 ha de SFP : 16,5 ha de maïs irrigué, 5,5 ha de luzerne, 14 ha de prairies temporaires de type dactyle-luzerne, 42,5 ha de prairies de graminées. Le troupeau était constitué de 80 vaches laitières à 8 500 kg de lait produits, avec un taux de renouvellement de 30 % et des vêlages étalés à 27 mois. Une trentaine de génisses était élevée chaque année.
Avec le changement climatique, les modèles ont mis en avant une évolution de la répartition de l’herbe disponible au cours de l’année, avec un démarrage en végétation de plus en plus précoce et un creux de production en été avec une reprise à l’automne. Les conditions climatiques prévues d’ici 30 ans sont favorables à la luzerne : les rendements cumulés augmentent, avec une nette avancée des dates de coupes. Les rendements en maïs sont globalement à la hausse, mais leur variabilité aussi, notamment sans irrigation ou en irrigation restreinte.
Des leviers d’adaptation ont été mis en avant par les éleveurs, dans le cadre de Climalait, comme l’allègement du chargement en été ou la modification du rationnement (céréales ensilées, paille et concentrés). Lorsque l’irrigation est impossible, l’idée est de miser sur les récoltes de printemps (méteils, cultures dérobées et prairies temporaires) pour constituer son stock de fourrages, et d’ajuster avec les récoltes d’été. La conduite du troupeau pourrait également être adaptée, en avançant les vêlages pour économiser du fourrage, et/ou en délégant l’élevage des génisses.
L’une des régions de France où « le changement climatique aura le moins d’impact »
« Dans le cadre des 30 régions étudiées dans le programme Climalait, la Saintonge est l’une des régions de France sur laquelle le changement climatique aura le moins d’impact, selon Sylvain Chevallier de l’EARL les douces en Poitou-Charentes. Climalait nous a permis de voir les évolutions possibles du climat et ses impacts sur le plan agricole. Cela nous a plutôt rassurés ! À court terme, nous ne sommes pas inquiets mais à long terme, il faudra inévitablement évoluer. Le problème résidera principalement dans la gestion de l’eau, comme l’été dernier, avec des conflits d’usage possibles entre agriculture et tourisme dans la région. Il s’agira de stocker l’eau l’hiver notamment. Il nous faudra aussi réfléchir à se passer de maïs fourrage, et peut-être faire évoluer le cadre de l’AOP. De même, si les animaux pourront être mis à l’herbe plus tôt du fait de la pousse de l’herbe, la question de la portance des sols sera cruciale, soit pour utiliser du matériel de récolte, soit pour faire pâturer le cheptel. Quant à la luzerne, pourquoi pas ! Mais il faudra, là encore, de l’eau au bon moment. »
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