La nouvelle mouture du plan loup ne fait pas l’unanimité
AFP le 29/05/2019 à 10:02
Face à l'expansion du loup en France, l'Etat prévoit de faciliter les tirs, d'augmenter le nombre d'animaux pouvant être tués et de renforcer la protection des troupeaux, des mesures qui ne satisfont ni les éleveurs, ni les défenseurs de cet animal protégé.
Le préfet d’Auvergne-Rhône-Alpes, en charge du dossier loup, a présenté ces mesures mardi lors d’une réunion à Lyon. Tous attendaient de connaître le nombre exact de loups adultes à la sortie de l’hiver, mais il faudra encore patienter jusqu’en juin. Seule certitude, le seuil de 500 adultes prévu par le plan loup en 2023, qui correspond au seuil de « viabilité démographique », semble déjà avoir été atteint. Résultat, le gouvernement doit revoir sa copie.
L’expansion du « Canis lupus » classé vulnérable sur la liste rouge française de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), est plus rapide que prévue. Sa population a progressé d’environ 20 % en 2018, alors que le niveau de tirs s’est élevé à plus de 12 %, selon l’ONCFS.
Ces carnivores, éradiqués dans les années 1930 et revenus naturellement par l’Italie dans les années 1990, se concentrent dans les Alpes, le Sud-Est et l’Est. En 2018, 3 674 attaques ont eu lieu contre plus de 12 500 animaux, principalement des ovins. Ces attaques se concentrent sur les Alpes-Maritimes, les Alpes-de-Haute-Provence et la Savoie. L’été, des centaines de milliers de bêtes vont dans les alpages.
La mesure la plus symbolique est le relèvement du pourcentage de loups pouvant être tués, de 10-12 % à 17-19 %, comme annoncé en mars par Emmanuel Macron.
Un projet d’arrêté prévoit aussi de revoir les conditions dérogatoires permettant d’effaroucher ou de tuer des loups, même si l’espèce est protégée au niveau français et européen.
L’Etat finance actuellement des dispositifs de protection dans les zones de prédation (parcs électrifiés, chiens, gardiennage par des bergers). Il existe deux types de zones en fonction de la fréquence des attaques. Il est prévu d’en ajouter une troisième, un « cercle 0 » pour les communes où 15 attaques ou plus ont eu lieu en moyenne sur 2016-2018.
Dans ces foyers de prédation, les mesures de protection seront renforcées pour permettre un gardiennage 24 h/24 des troupeaux par des bergers.
Des tirs facilités
Les conditions dans lesquelles sont effectuées les tirs dans certaines zones sont facilitées, pour les rendre plus efficaces et des tirs pourront avoir lieu dès le 1er juillet, contre septembre auparavant.
« Les montants d’indemnisation pour les animaux d’élevage attaqués par le loup seront revalorisés », ajoutent les ministères de la transition écologique et de l’agriculture.
Dans les zones de colonisation, les éleveurs auront une aide financière pour se doter de chiens de berger. Les démarches administratives pour le financement de mesures de protection et les indemnisations en cas d’attaques seront simplifiées.
En Aveyron, Tarn, Hérault et Lozère, où est produite le Roquefort, une « zone difficilement protégeable » a été définie. Les procédures d’autorisation de tirs y sont simplifiées, même en l’absence de mesures de protection des troupeaux, une « gestion différenciée » que la Fédération nationale ovine (FNO) rejette.
Pour la FNO, la FNSEA ou encore la Fédération nationale bovine (FNB), « le compte n’y est toujours pas », selon un communiqué commun. Ils réclament la suppression du plafond de prélèvement, la possibilité pour les éleveurs de tirer « sans conditions », ainsi que « le prélèvement de meutes entières », pour aboutir à « zéro attaque ».
Pour les associations environnementalistes, multiplier les tirs n’est pas la bonne solution.
« Tout ce qui concerne la protection des troupeaux n’avance pas », déplore Bertrand Sicard de l’association de protection des grands prédateurs Ferus. Il demande une évaluation de l’efficacité des tirs, pour savoir s’ils peuvent perturber la structure sociale des loups en meute et leur stratégie de chasse.
« On rentre dans un processus de régulation de l’espèce », dénonce Marie-Paule Thiersant, de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), associée en tant qu’ONG aux consultations, à ses yeux incompatible avec le statut d’espèce protégée.