Une culture pérenne, productive et écologique
Alain JEANROY, membre de l'Académie d'Agriculture de France le 07/06/2022 à 16:44
"Miscanthus" est un genre qui regroupe plusieurs espèces de plantes herbacées vivaces de la famille des poacées, originaires d'Asie et d'Afrique ; elles sont souvent utilisées comme plantes ornementales. Les principales espèces sont le "Miscanthus giganteus", le "Miscanthus sinensis", le "Miscanthus sacchariflorus" et le "Miscanthus floridus". En France, la seule espèce cultivée est le "Miscanthus giganteus". C'est celle-ci est abordée dans la présente fiche de l'Académie d'agriculture de France.
Caractéristiques
Le Miscanthus giganteus est parfois désigné à tort « roseau de Chine », terme qui se réfère à l’espèce Miscanthus sinensis, ou « herbe à éléphant » et désigne en réalité la plante appelée « herbe de Napier ».
Une plante non invasive
Le Miscanthus giganteus est un hybride originaire d’Asie du Sud-Est, qui a résulté d’un croisement naturel entre un Miscanthus sinensis (diploïde) et un Miscanthus sacchariflorus (tétraploïde). C’est un triploïde stérile. […]
Une plante très productive
Le Miscanthus giganteus est une plante avec un métabolisme photosynthétique de type C4, ce qui contribue à sa bonne productivité.
Sa culture s’est développée en France et en Europe dans un but de production de biomasse ; initialement, ce fut pour le secteur biocombustible, mais aujourd’hui son utilisation s’étend à la litière animale, au paillage horticole et de vignes, et à la rumination bovine. […]
La plante peut atteindre 4 mètres de haut en fin de cycle, et ses rendements sont généralement compris entre 10 et 20 tonnes de matières sèche par hectare, selon les contextes pédoclimatiques ; en France, la moyenne est de 13 à 14 tonnes de matières sèche par hectare.
Historique
En Europe, le Miscanthus giganteus a d’abord été introduit au Danemark dans les années 1935, par Aksel Olsen, qui ramena ce génotype du Japon après une expédition dans l’archipel asiatique.
Le constat de rendements importants a conduit les chercheurs à s’intéresser à cette espèce : les premiers programmes de développement ont vu le jour dans les années 1990, notamment dans le Nord de l’Europe, et particulièrement au Royaume-Uni.
En France, l’introduction du miscanthus dans le paysage agricole date du début des années 2000. Avec la réforme du Règlement sucre de 2006, certains agriculteurs abandonnaient la betterave ; un Plan de Restructuration Nationale (PRN) doté de fonds les a encouragés à diversifier les cultures de leur assolement avec de nouvelles productions comme le miscanthus. […]
Production dans le monde
Il n’existe pas de réelles statistiques sur la production de Miscanthus giganteus dans le monde, ni en Europe.
En Europe, les cultures de Miscanthus giganteus se sont développées dans un premier temps surtout en Angleterre, en Suisse et en Allemagne. En Angleterre, le développement a été particulièrement rapide, car encouragé par le gouvernement, notamment dans le cadre de l’Energy Crops Scheme visant à répondre à un besoin d’approvisionnement en biomasse des centrales électriques ; en 2010, ce pays comptait déjà environ 17 000 hectares de miscanthus, quand on dénombrait 15 000 hectares en Allemagne, 2 000 hectares en France et 500 hectares en Suisse.
Sélection variétale et production de rhizomes
En France, le Miscanthus giganteus est cultivé sous la forme d’un seul clone. De manière générale, les cultures pérennes à vocation production de biomasse – notamment celles possédant un métabolisme de type C4 – ont fait l’objet de peu de travaux de sélection variétale. De plus, son caractère stérile constitue un frein à la sélection variétale. […]
Des programmes de recherche s’intéressent actuellement au développement de nouvelles techniques qui pourraient faciliter l’amélioration et la sélection variétale du miscanthus.
Les techniques culturales
La préparation du sol est assez similaire à celle effectuée pour la culture de la pomme de terre : le sol doit être ameubli sur 15 centimètres, et travaillé finement pour favoriser le contact entre le sol et le rhizome.
Les rhizomes sont implantés au printemps à une dizaine de centimètres de profondeur, avec une planteuse adaptée et une densité de semis de 18 000 à 20 000 pieds par hectare. La levée du miscanthus est assez longue et hétérogène : elle peut s’étaler entre 3 semaines et 3 mois après la plantation. […]
Les particularités de la récolte
Les débouchés actuels utilisent le miscanthus récolté « en sec ». La récolte a lieu tous les ans au printemps dès la deuxième année, à partir de mars/avril, lorsque le taux d’humidité des cannes est inférieur à 17 %. Le plus souvent, elle est réalisée avec une ensileuse équipée de becs spéciaux, type bec Kemper. Une fois récolté, le miscanthus ne nécessite pas de séchage ; c’est un produit stockable sous hangar. […]
Transformation industrielle
La récolte en vrac est plutôt adaptée aux filières courtes comme le paillage et la litière animale : en effet, la faible densité du produit entraîne des coûts de transport assez importants.
Suivant les débouchés souhaités, et pour l’optimisation du transport, le miscanthus peut aussi être conditionné en ballots compressés de 15 à 20 kilogrammes. La récolte est en général dépoussiérée et calibrée en fonction de la taille des brins, avant d’être compressée.
Les utilisations
En France, il existe actuellement quatre débouchés principaux pour la paille de miscanthus :
- Litière animale : avec près de 50 % de la production qui lui est dédiée, la litière animale est le principal débouché du miscanthus, sous la forme de copeaux de 1 à 5 centimètres. Ses avantages sont son pouvoir absorbant élevé (jusqu’à trois fois son poids), sa capacité à sécher une fois remué, et sa longévité sans paillage supplémentaire. […]
- Combustion : débouché originel du miscanthus, la combustion ne représente plus que 30 % des débouchés. Le miscanthus possède un Pouvoir Calorifique Inférieur (PCI) élevé de 4,9 mégawatts par tonne de matière sèche, comparable à celui du bois ; il est estimé qu’un hectare de miscanthus équivaut à 5 000 à 7 500 litres de fioul. […]
- Paillage horticole : le paillage horticole représente environ 20 % des débouchés du miscanthus. C’est une solution écologique pour lutter contre les adventices, notamment avec la mise en place de la loi ZéroPhyto dans les villes. Il permet aussi de limiter l’évapotranspiration, et protège contre le gel ; de plus, son pH étant neutre, il ne provoque pas d’acidification des sols. Le miscanthus commence aussi à être de plus en plus utilisé en paillage viticole.
- Alimentation animale : le miscanthus est incorporé dans la ration alimentaire des ruminants, ce qui permet d’améliorer la rumination et de diminuer les risques d’acidose. Cette utilisation représente environ 4 % de la production.
Les services écologiques
Le miscanthus est une plante qui possède de nombreux atouts environnementaux. Mis à part un désherbage (qui peut être mécanique) lors de l’implantation en première année, c’est une culture qui ne nécessite aucun entretien, engrais, ni produits phytosanitaires. […]
Fort de ces atouts, le miscanthus est fréquemment implanté en vue de services écologiques : protection de la ressource en eau sur les aires d’alimentation et de captage, mise en place de bandes lignocellulosiques pour lutter contre l’érosion et favoriser la biodiversité.
Organisation professionnelle
L’association France Miscanthus regroupe les principaux acteurs de la filière en France. Elle participe à la promotion et à la représentation des producteurs de miscanthus auprès des administrations à Paris et Bruxelles.
Le miscanthus fait l’objet de projets de recherche et développement auprès de plusieurs organismes privés et publics.
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