Trump et Juncker désamorcent la crise entre Washington et Bruxelles
AFP le 26/07/2018 à 09:08
Donald Trump et le chef de l'exécutif européen Jean-Claude Juncker ont désamorcé mercredi la crise née des tarifs douaniers imposés par les États-Unis, annonçant une série de décisions dans l'agriculture, l'industrie et l'énergie dont la portée exacte reste cependant à confirmer.
Selon une source européenne, aucun nouveau tarif douanier ne sera imposé sur les importations de voitures européennes aux États-Unis, un dossier particulièrement sensible pour l’Allemagne. Parlant d’un « grand jour » pour le libre-échange, le président américain a évoqué, depuis les jardins de la Maison Blanche, une « nouvelle phase » dans les relations entre Washington et Bruxelles après des mois de mises en garde et de menaces des deux côtés de l’Atlantique. Mettant en avant leur volonté commune d’aller, à terme, vers la suppression totale des tarifs douaniers dans leurs échanges industriels, exception faite du secteur automobile, il a assuré que l’Union européenne allait commencer « presque immédiatement » à acheter « beaucoup de soja » aux producteurs américains. Il a par ailleurs promis de revoir la question des tarifs douaniers américains sur l’acier et l’aluminium européen, qui avait mis le feu aux poudres.
Le ministre allemand de l’économie, Peter Altmaier, a immédiatement salué sur Twitter cette « percée » qui « peut éviter une guerre commerciale et sauver des millions d’emplois ». « L’économie mondiale tire avantage lorsque les pays s’engagent de manière constructive à résoudre leurs désaccords commerciaux sans avoir recours à des mesures exceptionnelles », a pour sa part réagi Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) qui met en garde depuis des mois contre le protectionnisme, qui peut faire dérailler la croissance mondiale. « Nous sommes parvenus à un accord aujourd’hui », a de son côté assuré jean-Claude Juncker, qui a souligné la volonté de l’UE d’augmenter ses importations de gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance des États-Unis afin de diversifier ses approvisionnements en énergie. Un peu plus tôt, au début du tête-à-tête dans le Bureau ovale, il avait insisté sur le fait que les États-Unis et l’UE, qui représentent la moitié du commerce mondial, étaient des « partenaires proches », des « alliés », pas des « ennemis ». Dans la soirée, Donald Trump a publié sur Twitter une photo des deux hommes s’embrassant, assurant que « de toute évidence », l’UE et les États-Unis « s’aiment ».
Qualifié par le passé par le président américain d’homme « très intelligent » mais aussi « très dur », le dirigeant européen a évoqué mercredi « un renforcement de la coopération sur l’énergie ». Quelques heures plus tôt, depuis Johannesburg, en Afrique du Sud, le président chinois Xi Jinping lançait une mise en garde à son homologue américain, soulignant que personne ne sortirait « vainqueur » d’une guerre commerciale.
Preuve des turbulences liées au bras de fer engagé par le président américain: son administration a annoncé mardi une aide d’urgence de 12 milliards de dollars destinée aux agriculteurs touchés par les représailles aux tarifs douaniers décrétés par Washington visant la Chine, l’Union européenne ou encore le Canada.
Le milliardaire républicain a par ailleurs annoncé que les États-Unis et l’Union européenne allaient travailler de concert afin de réformer l’Organisation mondiale du commerce (OMC), évoquant en particulier, la Chine dans le viseur, le vol de propriété intellectuelle et le transfert forcé de technologies. « Nous allons travailler étroitement ensemble avec des partenaires partageant nos idées pour réformer l’OMC et s’attaquer au problème de pratiques commerciales déloyales incluant le vol de la propriété intellectuelle, le transfert forcé de technologies, les subventions industrielles, les distorsions créées par les entreprises d’État et la surcapacité », a déclaré le président américain.
À la veille de la rencontre, le locataire de la Maison Blanche avait une nouvelle fois dénoncé l’attitude de l’Europe à laquelle il réserve depuis plusieurs mois ses flèches les plus acérées. Se réjouissant, sur le ton volontiers provocateur qu’il affectionne, que les pays visés par les tarifs douaniers « viennent tous à Washington pour négocier », Donald Trump martèle que sa stratégie finira pas porter ses fruits et que « le résultat final en vaudra la peine ». Mais l’approche est loin de faire l’unanimité dans le camp républicain, traditionnellement favorable au libre-échange. « Je ne pense pas que les tarifs douaniers soient la bonne réponse », avait lâché mardi le chef des républicains à la Chambre des représentants, Paul Ryan. Ce dernier est originaire du Wisconsin, État qui abrite le siège de Harley-Davidson. Le célèbre constructeur de motos a averti sans détour que la guerre commerciale entre les Etats-Unis et ses partenaires allait rogner ses marges en 2018. Comme lui, nombre d’élus du « Grand Old Party » s’inquiètent de l’impact possible de la croisade présidentielle sur les élections de mi-mandat prévues en novembre.