Dans les Yvelines, Marc Fesneau vient constater les dégâts sur les céréales
TNC le 10/06/2022 à 09:58
Suite aux orages qui ont causé d’importants dégâts dans les exploitations agricoles partout en France, le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire se rend sur le terrain pour constater les pertes et évoquer des solutions pour les agriculteurs touchés. Après s’être rendu dans en Gironde et dans le Gers, Marc Fesneau est venu le 9 juin sur une exploitation céréalière des Yvelines, dans une zone où certains producteurs ont perdu jusqu’à la totalité de leurs cultures.
« Un parpaing de 4 km de long qui se serait écrasé sur les cultures », c’est l’image qu’évoque Nicolas, agriculteur dans les Yvelines, pour évoquer les dégâts provoqués par la grêle le week-end dernier. Pour l’homme qui a repris l’exploitation familiale en 2016, ce devait être « la moisson du siècle », mais les 40 centimètres d’eau et les 15 centimètres de grêle qui se sont abattus sur ses champs samedi ont anéanti quasiment toutes ses cultures. À la frontière de l’Eure-et-Loir, cette zone céréalière est en quelque sorte « l’épicentre » de l’orage, et les pertes sont considérables de part et d’autre de la N10. Après la grêle, 130 mm d’eau y sont tombés en une heure. Une trentaine d’exploitants ont été touchés à des degrés divers, sur environ 5 000 hectares, estime Christophe Hillairet, président de la Chambre d’agriculture d’Ile-de-France.
A Prunay-en-Yvelines, où Dominique Poyau cultive du blé, de l’orge, du colza et du pois sur 110 ha, entre 80 % et 100 % des cultures ont été ravagées. C’est sur son exploitation que le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, s’est rendu ce 9 juin, pour constater les dégâts sur les céréales, entendre les témoignages d’agriculteurs et apporter son soutien.
Quelles mesures d’urgence ?
Au-delà des mesures classiques mobilisées en cas de crise, et qui ont déjà été annoncées, comme l’allègement des charges sociales, la défiscalisation sur la taxe sur le foncier non bâti, le ministre a évoqué plusieurs leviers pour accompagner les agriculteurs touchés. La première, demandée par la profession agricole, est l’élargissement du champ des calamités agricoles pour que les céréaliers puissent y être éligibles. Cependant, « l’outil n’est pas assez souple pour répondre à l’urgence », estime Marc Fesneau qui ne parait pas favoriser cette hypothèse pour le moment, d’autant que la mesure doit se négocier à Bruxelles.
Autre piste, faire jouer la solidarité, nationale, mais également entre agriculteurs et au sein de « l’écosystème agricole », pour permettre aux contrats passés par les agriculteurs impactés auprès d’organismes stockeurs, d’être honorés, indique le ministre. Interpellé par les agriculteurs sur ce sujet, Marc Fesneau a promis d’échanger avec les coopératives sur la question.
Enfin, pour les parcelles qui pourraient être sauvées, des dérogations pour les traitements pourront être accordées, précise-t-il également.
Une assurance aujourd’hui défaillante
Si aucune solution ne parait satisfaisante aujourd’hui, c’est aussi parce que les agriculteurs restent en attente de la réforme de l’assurance récolte, votée en février, mais dont la mise en œuvre n’est prévue qu’en janvier 2023.
Et cette année, alors que les cours des céréales ont flambé, les assureurs n’ont, aux dires des agriculteurs, pas joué le jeu en matière de réévaluation des montants. Ainsi, Germain Gentil, agriculteur dans la zone touchée, a demandé à son assurance s’il était possible de faire une augmentation de capital, mais a obtenu une réponse négative. « Alors qu’en fait, ils avaient envoyé un mail mi-mai nous expliquant que l’on avait 10 jours pour réévaluer », explique-t-il, dénonçant une communication « très confidentielle » de cette information. La plupart des céréaliers victimes de la grêle ont donc du blé assuré à 180-200 € la tonne, deux fois moins que leur valeur actuelle.
Au 9 juin, Groupama recensait de son côté plus de 2 700 déclarations de sinistres, pour un coût estimé d’au moins 16,6 millions d’euros brut. Les pertes sont parfois totales sur les cultures d’hiver (colza, blés, orges), et les cultures de printemps et d’été (maïs, productions de semences, tournesol).
Le nouveau dispositif d’assurance récolte devrait instaurer un système d’indexation obligatoire, à la hausse comme à la baisse, pour que les assureurs ajustent la valeur des capitaux, suggère Christophe Hillairet. Pour le président de la chambre d’agriculture d’Ile-de-France, « c’est une situation exceptionnelle aujourd’hui, car nous sommes entre deux systèmes d’assurance, souligne Christophe Hillairet, mais si le prochain dispositif d’assurance tient la route, les agriculteurs rentreront dedans ».
Lever le plafond des de minimis ?
En attendant, les solutions restent limitées, d’autant plus que si les collectivités locales se montrent à l’écoute des agriculteurs, et seraient prêtes à accompagner financièrement les producteurs impactés par les intempéries, ces aides entreraient dans le cadre des aides de minimis, dont le plafond est de 20 000 euros sur trois années glissantes.
Or, avec les crises qui se succèdent, il devient fréquent d’être victime d’aléas plusieurs fois en trois ans, comme en témoigne Constant Thirouin, agriculteur à Saint-Martin-de-Bréthencourt. Producteur de betteraves, il a déjà touché 20 000 euros d’aides (pour 74 000 euros de pertes) en 2020, et ne peut plus être indemnisé en 2022. La question de l’élévation du plafond, comme cela avait été le cas temporairement pendant la crise sanitaire, doit être évoquée à Bruxelles, rappelle Marc Fesneau, qui pourra en discuter lors du prochain conseil européen, d’autres pays étant concernés. En France, une soixantaine de départements ont été touchés par les intempéries du week-end dernier.