Océalia et ses adhérents tracent leur « Sillon Responsable »
TNC le 08/12/2023 à 18:10
Sous la bannière « Le Sillon Responsable », la coopérative Océalia regroupe tout ce qu’elle et ses adhérents mettent en œuvre pour aller vers une agriculture plus durable. Diagnostic, plan d’action, certification, valorisation économique et reconnaissance... l’objectif derrière : accélérer la transition agro-écologique, en emmenant un maximum d’agriculteurs dans la démarche.
« Face aux enjeux de sécurité alimentaire, le besoin de production agricole est remis au premier plan, mais l’agriculture a, en parallèle, des défis considérables à relever au niveau environnemental, climatique et social. L’accélération de la transformation de notre modèle agricole est indispensable. »
C’est fort de ce constat qu’Océalia a lancé il y a un peu plus de deux ans sa démarche « Le Sillon Responsable » pour porter cette transition. Engagée sur le sujet, la coopérative de Nouvelle-Aquitaine comptait déjà 17 groupes de progrès regroupant environ 300 agriculteurs.
Un référentiel commun pour toutes les filières
« C’est la suite et le début de la démarche, précise Philippe Merle, directeur du pôle agriculture chez Océalia. L’idée est de créer un cadre pour emmener un maximum d’adhérents dans la transition agro-écologique. » La coopérative vise, en effet, 70 % des surfaces couvertes engagées dans le Sillon Responsable d’ici 2025.
« Notre démarche n’est pas basée sur un cahier des charges spécifique pour une culture donnée, elle s’appuie sur un référentiel adapté à toutes les filières (grandes cultures, élevage, viticulture…) et concerne l’exploitation tout entière. » « Le référentiel regroupe plus de 100 pratiques réparties sous 8 catégories : fertilité du sol, protection des cultures, bien-être animal, social et sociétal, fertilisation des cultures, alimentation animale, gestion de l’eau et biodiversité.
Exemples de pratiques présentes dans le référentiel:
Autour de la fertilité du sol :
- Optimiser les pratiques liées aux couverts végétaux ;
- Introduire des cultures fixatrices d’azote ;
- Maximiser la restitution des résidus de cultures pour améliorer les taux de matière organique ;
- Simplifier le travail du sol sur l’exploitation.
Autour de la biodiversité :
- Favoriser la diversité d’espèces cultivées ;
- Optimiser le développement des infrastructures agroécologiques (IAE) sur l’exploitation ;
- Entretenir et développer la présence de haies sur l’exploitation ;
- Entretenir et préserver la présence de prairies sur l’exploitation.
« Le point de départ, c’est le diagnostic réalisé avec le conseiller d’exploitation, sur un outil dédié. Il permet de se situer par rapport à ce référentiel avec un système de notation : niveau 1 pour un système en transition et niveau 2 pour des systèmes déjà bien avancés ». « Même si on n’atteint pas le niveau 1, on peut adhérer au Sillon Responsable : c’est une démarche d’amélioration continue, soutient Philippe Merle. On ne veut laisser personne au bord de la route. Dès qu’un agriculteur s’engage, il signe un plan d’action ».
« Un plan d’action mis au point en fonction de ses résultats et des échanges avec son conseiller, individualisé à l’exploitation », précise Thomas Perrier, coordinateur filières et transition agroécologique. Et à l’image d’un audit, le diagnostic est à renouveler chaque année pour observer la progression.
Les premiers retours
« Notre référentiel est une co-construction entre la coopérative et ses adhérents, et voué à évoluer dans le temps, ajoute Thomas Perrier. On a cherché à avoir un socle commun qui puisse trouver de l’adéquation dans les différents cahiers des charges existants. »
Car au-delà de l’accompagnement technique et des formations proposées (environ 3 par an), la coopérative travaille également à une valorisation économique des efforts engagés. Les premières primes de marché obtenues à ce jour sont de l’ordre de 2 à 15 à €/t sur certains contrats. Pour le tournesol par exemple, une prime de 8 €/t est versée à tous les agriculteurs ayant atteint les niveaux 1 et 2 du Sillon Responsable ».
La rentabilité des exploitations représente un point majeur de la démarche. « Toutes les actions mises en place doivent rapporter plus que ce qu’elles coûtent, note Philippe Merle. Après dans une démarche agronomique, cela peut prendre du temps. La restauration de la fertilité des sols, par exemple, n’est pas forcément palpable les premières années. C’est un investissement pour demain. »
La coopérative s’emploie aussi à faire certifier Le Sillon Responsable, normalement d’ici juin prochain, pour qu’il soit reconnu par toutes les parties prenantes.
250 adhérents engagés
Sur la campagne 2022-23, Océalia compte 250 adhérents qui se sont lancés dans la démarche. Parmi eux, Benoît Barusseau, installé sur une exploitation céréalière depuis 24 ans dans le sud de la Vienne, a franchi le pas « pour aller vers une agriculture plus durable ». Il se dit « fier d’avoir une coopérative qui s’engage ». Après diagnostic, l’agriculteur peut prétendre aujourd’hui au niveau 1 de la démarche. « J’ai déjà entamé, depuis 2011, un travail sur la réduction des produits phytosanitaires avec mon groupe Ecophyto, témoigne-t-il. L’objectif était de réduire de 20 % le recours à ces produits : un seuil désormais atteint, avec des cultures plus résilientes. »
Il y a 2 ans, Benoît Barusseau est également rentré dans un programme carbone, avec Soil Capital. « Cela permet de se remettre en question sur plein de choses. Aujourd’hui, l’une de mes priorités, c’est d’avoir un maximum de sols couverts », précise l’agriculteur investi dans une démarche de conservation des sols depuis 2 ans. Il attache une grande importance aux moments de formation collective, « on rencontre des gens qui sont plus avancés dans ces différentes techniques et cela permet de partager nos expériences ».
Un outil de communication positive
Même ressenti pour William Dahai, installé en polyculture-élevage laitier dans les Deux-Sèvres, qui a suivi de nombreuses formations au fil des années pour réduire le recours aux phytos et le travail du sol. « Limiter la protection phytosanitaire des cultures, ça passe par plus d’observation, l’usage de plantes compagnes dans le colza ou de biocontrôle, etc. » En TCS depuis une vingtaine d’années, l’agriculteur s’attache aussi à limiter les passages et à éviter d’avoir un sol nu même en interculture courte. »
« Le Sillon Responsable s’inscrit dans la continuité pour essayer de valoriser tout ce qui a été mis en place sur l’exploitation », commente ainsi William Dahai, dont la ferme est déjà certifiée Haute valeur environnementale. « Cela va dans le bon sens d’un point de vue agronomique et c’est aussi un outil de communication positive, pour faire connaître nos bonnes pratiques aux consommateurs. Il y a souvent un souci de méconnaissance du grand public concernant notre profession. Communiquer est un pan du métier d’agriculteur, qui a été trop souvent oublié : on a tout à y gagner. »