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Oléoprotéagineux : « corriger les distorsions pour gagner en compétitivité »


TNC le 13/12/2024 à 14:30
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(© gozzoli, AdobeStock)

Benjamin Lammert, président de la Fop et de Terres Univia, revient sur une année 2024 mitigée pour les cultures oléoprotéagineuses, plaide pour un meilleur accès aux moyens de production, souligne les ambitions de la filière en termes de souveraineté alimentaire, dénonce les importations frauduleuses d’huiles usagées sur le marché européen des biocarburants et s’inquiète des impacts de l’entrée de l’Ukraine dans l’UE.

Croisé à l’occasion des rencontres Oléopro, le 11 décembre à Montrouge (92), Benjamin Lammert, président de la Fop et de Terres Univia, revient sur le bilan contrasté de l’année 2024 pour les filières oléagineuses et protéagineuses.

Quand certaines cultures ont tiré leur épingle du jeu aussi bien en termes de rendements que de prix – colza, pois de printemps, féverole, soja -, il rappelle que « le pois d’hiver a connu une année catastrophique » avec parfois « des rendements divisés par deux » et que la récolte de tournesol a été compliquée, « avec des gros sujets liés à la date de récolte, au délai de récolte, au séchage, et à la qualité ».

Côté perspectives, « l’objectif est de continuer à travailler sur la souveraineté en protéines et en énergie ». D’ici à 2030, la filière entend maintenir 2 millions d’hectares de colza et de tournesol et vise 1 million d’hectares de protéagineux et légumineuses, contre 500 000 aujourd’hui.

D’ailleurs, « un programme très ambitieux sur la sélection génétique du pois vient d’être lancé, pour 50 millions d’euros », pour trouver des variétés qui résistent mieux au changement climatique et aux attaques de champignons, notamment.

Pour accroître la souveraineté alimentaire et le développement des filières locales, la filière mise sur l’accès aux moyens de productions : semences, solutions techniques (variétés végétales tolérantes à des herbicides, nouvelles techniques de sélection), accès aux phytos.

Là-dessus, « il y a trop de distorsions de concurrence entre la France et d’autres pays européens sur les produits autorisés, […] il est nécessaire de corriger ces écarts et distorsions pour gagner en compétitivité sur nos productions », estime Benjamin Lammert.

Qui pointe un « problème majeur » sur les débouchés : alors que « la filière biodiesel est plutôt stabilisée dans ses débouchés, capable de fournir des marchés bien identifiés », la fraude sur les huiles usagées importées de Chine « détruit le marché des biocarburants en France et en Europe », si bien que l’élu appelle à la mise en place urgente de contrôles.

De fait, l’entrée massive en Europe de biocarburants à base d’huile de friture usagée venus de Chine et d’Asie du Sud-est pourrait cacher un important trafic d’huile de palme, alors que la Commission entend justement réduire drastiquement l’utilisation de biodiesel à base d’huile de palme.

« C’est vital pour la filière de supprimer ce flux de matière frauduleuse, qui est de l’huile de palme native déforestante et qui génère énormément d’émissions, pour pouvoir préserver nos filières qui sont vertueuses et qui sont une contribution positive de l‘agriculture à la décarbonation », reprend Benjamin Lammert.

La filière demande aussi une réglementation qui soit efficace contre la déforestation importée et qui ne pénaliserait pas les producteurs français et européens de soja.

Par ailleurs, malgré les inquiétudes, « les flux ukrainiens se sont calmés : on n’a pas constaté de déferlement de cultures oléagineuses sur les marchés européens venant d’Ukraine ». Pour autant, la question de l’élargissement de l’UE à l’Ukraine pose question à la filière : « il faudra déterminer comme gérer les marchés à ce moment-là. Cela soulève des questions de distorsions de concurrence, d’égalité de traitement, et éventuellement de fraude ».