Des pistes pour le renouvellement des générations d’éleveurs
TNC le 23/03/2022 à 16:Mar
Alors que la moitié du lait français va changer de main dans les 10 ans à venir, la filière laitière n’installe pas suffisamment de jeunes pour garantir le maintien de la production. Pourtant, le secteur est riche d’un certain nombre d’atouts qu’il faut développer, tout en travaillant sur l’accompagnement de la transmission, la communication, ou encore l’adaptation aux attentes des hors cadre.
D’après les chiffres de l’Idele, le secteur laitier est celui qui aurait le moins bon taux de remplacement des départs à la retraite, soit 45 %, contre plus de 70 % pour les autres filières. « Le taux d’installation est faible, mais on est la filière qui renouvelle le plus », tempère Yohann Barbe, éleveur dans les Vosges et membre du bureau de la FNPL. Le syndicat a tenu le 22 mars son assemblée générale à Paris, autour du thème du renouvellement des générations en élevage laitier. Quoiqu’il en soit, les installations restent aujourd’hui insuffisantes pour assurer, demain, le maintien à l’identique de la production laitière.
Car le défi est « colossal », rappelle Sébastien Windsor, président des chambres d’agriculture : « 45 % des agriculteurs vont prendre leur retraite d’ici 2026, les 14 000 installations par an (ndlr : en moyenne, sur la période 2015-2019) ne suffiront pas ». Néanmoins, dans ce défi, l’élevage laitier a des atouts, car « aujourd’hui, partout en France, l’activité laitière reste un moteur d’installation, car on y voit la possibilité de création de valeur », remarque-t-il.
78e AG de la FNPL. @76sebwin à La Tribune : 45% des exploitants seront à la retraite en 2025 ! Un sacré défi ! pic.twitter.com/5qq4ndPkh9
— jmvignau (@jmvignau) March 22, 2022
« Proposer quelque chose qui apporte un plus au jeune »
Cependant, « l’installation en lait est onéreuse », ce qui rend la transmission plus difficile, sans compter que « l’on veut transmettre nos exploitations telles qu’elles sont alors qu’elle ne répondent pas forcément aux attentes », témoigne Marie-André Luherne, secrétaire générale adjointe de la FNPL, qui évoque un travail à faire sur le foncier et, possiblement, sur le redimensionnement des exploitations. La transmission doit en effet être mieux réfléchie, et anticipée dès 50 ans, ont rappelé Sébastien Windsor, mais également Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA.
Pour Yohann Barbe, il faut « proposer aux jeunes quelque chose en plus », par exemple en faisant évoluer le fonctionnement des Gaec, explique-t-il en proposant de faciliter le départ d’un nouvel associé, sans pénalité financière, si cela ne fonctionne pas.
78e AG de la FNPL @yohannbarbe sur le RGA. La question de la transmission passe par l’intégration des jeunes et la connaissance y compris en ressources humaines. On doit retravailler le modèle du GAEC. pic.twitter.com/6SuXcRbHMG
— jmvignau (@jmvignau) March 22, 2022
« Je suis convaincu aussi que l’on va encore attirer beaucoup de jeunes demain, mais avec des messages et des sujets un peu nouveaux », estime de son côté Sébastien Windsor, qui évoque la lutte contre le réchauffement climatique et l’enjeu du carbone. La communication sur le métier a également son importance, ajoute quant à elle Christiane Lambert : « notre profession peut être offensive et positive », « à nous de porter le métier », explique-t-elle.
78e AG de la FNPL. @ChLambert_FNSEA un discours résolument offensif et positif. L’alimentation a de l’avenir, bien plus que les fabricants de réveils. pic.twitter.com/fMQPmmsMtb
— FNPL (@FNPLait) March 22, 2022
Pour Gabrielle Halpern, docteure en philosophie, une autre piste est à explorer, celle de « l’hybridation », en particulier l’hybridation des compétences. Avec l’arrivée croissante de personnes non issues du monde agricole (qui représentaient 62 % des nouveaux agriculteurs en 2018), de nouvelles compétences investissent les exploitations agricoles. En effet, ces jeunes « ont eu une vie professionnelle avant, un métier qui n’a rien à voir, et ils apportent leurs compétences d’avant dans ce nouveau monde ». Des compétences qui peuvent venir de l’enseignement, du marketing, du secteur culturel, etc. Et qui créent davantage de ponts avec la société, renforçant le rôle sociétal des exploitations agricoles. « C’est important, car les nouvelles générations ont besoin de sens, et plus la ferme va vers cette hybridation de différentes activités, plus elle s’ouvre », ajoute la philosophe. « On pourra de plus en plus faire entrer la ferme dans la société et la société dans la ferme. L’hybridation peut être une clé pour permettre au monde agricole de devenir un véritable point de repère, non seulement pour le territoire, mais aussi pour tous les Français » et, ainsi, permettre de renforcer l’attractivité du métier.