550 000 € pour bâtir une étable robotisée au cœur des prairies
TNC le 14/01/2022 à 06:03
Pour optimiser la place de l’herbe dans la ration des vaches laitières, le Gaec La liberté a construit un nouveau bâtiment équipé de robots de traite au cœur d’un îlot de 35 ha découpé en 55 paddocks.
En Vendée, le Gaec La liberté n’a pas choisi son nom au hasard : ici, au retour du printemps, les 80 vaches évoluent en autonomie sur 55 parcelles de prairies au centre desquelles les éleveurs ont investi 550 000 € dans un bâtiment équipé de deux robots de traite.
À la pleine saison de pâturage, du 15 avril au 15 juin, l’herbe représente environ 80 % de la ration ; elle est complétée par du maïs épi et du foin de luzerne. Chaque matin, les éleveurs organisent les clôtures pour permettre l’accès des vaches à un demi-paddock le matin (8h-12h), un second paddock l’après-midi (12h-19h), et l’autre moitié du premier paddock la nuit (21h-6h).
Elles repassent par le bâtiment pour changer de parcelle.
« Elles marchent jusqu’à trois kilomètres dans la journée, estime Jérôme Charrier, associé avec son père Jean-Claude. Chaque jour, nous sélectionnons une parcelle proche du bâtiment et une parcelle éloignée, sachant qu’elles doivent obligatoirement passer par le bâtiment pour aller de l’une à l’autre. L’alimentation en eau est gérée par un système automatique coupant l’eau pour les inciter à se déplacer seules au cours de la journée : elles savent comment faire. L’inconvénient est que l’heure d’arrivée sur les paddocks peut être très différente d’une vache à l’autre. »
Des prairies plus portantes et irriguées
Cette organisation a été imaginée suite à l’installation de Jérôme en 2010 et à la reprise du site de La Roche neuve à 5 km du site historique de La Ménie, touchant le bourg de Saint-Malo-du-bois. Ce deuxième site éloigné héberge les génisses, et les éleveurs y cultivent du maïs et des céréales.
Mais l’extension de la commune grignote progressivement la surface pâturable de l’exploitation convertie à la production biologique depuis 1998. De plus, le bâtiment logettes de La Ménie présente plusieurs inconvénients (pente, ventilation, nettoyage, boiteries). La décision est donc prise de construire un nouveau bâtiment au milieu d’un îlot de 35 ha à La Roche neuve, en convertissant les terres en prairies multi-espèces (ray-grass anglais tétra et diploïde, trèfle blanc, trèfle violet, plantain). « L’herbe doit toujours être appétente pour que les vaches aient envie de pâturer, souligne Jérôme Charrier. Nous utilisons aussi l’irrigation car les terres sont peu profondes et séchantes. En revanche, elles ont l’avantage d’être plus portantes que les terres de La Ménie. »
Depuis le transfert dans le nouveau bâtiment en 2019 et la mise en place du pâturage tournant dynamique, l’autonomie alimentaire s’est améliorée avec des achats d’aliments concentrés réduits de 60 à 40 tonnes/an. La productivité est de 8 000 litres/VL environ avec un TB de 40 g/l et un TP de 31 g/l. Les éleveurs ont acheté un taureau de race jersiaise dans le but d’inséminer les génisses et d’augmenter les taux.
Une litière de bois malaxée
L’autre particularité du bâtiment est le choix d’une aire de couchage sur litière de bois malaxée, ayant permis de limiter la surface bétonnée. « Nous avons découvert la litière de miscanthus malaxée chez un voisin mais nous n’avions pas de terres disponibles pour cultiver le miscanthus, alors que nous avons une ressource en bois sur la ferme avec les haies, indique Jérôme. Nous mettons aussi en place l’agroforesterie. »
Les éleveurs sous-traitent la taille et le hachage en plaquettes du bois des haies. Leurs besoins sont de 700 m 3/an pour un coût estimé à 11 €/m 3. Une couche drainante de 20 cm constitue la litière, complétée en fonction des conditions d’humidité, par du bois haché plus finement associé à un asséchant (fine de broyage achetée à l’extérieur 13 €/m 3).
La litière est malaxée une fois par jour en hiver et une fois par semaine le reste de l’année à l’aide d’un vibroculteur constamment attelé à un tracteur. Elle est entièrement renouvelée deux fois en automne-hiver et une fois au printemps, et épandue sur prairies et luzerne car c’est un produit riche en carbone. « Nous sommes très satisfaits de cette litière pour notre confort de travail et le confort des vaches, déclare Jérôme. Elles se couchent comme elles le veulent, sans contrainte. Le niveau cellulaire moyen est de 210 000 cellules/ml et nous ne comptons que trois mammites par an, soit dix fois moins que dans l’ancien bâtiment à logettes. »
Retrouvez d’autres détails dans la vidéo réalisée par la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire à l’occasion de la porte ouverte de l’exploitation :
Astreinte permanente
« Nos objectifs techniques et financiers sont atteints, concluent les éleveurs. Mais nous devons encore faire évoluer nos pratiques. » Selon Jérôme, le système associant pâturage intensif et traite robotisée est complexe à optimiser et demande une réflexion permanente. Les robots achetés d’occasion pour 113 000 € apportent du confort de travail mais génèrent aussi « beaucoup de maintenance et une astreinte psychologique permanente » liée aux alertes de dysfonctionnement à toute heure. Quant au robot aspirateur à lisier, il fonctionne mal de mai à octobre quand l’aire d’exercice n’est pas suffisamment humide.
L’autonomie des vaches impose aussi d’être très rigoureux sur les ouvertures et fermetures des passages de circulation. En 2023, l’évolution de la main d’œuvre présente avec le départ en retraite de Jean-Claude et la fin de stage de l’apprenti, pourrait conditionner une modification du système de traite.