« Certaines régions vont devoir composer avec la MHE et la FCO »
TNC le 16/11/2023 à 05:00
Avec 1 500 cas de FCO sérotype 8, et près de 3 000 cas de MHE, le troupeau bovin français doit lutter conjointement contre deux menaces sanitaires.
« Il y a des territoires en France où il y a à la fois de la MHE, et de la FCO sérotype 8 », alerte Emmanuel Garin, vétérinaire au GDS en charge de la FCO et impliqué dans le suivi de la MHE à l’occasion du webinaire d’automne de l’UMT Pilotage et santé des ruminants. « C’est une première mondiale d’observer cette co-infection ».
Les départements des Pyrénées-Atlantiques, de la Haute-Garonne, de l’Ariège, de l’Aude, du Tarn, Tarn-et-Garonne, ainsi que la Dordogne et la Corrèze sont confrontés conjointement à la MHE et la FCO à date du 10 novembre.
Et cela n’est pas sans complexifier la tâche des vétérinaires. « Si l’on a des animaux malades d’une semaine à l’autre, on a tendance à penser que c’est la même maladie. Mais compte tenu de la propagation des deux virus, le doute sera permis… ».
Car cette année, la FCO est particulièrement virulente. Si les sérotypes 4 et 8 sont toujours présents sur le territoire français, l’apparition d’une nouvelle souche du sérotype 8 change la donne. « Cette nouvelle souche, c’est un peu comme si on découvrait une nouvelle maladie », traduit le vétérinaire. Avec la souche précédente, 20 à 30 cas cliniques étaient déclarés chaque année. Aujourd’hui, le sérotype 8 est à l’origine de 1 500 foyers cliniques confirmés à ce jour, répartis sur 20 départements. « Et il y a peut-être une sous-déclaration des cas », ajoute Emmanuel Garin. Pourtant les conséquences sont lourdes : « sur certaines exploitations, 60 % du troupeau est malade de la FCO ».
Vacciner contre la FCO
Mais la vaccination est possible. Il est même recommandé de vacciner les animaux situés dans les départements limitrophes des zones infectées. Il faut généralement compter 6 semaines entre la première injection, et le développement d’une immunité complète, donc mieux vaut se presser. « La vaccination ne servira pas à grand-chose sur des animaux infectés », précise le vétérinaire. « Il est vrai que la vaccination contre le sérotype 8 a été quelque peu délaissée, car le nombre de cas cliniques était faible, mais l’apparition de la nouvelle souche change la donne ».
La FCO sérotype 3 a également été détectée à la mi-septembre aux Pays-Bas. « En un mois, le pays a recensé plus de 4 000 foyers, et des cas sont apparus au nord de la Belgique, de l’Allemagne ainsi qu’au sud de l’Angleterre ». Il est donc probable que la maladie vienne un jour s’inviter en France. « Si cela arrive, les protocoles d’échanges commerciaux existant pour les sérotypes 4 et 8 s’appliqueront, mais un zonage de 150 km autour des exploitations concernées sera établi ».
Aucun vaccin n’est actuellement disponible pour le sérotype 3, mais des travaux en laboratoire donnent des perspectives de solution d’ici la fin 2024.
L’inévitable propagation de la MHE
La propagation de la MHE inquiète également. « En dix mois, la maladie a progressé de 800 km en Espagne avant de passer les Pyrénées » et l’abondance de culicoïdes en France rend son déploiement probable. « La maladie se diffuse de l’ordre de 2 km par jour par mouvements des vecteurs. Soit entre 10 et 15 km par semaine ». Si cette propagation semble inévitable, il reste essentiel de travailler sur le transport, qui fait faire des sauts à la maladie. « Les foyers à plus de 100 km d’un autre foyer sont plutôt le fruit de déplacement d’animaux ».
50 % des troupeaux présents sur une zone atteinte par la MHE sont infectés
Au 9 novembre, 2 984 foyers étaient recensés sur 13 départements. Les premières remontées terrain semblent indiquer que la moitié des troupeaux présents sur une zone atteinte sont touchés. Question morbidité, les données sont extrêmement variables. « Cela va de 1 à 100 % », ironise le vétérinaire. « Il y a des troupeaux où tous les bovins adultes sont malades, d’autres présentent des cas isolés ». La mortalité est, elle aussi, très hétérogène.
La mise en place d’un vaccin permettrait également d’endiguer la maladie. « Un labo espagnol travaille actuellement sur la maladie, mais il est difficile pour eux de se projeter sur des volumes ». Car si la FCO comme la MHE sont des maladies réglementées, aucune ne dispose d’un programme d’éradication, qui assurerait un débouché certain aux groupes pharmaceutiques.