Quelle stratégie pour faire face aux aléas en élevage ?
TNC le 17/07/2020 à 09:46
Associé avec son père au sein de l’EARL La Mardière dans les Deux-Sèvres, Julien Dupuis élève une centaine de vaches parthenaises. Polyculteur-éleveur, il est confronté ces dernières années à des conditions climatiques changeantes, soit trop sèches ou trop humides, qui impactent ses productions. Pourtant, il a décidé de ne pas s’assurer avec l'assurance multirisques climatiques, jugeant cela non rentable.
Installé depuis 10 ans avec son père, à Saivres (Deux-Sèvres), Julien Dupuis élève une centaine de vaches parthenaises et leur suite soit 300 animaux. Sur les 170 hectares de l’exploitation, une cinquantaine est consacrée aux céréales et maïs.
Présentation de l’exploitation : EARL La Mardière à Saivres (Deux-Sèvres) située entre Plaine et Gâtine.
Deux associés : Julien et son père Didier.
Système naisseur-engraisseur : 100 vaches allaitantes de race parthenaise et leurs suites – Label Rouge
Trois débouchés pour la viande : boucherie traditionnelle d’un supermarché Leclerc ; le restaurant O’La Vache à Niort ; vente directe en caissettes sur l’exploitation
170 ha dont 120 ha de SFP.
Cultures : céréales, betteraves fourragères, maïs ensilage (ou maïs grain) et cette année tournesols.
Site de l’exploitation : https://earllamardiere.fr/
Plusieurs étés secs, le dernier automne-hiver très pluvieux,… la météo a fortement impacté son activité ces derniers temps. Mais pas de quoi le convaincre de s’assurer contre ces aléas climatiques.
Assurances climatiques ou prairies, pas rentable pour lui
« Nous avons choisi d’assurer toutes nos cultures pour la grêle mais pas contre les aléas climatiques. À court terme, je trouve que ce n’est pas valable pour un élevage. Ramener à l’échelle de 10 ans, il faudrait déclencher tous les 2-3 ans pour que l’assurance soit rentable », explique le jeune éleveur.
Pourtant, le 10 mai dernier, un violent orage s’est abattu sur sa commune. Les 140 mm tombés en une heure ont inondé ses parcelles et surtout celle de tournesol semée un mois plus tôt. Toute la terre est partie, il devra restructurer cette parcelle à l’automne prochain. « C’est sûr qu’en cas de gros pépin, comme cette inondation, tout est pour notre « pomme ». Mais finalement, ça n’a pas lieu si souvent que ça, se rassure-t-il, nous avons le plus souvent des orages de grêle localisés. »
Idem pour l’assurance prairie. « J’y ai réfléchi mais je ne préfère pas m’assurer pour le moment, on n’a pas assez de recul sur cette assurance, et les cotisations sont aussi trop élevées » selon lui. Lancée en 2016, elle permet d’indemniser les pertes de production fourragère en cas d’aléas climatiques, et notamment pour la sécheresse. « C’est sûr que le climat change, le soleil brûle plus fort et nos terres, bien qu’argileuses, souffrent, surtout depuis trois ans », reconnaît l’éleveur.
À l’été 2019, en raison du manque d’herbe, il avait dû rentrer la plus grosse partie de ses animaux dès la fin juillet-début août pour les ressortir seulement au printemps 2020. « Nous avions des stocks de fourrage de l’année précédente, donc nous avons eu de la chance, nous avons réussi à passer l’année en arrivant à un stock 0 au printemps. »
Et ce printemps a plutôt été favorable à la pousse de l’herbe. Après deux coupes de ray-grass qui ont permis de faire deux fois 10 tonnes, il s’apprête à réaliser la troisième, qui s’annonce elle aussi prometteuse. « Nous avons fait de très belles récoltes de foin et enrubannage, donc nous sommes plutôt optimistes sur le fourrage des animaux, nous avons de quoi tenir jusqu’au printemps. Et nos maïs sont aussi plutôt beaux pour le moment. »
La paille se fait rare dans les Deux-Sèvres
Ce qui l’inquiète davantage, c’est la paille. « Elle est très très rare. L’automne et l’hiver ont été tellement humides, avec 1 500 mm enregistrés, que sur notre exploitation, nous n’avons semer aucunes de nos céréales habituelles. » Son assolement n’est donc constitué que de cultures de printemps cette année dont le tournesol qu’il n’avait jamais cultivé auparavant. Les céréaliers du secteur ont été confrontés aux mêmes problèmes météorologiques. « Les premiers retours indiquent 2 t/ha de paille contre 5 t/ha l’année dernière », précise-t-il. Il craint une flambée des prix et espère que ces vaches pourront rester le plus longtemps possible au pré, ce qui semble bien parti pour le moment avec l’herbe bien présente. « L’hiver dernier, on mettait 6 à 7 balles par jour pour 100 vaches. On n’a plus aucun stock. Il faut espérer que l’hiver prochain ne soit pas trop humide, sinon il faudra trouver des alternatives, peut-être les copeaux de bois… »
Assurer son cheptel, une meilleure idée
Sécheresse durant plusieurs étés, hiver 2019-2020 très humide… les aléas climatiques ont donc bien touché l’exploitation de Julien mais les stocks des années précédentes ont permis de tenir sans trop de dégâts. Ce qui ne plaide pas en faveur de l’assurance multirisques climatiques.
« J’aimerai mieux à l’avenir avoir la possibilité d’assurer mon cheptel pour les maladies par exemple », poursuit Julien. Il assure déjà ses cinq taureaux reproducteurs sur l’invalidité « On est assurés sur le prix d’achat de l’animal, et le coût annuel est d’environ 10 % de ce prix d’achat. Dans notre race, fragile au niveau ossature et qui charge beaucoup en viande mais avec peu d’os, on a tout intérêt à s’assurer ». Une patte cassée est vite arrivée au moment des saillies et le taureau n’est alors plus apte à la reproduction.