Atteindre la neutralité carbone en bovin lait ou viande : est-ce possible ?
TNC le 09/12/2024 à 10:05
Avoir une empreinte carbone nulle, est-ce un objectif atteignable pour une exploitation bovine ? Et quels systèmes permettent de l’atteindre ? Les travaux du réseau thématique Inosys "Vers des systèmes bovins neutres en carbone" apportent des réponses.
« Rares sont les exploitations qui atteignent la neutralité carbone », explique d’emblée Anne-Laure Gomas de la chambre d’agriculture de Charente et des Deux-Sèvres lors d’une conférence au Space 2024. L’étude de la base de données Cap’ER effectuée par le réseau Inosys « Vers des systèmes bovins neutres en carbone » montre qu’il est difficile d’atteindre des émissions brutes inférieures à 0,8 kg éq CO2/l de lait ou 12 kg éq CO2/kg de PBVV (production brute de viande vive).
« Dans un même système, les fermes qui ont les émissions brutes les plus faibles sont celles qui ont les systèmes les plus optimisés : c’est le premier levier pour faire diminuer les gaz à effet de serre », poursuit la conseillère de la chambre d’agriculture. « Mais si on veut faire baisser son empreinte carbone nette, il faut aussi jouer sur le stockage du carbone. C’est lui qui va faire la différence. »
Au final, les exploitations qui atteignent la neutralité carbone sont peu nombreuses et ont des systèmes difficilement généralisables. « Elles compensent leurs émissions car elles ont beaucoup de prairies permanentes et surtout un chargement très faible. Ce qui n’est pas forcément reproductible et économiquement viable », souligne Anne-Laure Gomas.
Une plus-value de 200 €/ 1 000 l de lait nécessaire
Pour atteindre la neutralité carbone, le réseau Inosys a effectué une simulation sur un cas type d’élevage laitier, avec maïs et herbe, pâturant dans le Limousin.
Les changements effectués pour atteindre une empreinte carbone neutre consistaient à passer les 90 ha en 100 % prairies permanentes (contre 65 ha initialement en herbe) ; changer la race de vache (Jersiaise à la place de Holstein) et diminuer l’effectif ; le système est devenu complètement autonome en fourrage et concentrés, et il a doublé son linéaire de haie (passant de 6 ha à 12 ha).
Il en résulte une division par deux du produit, le nombre de litres de lait vendus étant divisé par deux, ainsi qu’une diminution des charges de 45 %, puisqu’il n’y a plus ni achat de fourrage et concentrés, ni fertilisation. Le revenu disponible se trouve divisé par 3 : « il faudrait une plus-value de 200 €/1 000 l du prix du lait pour maintenir le revenu initial de l’éleveur », explique Elisabeth Castellan de l’Idele.
Diminuer son empreinte carbone pose donc la question du modèle économique à mettre en place pour compenser les pertes de revenus des éleveurs qui se lancent dans la voie de la transition.