Les éleveurs résignés face aux inéluctables mesures contre la grippe aviaire
AFP le 06/12/2022 à 08:05
Dans son poulailler vide, l'éleveur vendéen Pascal Sachot juge inéluctables les mesures de l'Etat pour endiguer la flambée de grippe aviaire dans l'ouest, afin d'éviter des coûts économiques et psychologiques « encore plus importants ».
« Ça a été terrible au mois de mars », poursuit le quinquagénaire, évoquant les abattages dans de nombreuses fermes. « Ce matin j’étais content que mon dernier « bâtiment » (de volailles) parte, je n’ai plus le souci de me dire : « demain, je vais peut-être aller voir mes animaux (…) en train de mourir les uns après les autres » », témoigne le porte-parole de la Confédération paysanne en Vendée.
Vendredi, l’Etat a enclenché une baisse de la production de volailles dans une zone entre Vendée, Deux-Sèvres et Maine-et-Loire, pour éviter que la grippe aviaire ne devienne incontrôlable. Près de 1,3 million de volailles ont été euthanasiées depuis la résurgence précoce de l’épizootie cet été.
L’objectif est de ne pas être confronté à la saturation des capacités d’abattage sanitaires comme ce fut le cas au printemps avec plus de 20 millions de volailles abattues.
Constater le décès de milliers d’animaux malades est justement ce qui est arrivé à Etienne Blanchard, céréalier et éleveur de volailles à quelques kilomètres de la ferme de M. Sachot, aux Herbiers.
Après le choc de ce qu’il a vécu fin mars, Etienne Blanchard, est favorable à la « dédensification » souhaitée par le ministère de l’agriculture, même s’il souligne que l’absence d’animaux dans les bâtiments est « très étrange » à vivre pour les agriculteurs.
« Cette décision est importante, collectivement, à un moment donné » d’autant plus que « c’est une décision d’Etat », et « qui dit décision d’Etat, dit indemnisation des fermes et des éleveurs ». « On a quand même de la chance d’être dans une filière qui permet de garder la tête hors de l’eau », explique ce paysan bio.
Poules et pintades autorisées
Les mesures prises vendredi prévoient notamment que les dindes et les canards, espèces les plus sensibles au virus actuellement, doivent être envoyés de manière anticipée à l’abattoir, sans être remplacés dans les exploitations.
Mais les éleveurs de poulets et poules pondeuses peuvent aller au bout de leur cycle de production. Cela concerne aussi les pintades, comme celles d’Etienne Blanchard, 4 000 élevées en plein air, qui devraient être livrées aux consommateurs pour les fêtes.
« Il y a une telle concentration de bâtiments de volailles (…) que l’on concentre le risque », observe M. Blanchard, pour qui la crise actuelle remet en cause un modèle d’agriculture trop intensive.
Non loin de là, aux Essarts, Christian Drouin considère, lui, que le gouvernement aurait dû prendre des mesures plus importantes.
« Ils font passer les intérêts économiques avant les problèmes sanitaires.
Il fallait, sur toute la Vendée, même les départements limitrophes, un arrêt de mise en place (de lancement d’un nouveau cycle de production, ndlr) de toutes les espèces », déplore l’agriculteur de 59 ans contraint de ramasser les cadavres de volailles, en mars.
L’éleveur redoute de revivre le même scénario, mais concède que sa situation professionnelle est plus rassurante que celles de confrères, notamment ceux qui débutent. Lui, a déjà remboursé son poulailler et produit aussi de la viande bovine.
« J’ai des voisins qui ont arrêté » leur élevage de volailles, « pendant un laps de temps, et sont allés travailler dans les usines du coin », témoigne Etienne Blanchard.
« On n’est pas sorti, il y a tout l’hiver à passer. L’hiver, le virus se développe partout », conclut Christian Drouin, avec l’espoir que la vaccination soit une piste de sortie de crise.