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Laiterie brin d'herbe (76)

Partager son labo de transformation pour permettre aux voisins de se lancer


TNC le 20/03/2023 à 10:03
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Le laboratoire de transformation de la laiterie Brin d'herbe (76) (©TNC)

« Plus on sera d'agriculteurs à faire de la transformation, plus on habituera les clients au circuit court et on pourra continuer à le développer. » C'est avec cette devise qu'Aldric Vandermeersch a ouvert son laboratoire de transformation laitière à la prestation de service. Une à deux journées par semaine, il transforme donc le lait d'un voisin en plus du sien.

« À mon installation, j’aurai aimé pouvoir transformer mon lait chez des collègues pour pouvoir démarrer la commercialisation des produits. Un laboratoire coûte cher : ici on a investi 300 000 € de matériel, ça demande un certain débit pour le rentabiliser. Et avant d’être rentable, ça peut générer des années difficiles. » C’est pour cette raison qu’Aldric Vandermeersch a ouvert le sien à la prestation de service.

Un laboratoire pour deux projets de transformation laitière à la ferme.

Une exploitation agricole et une laiterie

Aldric s’est installé en 2009 sur cette exploitation normande située à Bréauté (76) comprenant à l’époque 27 ha pour 180 000 litres de lait. En système pâturant, il a poursuivi dans ce sens tout en agrandissant la structure et l’a même convertie à l’agriculture biologique en 2017.

Dès son installation, l’objectif était clair : transformer sa production laitière pour mieux la valoriser. Après un long temps de réflexion autour d’un projet collectif avec plusieurs voisins, Aldric s’est finalement retrouvé le seul intéressé au bout du compte. Il a alors monté son propre laboratoire en 2014. Basée sur la ferme, la Laiterie brin d’herbe n’y est pas pour autant rattachée dans les faits puisqu’il s’agit d’une structure indépendante (SARL) à laquelle l’exploitation vend son lait (550 €/1000 l).

La laiterie transforme aujourd’hui la totalité du lait d’Aldric, soit 350 000 l/an, en yaourts, beurre, crème, lait en bouteille, fromage blanc, yaourt à boire, yaourt à la grecque et plus récemment de la burrata et de la mozarella. Les ventes se font majoritairement en RHD (cantines) et grossistes, puis à des revendeurs (magasins de producteurs), à la ferme et à des restaurateurs.

Pour ce faire, Aldric a vite embauché du personnel : deux salariées, dont Marine qui grâce à ses études de marketing et communication s’est beaucoup concentrée au démarrage sur le développement de la marque et les circuits de commercialisation.

La transformation laitière en prestation de service

« Très vite après la création du laboratoire, j’ai contacté des producteurs voisins pour leur proposer de transformer leur lait. La fabrication, ce n’est pas compliqué, mais le développement d’un business prend du temps. Faire fabriquer ses produits ailleurs permet de se concentrer sur la vente. »

Aider des voisins à démarrer une même activité qui pourrait devenir concurrente, c’est peu courant… Mais Aldric a les idées claires là-dessus : « Mes voisins agriculteurs ne sont pas des concurrents mais bien des collègues. Il y a de la place pour tout le monde. J’estime que plus on est nombreux à faire de la transformation, plus on habitue les clients au circuit court. Et puis, si les produits du voisin sont meilleurs que les miens, ça me permet aussi de me comparer et me remettre en question. »

Le voisin nous livre son lait (300 l/semaine) que nous transformons en yaourts et facturons 0,25 €/pot.Un agriculteur du coin a alors répondu à l’appel : cela lui a permis de lancer une gamme de yaourt sans investir dans l’atelier de transformation. Il ramène son lait (300 l/semaine) et fournit les emballages et les confitures. Les salariées de la laiterie gèrent la transformation et l’éleveur récupère son produit fini qu’il commercialise sous sa marque sur les marchés.

Les produits issus de la laiterie sont vendus d’une part sur la ferme, en RHD, mais aussi en magasins de producteurs et en RHD (cantines et restaurants). (©TNC)

« On aurait pu faire une mise à disposition complète du laboratoire, mais les machines sont spécifiques et le personnel est déjà là (et surtout il est habitué). C’est plus simple de fabriquer nous-mêmes. On s’est accordés sur les recettes, c’est tout », explique Aldric. Les deux agriculteurs se sont aussi mis d’accord sur un tarif : 0,25 €/pot produit, et tout le monde s’y retrouve. Un bon moyen de saturer l’outil de production et amortir les investissements.

Petit bémol (qui finalement n’en est pas un) : le lait du voisin étant en agriculture conventionnelle, cela demande de l’organisation. « On dédie une journée par semaine à sa fabrication ou, selon la charge de travail, on démarre une fabrication par le lait bio et on finit par son lait. Avec tous les nettoyages, ça ne pose aucun problème. »

Agriculteur, transformateur, commercial et DRH : beaucoup de casquettes à gérer

Si Aldric est content du chemin parcouru depuis son installation, il veut aujourd’hui revenir à son métier principal : agriculteur. « Mon truc, c’est : les vaches et les cultures ! La transformation, c’est super mais ça demande un gros investissement en temps. Aujourd’hui, je veux me reconcentrer sur la production. »

Je ne peux pas tout faire !Produire, transformer, vendre… mais aussi gérer du personnel : ce sont des activités bien différentes. Et la charge de travail est devenue trop importante pour un seul homme. L’agriculteur recherche donc un porteur de projet pour reprendre sa laiterie (qui tourne d’ailleurs très bien). C’est l’avantage d’avoir séparé les sociétés du départ : « Je cède le fond et le matériel. Je mets à disposition les locaux et je veux bien continuer à fournir le lait, tout dépendra du projet du repreneur. »

Dans l’optique de déléguer cette partie, Aldric reste volontaire : « J’aiderai le repreneur à se lancer. Tout ce que je ne veux plus faire c’est gérer les salariés. J’adore la relation avec les clients, mais la gestion de personnel est vraiment un autre métier. » Il en appelle aux agriculteurs qui veulent se lancer dans la transformation : « Ne négligez pas l’aspect main d’œuvre, d’où l’intérêt de monter un projet à plusieurs ou de déléguer la transformation. »