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Projet de méga ferme

Plus de 200 000 vaches laitières sur une ferme de 100 000 ha en Algérie


TNC le 17/06/2024 à 05:13
baladna

La ferme Baladna au Qatar est équipée de roto de plus de 100 places. (© Baladna)

Dans un objectif d'autosuffisance alimentaire, l'Algérie monte un projet de méga ferme de plus de 200 000 vaches laitières avec la société quatarienne Baladna pour produire de la poudre de lait.

Les travaux débuteront en fin d’année 2024 pour l’une des plus grosses fermes laitières du monde en Algérie. L’accord a été signé en avril entre le ministère de l’agriculture et du développement rural algérien et la société qatarienne Baladna, ayant déjà à son actif une ferme de 24 000 vaches laitières au Qatar. Le projet pour l’Algérie : traire 270 000 vaches sur 117 000 ha dans la région d’Adrar à l’extrême sud du pays.

Selon nos confrères d’APS (Algérie presse service), le développement de cette exploitation se fera sur neuf années avec une première phase d’aménagement pour la production de fourrage, une autre de construction pour accueillir les 50 000 premières têtes en 2026 et monter les lignes de production de lait en poudre. Ce n’est qu’à la neuvième année du projet que le nombre total de 270 000 bovins devrait être atteint avec une production d’environ 1,7 milliard de litres de lait par an. On est bien loin de notre « ferme des 1000 vaches » française qui a fait couler tant d’encre pour tirer le rideau 5 ans après sa création…

Objectif : autosuffisance alimentaire

Pour le plus grand pays du pourtour méditerranéen, ce projet s’inscrit dans l’objectif de réduire sa dépendance aux importations en renforçant son autosuffisance alimentaire. « Les algériens consomment en moyenne 150 litres de lait par an par habitant (contre environ 40 l/an/habitant en France), c’est un secteur dynamique », rappelait Christine Goscianski de l’Institut de l’élevage à l’occasion de la journée marchés mondiaux le 11 juin dernier. « La moitié seulement du lait consommé est produit dans le pays et cela est compensé par une fabrication massive de produits laitiers à partir de poudre de lait importée. »

Bien que l’économie du pays soit dominée par le secteur des hydrocarbures, l’Algérie se recentre sur son agriculture. « Avant, le choix était d’importer plutôt que de produire, mais aujourd’hui il y a une vraie volonté de promouvoir la production locale. » Jusqu’à présent, cela restait compliqué : les troupeaux sont relativement petits, le taux de collecte est faible et le pays fait face à un gros déficit fourrager. Mais « le virage s’opère, affirme l’experte : il y a par exemple un travail sur la récolte des fourrages et surtout ce gros projet de méga ferme au sud du pays ».

Cette ferme laitière géante devrait par ailleurs permettre de couvrir la moitié des besoins du pays, de quoi combler le trou actuel sans « affecter les autres producteurs de lait algériens » selon les représentants du gouvernement.

Quelques questions éthiques

Le projet, dont l’investissement s’élève à 3,5 milliards de dollars, fait beaucoup réagir sur les réseaux sociaux à l’heure où le bien-être animal est étudié à la loupe en France… Par ailleurs, l’Algérie dans sa conquête de l’autosuffisance alimentaire a un vrai défi à surmonter sur la gestion de l’eau car toutes les cultures y sont irriguées. Le fait de construire un tel élevage en plein désert est un réel non-sens écologique pour certains. Sans parler des conditions d’élevage face aux températures caniculaires du sud du pays.

Autre sujet qui pose question : la société à l’origine du projet. Baladna est né avec la création d’une ferme de 24 000 vaches laitières au Qatar en 2017 afin de répondre à un blocus imposé par ses voisins. Cela s’est fait en un temps record avec l’importation par avion de plus de 10 000 vaches, le transport de tout le fourrage nécessaire venu du Soudan, et la création d’une laiterie pour mettre le lait en bouteille.

Ce qui fait parler également, c’est que la société Baladna est liée au fond Hassad Food fondé en 2008 et dont la stratégie est d’acheter des milliers d’hectares de terres arables dans diverses régions du monde telles que le Soudan, l’Australie, la Turquie, l’Ukraine, le Brésil, ou encore le Kenya.