Portance des sols : quand rentrer mes vaches au bâtiment ?
TNC le 07/10/2024 à 05:05
Bastien Van Inghelandt, conseiller en pâturage chez Pâtur’Ajuste nous donne quelques astuces pour profiter au mieux de l’herbe d’automne, même lorsque la portance commence à faire défaut.
Après plusieurs années à essayer de dompter le sec, la saison de pâturage actuelle challenge les éleveurs avec la gestion de l’excès d’eau ! Si la pousse de l’herbe donne parfois envie de prolonger un petit peu plus la saison de pâturage, c’est bien souvent la portance qui limite les éleveurs. Alors, jusqu’où pousser le bouchon avant de rentrer les vaches ? « Tout dépend du seuil de tolérance de l’éleveur, et de ses objectifs », sourit Bastien Van Inghelandt, animateur chez Pâtur’Ajuste.
Plusieurs options existent toutefois pour allonger un peu la campagne. « Le plus classique, c’est de diminuer le chargement à l’hectare, ou de jouer sur le temps de présence avec un pâturage plus dynamique ».
Sacrifier une parcelle
Mais d’autres font des choix plus radicaux. « Certains éleveurs sacrifient une parcelle ». La stratégie peut être cohérente dans un planning de pâturage. « Si l’on est sur une prairie temporaire qui va retourner en culture, ça peut être l’occasion d’en profiter. On peut même le faire sur une prairie qui n’a pas vocation à être réimplantée, pourvu qu’on lui laisse le temps de cicatriser », résume le conseiller.
Il faut entretenir le stock semencier des prairies
Car pour Bastien, le plus important n’est pas l’ampleur des trous, mais plutôt la capacité de la parcelle à cicatriser rapidement. « À partir de 10 % de vide, on commence à se poser des questions. Mais l’on peut monter jusqu’à 20 % voire plus si l’on sait que la prairie a le stock semencier pour repartir au printemps ». Et pour ce faire, il faut s’assurer que son sol comporte des graines. « Certains agriculteurs sont parfois surpris de voir leurs parcelles s’altérer au fil des années, mais si on ne fait que du pâturage tournant de 21 jours sans jamais que l’herbe ne monte à épiaison, la prairie n’a pas de capacité à s’autorenouveler ». Pour assurer la pérennité du couvert, le conseiller propose de laisser monter à graine la parcelle au moins une fois tous les 5 ans. « Ça peut aussi être une manière de faire du stock sur pied l’été ».
Compter également un temps de repos au printemps. « Il faut laisser la parcelle profiter du grand boom de la pousse de l’herbe pour qu’elle reparte bien, sans venir déraciner les jeunes plantules ». Avant de lâcher les vaches, mieux vaut donc regarder l’état des jeunes pousses. « Après un mois de reprise de la végétation, on s’intéresse à l’état de la parcelle. Si les jeunes pousses s’arrachent facilement, il faut attendre encore avant de l’utiliser ».
Mieux vaut également adapter son itinéraire technique. Attention aux apports d’engrais, qui peuvent griller les jeunes plantules, ou au hersage de prairie, qui pourrait les arracher.
Adapter la flore prairiale
Adapter sa flore prairiale peut être un plus. « On sécurise les périodes de pâturage en choisissant des parcelles qui tiennent bien le sec. On peut faire de même pour l’humidité », estime Bastien. Les plantes qui poussent en touffe, comme les fétuques et les dactyles supportent mieux le piétinement que les ray-grass.
Accepter de pâturer autre chose que de la petite herbe
Pour la fin de la saison de pâturage, Bastien invite les éleveurs à faire preuve de souplesse. « Le problème d’un défaut de portance, c’est qu’il nous fait rater les stades de végétation habituels pour l’éleveur. Alors si on veut valoriser autant que possible l’herbe sur pied, il faut parfois accepter de donner de l’herbe à un stade plus avancé, mais accessible, quitte à complémenter un petit peu à côté si les besoins du troupeau son important ».
Pour l’exploiter, il conseille d’habituer ses animaux à valoriser l’herbe à différents stades. « Le risque, c’est d’avoir des bovins avec une flore ruminale amylolytique, qui valorisera peu les fourrages fibreux en énergie ». En bref, la vache rumine, mais le fourrage n’apporte pas satiété. Proposer, avant le premier vêlage, une flore prairiale variée est un bon entraînement à long terme pour limiter les refus, et avoir des vaches qui s’adaptent bien à la réalité de la pousse de l’herbe à long terme.