Téreos veut mettre le paquet sur la luzerne
TNC le 31/08/2021 à 06:11
Débouché pour les cultivateurs n’ayant pas d’élevage, moyen pour les éleveurs d’élargir leurs approvisionnements, la luzerne déshydratée pourrait tirer son épingle du jeu des préoccupations politiques et sociétales actuelles. Dans ce contexte, le groupe coopératif Tereos entend bien contribuer à l’essor de la filière.
Neutralité carbone, biodiversité, autonomie protéique… La filière luzerne déshydratée entend bien se positionner comme une réponse à ces récentes orientations politiques européennes et françaises, à l’instar de Tereos. Lors d’un voyage de presse organisé le 25 août dans la Marne, le groupe coopératif a illustré sa volonté d’asseoir son engagement dans la production de luzerne à destination des marchés de l’alimentation animale.
Revenons quelques années en arrière : le groupe sucrier s’est lancé dans la déshydratation en 2016 en se rapprochant de la coopérative marnaise APM déshy, avec l’idée de jouer sur les complémentarités entre les filières betterave et luzerne.
Aujourd’hui, Tereos valorise 11 000 hectares de luzerne chaque année, produits par 760 coopérateurs de la Marne. Ce sont « soit des éleveurs qui la cultivent et la font déshydrater par la coopérative pour leurs propres élevages, soit des céréaliers dont la luzerne est transformée par la coop puis vendue aux fabricants d’aliments », décrit Brice Bijot, président de la commission luzerne chez Tereos.
Le groupe assure toutes les étapes de production de la luzerne, qui est transformée dans les quatre sites de déshydratation du groupe – Allemanche, Aulnay-aux-Planches, Montépreux et Pleurs – sur la période courant du printemps à la fin du mois de septembre. Au final, il produit chaque année en moyenne 144 000 tonnes de granulés standard de luzerne déshydratée à 16 à 23 % de protéines, et 3 300 tonnes d’extraits concentrés de luzerne (ECL) à 50 % de protéines.
Atouts agronomiques, économiques, écologiques
Florent Feige, directeur des opérations pour Tereos nutrition animale, détaille les atouts de cette culture pour celui qui en cultive : diversification de revenu, économie d’intrants et d’irrigation sur la rotation, renforcement de la structuration du sols fourniture d’azote naturel, baisse de la teneur en nitrates dans l’eau, faibles émissions de gaz à effet de serre, lutte contre l’érosion…
La luzerne représente entre 10 et 12 % des 450 hectares de Guillaume Lenoir, agriculteur à Broussy-le-Grand et coopérateur chez Tereos. Il a bien l’intention de continuer la production : « Ça permet de nettoyer la parcelle. Grâce au système racinaire, on peut en faire dans nos sols de craie. » Et économiquement ? « C’est intéressant pour la Pac. Ça compte ! »
De fait, les aménités environnementales de la production de luzerne représentent une sacrée opportunité. Elles devraient permettre de bénéficier de dispositifs mis en place dans le cadre de la future Pac : écoconditionnalité renforcée, Écoscheme… La filière travaille d’ailleurs à obtenir une aide couplée de 120 à 165 € destinée à la déshydratation, et à rendre la culture éligible à de nouveaux dispositifs. Au niveau franco-français, les professionnels de la luzerne déshydratée demandent aussi un paiement pour services environnementaux (PSE) de 200 €/ha afin de « pérenniser la culture et son intérêt pour l’environnement. »
Quelle attractivité pour l’élevage ?
Les prix sont plutôt fluctuants. Ainsi, cette année la météo « horrible » a fortement retardé la récolte, « hypothéquant le rendement de la 4e coupe » et tendant la production, explique David Sergent, directeur du pôle coopérateurs de Tereos. Cela vient jouer sur un marché de la déshydratation déjà tendu par des surcommandes d’éleveurs désireux de reconstituer leurs stocks, notamment. Résultat : les prix sont en hausse par rapport à l’an dernier.
Encourager les achats par les coopérateurs
Pour rendre le produit plus attractif, Tereos a mis en place une offre estivale au sein de sa branche Nutrition animale : en août, les granulés sont vendus aux coopérateurs cinq euros de moins que ce que propose Desialis, le leader du marché. Soit 189,60 €/t pour les granulés à 18 % de protéines, et 217,20 €/t pour le granulés à 21 %. L’offre sera actualisée en septembre, et pourrait concerner 3 700 éleveurs.
Hors coopérateurs, « les débouchés sont porteurs, annonce David Sergent. La demande est très forte sur les ECL et les granulés. On vend tout ce qu’on produit ! Les conditions météo favorisent le fait que l’alimentation animale a besoin de fourrages ». D’où l’intérêt, pour la filière, de pérenniser les exploitations qui produisent de la luzerne tout en recherchant de nouveaux débouchés.