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Syndicalisme

« Ras-le-bol des incohérences » : la FNSEA hausse le ton


AFP le 01/12/2023 à 08:40
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Arnaud Rousseau et Arnaud Gaillot à la sortie du rendez-vous avec Marc Fesneau (© Compte twitter Jeunes Agriculteurs)

Stockage de l'eau, pesticides, loi d'orientation : la FNSEA a exigé jeudi soir que « des décisions politiques soient prises » après quinze jours de grogne des agriculteurs, menaçant « la sérénité » du Salon de l'agriculture si aucune « réponse concrète » n'est apportée par le gouvernement.

« Parce que nous ne voulons pas d’interdiction sans solution et de sur-transposition européenne, il y a urgence à agir. Le Salon de l’agriculture aura lieu dans moins de trois mois. Nous n’imaginons pas que sans réponse très concrète, il puisse y avoir un salon qui se passe dans la sérénité », a mis en garde le président de la FNSEA Arnaud Rousseau lors de déclarations à la presse au sortir d’une réunion avec le ministre de l’agriculture Marc Fesneau.

Partout en France, depuis plusieurs semaines des agriculteurs manifestent leur colère, à l’appel du syndicat des Jeunes Agriculteurs et de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA).

Le mouvement, parti du Tarn, s’est vite trouvé un slogan – « On marche sur la tête » – et un mode d’action pacifique : retourner partout les panneaux signalétiques rouge et blanc indiquant le nom des communes, pour illustrer un « monde à l’envers ».

Ils ont dénoncé pêle-mêle l’augmentation de la redevance sur l’eau, des incohérences sur l’usage de produits phytosanitaires, les accords européens de libre-échange en gestation (Mercosur) ou le refus de Bruxelles de prolonger en 2024 la dérogation permettant de mettre en culture les terres en jachère, alors que la tension énergétique et alimentaire provoquée par la guerre en Ukraine est toujours là.

« Il faut maintenant que les décisions politiques soient prises », a prévenu Arnaud Rousseau, au côté du président des JA Arnaud Gaillot, avec qui il sera reçu « mardi en fin d’après-midi par la Première ministre » Elisabeth Borne.

« Si la Première ministre ne nous donne pas des réponses très claires mardi, nous ferons le constat que nous sommes livrés à nous-mêmes », a-t-il ajouté, rappelant que les manifestations des dernières semaines s’étaient déroulées « dans le respect des biens » en dépit du « ras-le-bol » du monde agricole.

« Boulets aux pieds »

Les agriculteurs sont particulièrement ulcérés par les reports successifs de la future loi d’orientation agricole, qui vise notamment à assurer la transmission des exploitations, l’installation de jeunes agriculteurs et la transition environnementale du secteur. D’abord annoncée pour l’été 2023, puis décalée à septembre, puis décembre, elle est désormais attendue en 2024.

« On a besoin d’un calendrier lisible avec une loi avant le Salon de l’agriculture », grand-messe annuelle et rendez-vous prisé des politiques qui aura lieu du 24 février au 3 mars 2024, a insisté Arnaud Gaillot.

Si ce n’était pas le cas, il a prévenu : « Je l’ai dit très clairement au ministre : tout dépend de comment le président de la République a envie de déambuler dans les allées » du salon. « Le sujet, c’est juste la crédibilité de la parole publique », a martelé Arnaud Rousseau.

« Le président de la République a dit « pas d’interdiction sans solution pour tous les moyens de production ». La Première ministre a dit « pas de sur-transposition européenne ». Donc maintenant il faut que les choses se mettent en place. On porte la souveraineté alimentaire et tous les jours (…) on a des boulets aux pieds », a-t-il ajouté.

Alors que le Parlement européen a rejeté le 22 novembre une législation visant à réduire de moitié l’usage des pesticides dans l’UE d’ici 2030 (par rapport à la période 2015-2017), le gouvernement français a pour l’heure maintenu ces objectifs dans le cadre d’une nouvelle stratégie nommée Ecophyto 2030, actuellement « en cours de consultation ».

La colère est profonde dans les campagnes, où au rejet des « normes imposées par Bruxelles » se mêle l’incompréhension face à la suppression (progressive) de la défiscalisation du gazole non routier (GNR) agricole ou « l’augmentation de la redevance sur les produits phytosanitaires ».

La semaine dernière, Arnaud Rousseau, maire du village de Trocy-en-Multien (Seine-et-Marne), s’est joint à l’initiative, postant une photo du panneau retourné de sa commune sur X (ex-Twitter) avec ce commentaire : « Face au constat que nos dirigeants marchent sur la tête, nous appelons à une véritable respiration normative. Nous leur demandons de garantir nos moyens de production ».