Après la colère, un Salon de l’agriculture pour « redonner espoir »
AFP le 17/02/2025 à 09:15
La colère n'est pas complètement retombée mais les fourches semblent rangées : le 61e Salon international de l'agriculture, qui s'ouvre samedi à Paris, se veut cette année un rendez-vous plus apaisé, festif et populaire, pour « redonner de l'espoir aux paysans ».
L’édition 2024 s’était ouverte dans le chaos, après dix jours de crise agricole marquée par des blocages d’autoroute et l’irruption de manifestants en marge de la venue du président Emmanuel Macron au parc des expositions de la porte de Versailles.
Hors de question que cela se reproduise, ont averti les organisateurs, qui attendent entre 600 000 et 620 000 visiteurs parmi les stands d’un millier d’exposants, et 4 000 animaux dont la vache limousine Oupette, égérie de l’édition 2025 du Salon de l’agriculture.
« Profitons de ces neuf jours pour passer à une étape positive et redonner espoir aux paysans », a déclaré Jérôme Despey, président du Salon et vice-président de la FNSEA. Emmanuel Macron est attendu samedi pour l’inauguration du Sia. Une charte visant à mieux encadrer les visites des différentes figures politiques, président compris, a été mise en place.
Un état d’esprit moins belliqueux
Les syndicats sont dans un esprit relativement moins belliqueux, après avoir mené une âpre campagne pour leurs élections professionnelles de janvier. L’hégémonie de l’alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs dans les chambres d’agriculture a été fissurée avec une percée de la Coordination rurale, deuxième syndicat agricole, souvent adepte des actions coup de poing.
Les mobilisations d’agriculteurs cet automne ont aussi été d’une ampleur moindre que celles de début 2024. Mais « le niveau d’attente est toujours très élevé et la colère est toujours là », affirme à l’AFP Arnaud Rousseau, président de la FNSEA.
« Force est de constater que les choix politiques effectués et que l’année agricole 2024 difficile dans toutes les productions conduisent les agriculteurs à avoir le sentiment que les réponses apportées ont beaucoup tardé. » S’il souligne le besoin de « convivialité » au salon, il insiste pour qu’Emmanuel Macron vienne rassurer, sur « son domaine de l’international » les agriculteurs, qui craignent notamment les taxes douanières américaines et chinoises.
La présidente de la Coordination rurale, Véronique Le Floc’h, considère en revanche qu’il serait « dans l’intérêt de tous » qu’Emmanuel Macron « ne vienne pas ». La CR prévoit seulement le dépôt d’une gerbe pour les « suicidés de la profession » sous l’Arc de Triomphe dimanche. « Il n’a aucune annonce à nous faire », dit-elle à l’AFP, ajoutant qu’il n’y aurait « même pas besoin d’appeler les producteurs » pour qu’ils se mobilisent en cas de « provocation ».
Point d’étape sur les promesses
Début 2024, les agriculteurs avaient obtenu des promesses d’aides d’urgence et de mesures destinées à soulager leur quotidien, dont certaines ont été repoussées par la dissolution de l’Assemblée puis la censure. L’ambition du ministère de l’agriculture était de boucler, avant le Salon, l’adoption du budget 2025 avec ses 400 millions d’euros d’allègements fiscaux pour les agriculteurs.
Mais aussi d’accélérer sur la loi d’orientation agricole, attendue depuis près d’un an. Le Sénat la votera mardi, mais il ne restera ensuite que quelques jours aux députés et aux sénateurs pour trouver un compromis et permettre son adoption définitive avant l’événement. « Un agenda parlementaire précipité pour satisfaire la FNSEA » et son calendrier, dénonce Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne.
Troisième syndicat agricole, celle-ci défend une « réelle transition agroécologique » et concentrera ses actions pendant le salon sur des sujets précis comme la dénonciation de l’usage des pesticides, après que le Sénat a ouvert la voie fin janvier à une réintroduction partielle d’un insecticide de la famille des néonicotinoïdes, ou contre « les prédateurs de la rémunération des agriculteurs ».
Fait rare, plusieurs patrons de la grande distribution, souvent cible des critiques des agriculteurs, prévoient de tenir dans l’enceinte de l’événement, à l’invitation de l’animatrice Karine Le Marchand, une conférence commune juste avant la clôture, le 1er mars, des négociations commerciales avec leurs fournisseurs.
Le Salon reste un haut lieu de la célébration du terroir français, notamment via le concours général agricole, qui couronnera quelques-uns des 2 500 animaux en compétition, dont le bien-être sur place est une priorité des organisateurs.
Des milliers de médailles sont aussi décernées à des vins et produits régionaux. Pour éviter certains débordements des années précédentes, les organisateurs ont mis en place pour la deuxième année une campagne de sensibilisation prônant une consommation d’alcool sur place « responsable et modérée ».