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Blé, maïs, soja dans le vert: et si la guerre commerciale épargnait les grains ?


AFP le 05/02/2025 à 17:35
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Les prix des céréales et oléagineux sont dans le vert ces derniers jours. (© Adobe Stock)

Un vent de soulagement parcourt les marchés agricoles : l'éloignement d'un risque immédiat pour les grains d'une guerre commerciale liée aux taxes douanières américaines a propulsé les prix des céréales et oléagineux à des niveaux inédits depuis des mois.

Des Etats-Unis à l’Europe, les cours étaient dans le vert mercredi matin. A la Bourse de Chicago, sur l’échéance la plus rapprochée, les prix du maïs ont clôturé mardi soir à 4,945 dollars le boisseau (environ 25 kg), « au plus haut niveau depuis octobre 2023 », relève Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage. La hausse était aussi sensible pour le blé (5,770 dollars), à un niveau inédit depuis octobre 2024, comme pour le soja, la graine oléagineuse caracolant à 10,750 dollars, au plus haut depuis l’été dernier, selon la même source.

« La psychologie concernant la situation commerciale a changé et s’est améliorée de façon spectaculaire ces derniers jours », constate Rich Nelson, de la maison de courtage Allendale. « Le marché s’est montré très positif et surpris de voir que les tarifs douaniers de rétorsion de la Chine n’incluaient pas les produits agricoles », souligne l’analyste américain.

Plusieurs choses ont en effet changé ces derniers jours : d’une part le Mexique et le Canada, qui ont été frappés par des droits de douane américains de 25 % ce week-end, ont réussi à obtenir un sursis de 30 jours grâce à des accords de dernière minute conclus avec Donald Trump.

D’autre part, visé par 10 % de droits de douane additionnels sur toutes ses exportations vers les Etats-Unis, Pékin a immédiatement répliqué mardi en promettant de relever les barrières douanières sur une série de produits américains, dont le pétrole brut et les machines agricoles mais pas les grains.

La réaction modérée de Pékin a clairement « suscité l’optimisme sur le marché », note Arlan Suderman de la plateforme de courtage StoneX. « C’est le cours du soja qui réagit le plus car c’est la denrée agricole que les Etats-Unis vendent le plus à la Chine. »

« Sécheresse longue durée » au Mexique

En 2023, la Chine était le plus gros acheteur de soja américain, avec 26,4 millions de tonnes pour plus de 15 milliards de dollars.

Lors du conflit commercial de 2018/19 pendant la première présidence Trump, en réponse à la hausse des taxes américaines, la Chine avait imposé des droits de douane de 25 % sur les importations de soja américain.

Résultat, souligne une note de la Commerzbank, « les achats chinois de soja américain s’étaient alors effondrés » et « le prix du soja était tombé à 800 cents américains le boisseau en mai 2019, ce qui représentait à l’époque son niveau le plus bas en 10 ans et il n’a pas été atteint à nouveau à ce jour ».

Ce précédent et « des ajustements permanents entre ce qui est dit et ce qui est fait » par Donald Trump alimentent une « extrême nervosité des marchés », souligne Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France.

« Les Etats-Unis ont besoin du commerce avec la Chine ou le Mexique, or les taxes pourraient casser la demande. Tout ce qui est favorable au maintien du commerce est favorable aux cours », souligne-t-il.

Concernant le soja, la situation est particulière : « la récolte progresse activement » au Brésil où l’oléagineux est « nettement moins cher que la graine américaine », relève Arlan Suderman. Avant la question des droits de douane c’est donc le prix qui va décider les acheteurs.

Pour l’analyste de StoneX, sur le marché, un des facteurs de soutien des prix réside dans « la possibilité d’un accord entre Donald Trump et (le président chinois) Xi Jinping dans lequel la Chine s’engagerait à acheter plus de maïs et de soja américains en échange d’un traitement plus favorable sur les droits de douane ».

En 2020, c’est un tel engagement de la Chine qui avait participé à la résolution du conflit commercial et permis un redressement progressif des prix du soja, rappelle la note de la Commerzbank.

L’inconnue cette année réside dans la santé économique de la Chine, qui consomme au ralenti, soulignent plusieurs analystes.

Concernant le Mexique – qui a acheté à lui seul près de la moitié des exportations de maïs américain l’an dernier -, Rich Nelson estime que le marché « n’avait pas vraiment d’inquiétude » liée aux droits de douane car « le pays est confronté à une sécheresse de longue durée » et devrait continuer à « acheter l’essentiel de son blé et de son maïs aux Etats-Unis ».