Effet Trump et froid polaire font grimper blé, maïs et soja
AFP le 22/01/2025 à 19:15
L'effet Trump ne s'est pas fait attendre sur le marché des céréales et des oléagineux : les prix sont montés en flèche alors que s'éloignait, au moins provisoirement, la menace de nouvelles taxes douanières, et qu'un froid polaire descendait sur les plaines américaines.
En quelques heures mardi, les trois principales graines cotées à la Bourse de Chicago ont décollé : le contrat de référence sur le blé américain de variété SRW (Soft Red Winter) s’est envolé à 5,5875 dollars le boisseau (environ 27 kg), gagnant 3,7 % en une séance et effaçant largement les pertes de la semaine dernière.
Le maïs n’était pas en reste, atteignant les 4,90 dollars le boisseau, en hausse de 1,2 %, tandis que le soja montait à 10,6725 dollars, grimpant de plus de 3,2 %.
Les cours ont suivi sur le marché européen, avec un blé notamment en nette hausse mardi et toujours dans le vert mercredi, à 231,75 euros la tonne sur l’échéance rapprochée de mars. Le colza quant à lui se repliait dans le sillage du canola (colza OGM) canadien, autour de 527 euros la tonne.
Pour Arthur Portier, analyste chez Argus Media France, « c’est Chicago qui mène la danse. Le retour de Trump c’est l’émotion et l’émotion, c’est la volatilité ».
Depuis des semaines, les marchés agricoles étaient hésitants, attendant de savoir quels seraient les premiers gestes de Donald Trump, une fois de retour à la Maison blanche.
L’absence de décrets rehaussant les droits douaniers « est un signe d’optimisme pour les investisseurs », constate Jason Roose de US Commodities.
Possibilité d’un accord entre la Chine et les Etats-Unis
Le simple fait que le couperet ne tombe pas immédiatement a donc eu un effet haussier : le président a certes promis des surtaxes « de l’ordre de 25 % » pour les produits mexicains et canadiens, mais il a précisé qu’il pensait à une entrée en vigueur au 1er février.
Quant aux produits chinois, que Trump avait envisagé de taxer à hauteur de 60 %, ils ne seront pas immédiatement visés. La Chine s’est de son côté dite « prête à renforcer le dialogue » avec les Etats-Unis.
Pour Arlan Suderman, de la plateforme de courtage StoneX, « les commentaires faits par Donald Trump et la Chine (…) ouvrent la porte à la possibilité d’un accord commercial » entre les deux parties.
Cet accord « pourrait impliquer que la Chine achète davantage de produits agricoles américains en échange d’un statut plus favorable sur d’autres marchandises qu’elle enverrait aux États-Unis », estime-t-il.
Les opérateurs n’ont pour l’heure pas constaté de nouveaux achats chinois de céréales ou de soja américain. « Mais, souligne Arlan Suderman, nous avons vu la Chine prendre des mesures à l’encontre de plusieurs sociétés d’exportation au Brésil (…), ce qui a contribué à alimenter ces rumeurs ».
Certains analystes n’excluent pas que la Chine aille jusqu’à annuler certains achats de maïs au Brésil – fournisseur essentiel de Pékin – pour revenir vers les Etats-Unis.
Risque de « winter kill »
Pour le grain jaune, un autre point déterminant sera l’orientation de la politique américaine en matière d’agrocarburants. Certains observateurs jugent les signaux encore trop « contradictoires » pour y déceler une direction franche.
Mais pour Jason Roose, la signature par Donald Trump d’un décret mettant fin aux objectifs de l’ère Biden en matière de véhicules électriques « est favorable au marché du maïs », matière première pour l’éthanol.
Les opérateurs surveillent également avec attention les avancées des semis de la Safrinha, la plus importante des récoltes de maïs au Brésil, qui débute à peine, avec 0,5 % des surfaces emblavées contre 5 % à la même époque l’an dernier, relève Edward de Saint-Denis, de la maison Plantureux & Associés.
Outre l’effet Trump, les cours des céréales ont été dopés par le froid polaire qui s’installe dans une grande partie de la ceinture de blé d’hiver des États-Unis.
La couverture neigeuse, qui offre un cocon de protection aux cultures, « n’est pas suffisante dans la partie sud des grandes plaines et on est face à un risque de « winter kill » », un froid meurtrier, explique Edward de Saint-Denis.
Face à des températures plus froides que prévues, « les opérateurs spéculatifs se sont mis à racheter pour se couvrir », relève Arlan Suderman.