Exports français de blé et d’orges : la chute se confirme et s’amplifie
TNC le 19/12/2024 à 15:06
Les exportations françaises baisseraient de 41 % pour le blé tendre et de 27 % pour les orges sur la campagne 2024/25 selon FranceAgriMer, qui vient d’encore abaisser ses prévisions du mois dernier. Le comportement de la Chine en deuxième partie de campagne, difficile à anticiper, viendra peut-être changer la donne.
FranceAgriMer vient de réduire drastiquement ses prévisions d’exports de blé tendre français hors d’Europe pour la campagne 2024/25 : avec une baisse de 400 000 t par rapport à la projection du mois dernier, ils tomberaient à seulement 3,5 Mt contre 9,7 Mt en moyenne sur les trois campagnes précédentes ! Un niveau si bas n’avait pas été atteint depuis 2003/04.
Si bien qu’en comptant aussi les exports vers les pays de l’UE, les expéditions françaises de blé tendre sur 2024/25 seraient en baisse de 41 % par rapport à 2023/24.
Cette dégringolade s’explique par la tendance observée sur les premiers mois de la campagne, marqués par la quasi-absence de la Chine et du Maghreb sur le marché français, explique Habasse Diagouraga, chargé d’études économiques sur les céréales.
« Le Maroc était par exemple notre plus gros client lors de la campagne précédente, avec plus de 3 Mt », il n’a importé que 190 000 t de blé tendre français entre début juillet et fin octobre.
Les exports se font pour l’instant davantage vers les pays d’Afrique subsaharienne, surtout le Sénégal et la Côte-d’Ivoire, et « ce ne sont pas des gros volumes : 10 000 tonnes, 30 000 tonnes ».
Concurrence des origines mer Noire
« Le blé français fait face à la concurrence des origines Mer Noire, notamment la Russie, ajoute-t-il. S’il y a moins de blé russe et argentin sur la deuxième partie de campagne, peut-être qu’on gagnerait un peu en compétitivité. » Notons que la Russie n’exporterait que 42,5 Mt de blé cette campagne contre 52,6 Mt sur 2023/24, d’après les dernières prévisions d’UkrAgroConsult.
« Si on regarde les prix internationaux du blé tendre, on était à 231 $/t au 10 décembre en Russie, à 216 $/t en Ukraine et entre 240 et 242 $/t à Rouen », précise Julie Garet, cheffe de l’unité Grains et sucre de FranceAgriMer.
FranceAgrimer a aussi revu en baisse le chiffre des exportations d’orges françaises à 4,9 Mt en tout, soit une chute de 27 % par rapport à 2023/24. Et les raisons sont les mêmes : « la grosse concurrence des origines mer Noire et l’absence du Maghreb et de la Chine ».
Les experts scrutent particulièrement la Chine, qui importe généralement plutôt en deuxième partie de campagne et dont le comportement pourrait venir modifier ces estimations, surtout pour le blé comme pour l’orge.
« On est vraiment dans l’incertitude (concernant les importations chinoises) : il y a des indicateurs qui ne sont pas forcément tous cohérents les uns avec les autres, donc on est pour l’instant dans l’attente de ce qui va se passer », commente Julie Garet.
Objectif d’autosuffisance en Chine
Alors qu’il s’est fixé un objectif d’autosuffisance en blé et en riz à l’horizons 2030, l’Empire du milieu semble avoir décidé de réduire ses imports cette campagne. Il a accumulé des stocks céréaliers massifs ces dernières années, et sa récolte 2024 a été bonne.
Dans son rapport de fin novembre, le Conseil international des céréales estime les importations chinoises de blé en baisse de 28 % sur 2024/25 par rapport à 2023/24. Idem pour les orges. Pour le maïs, la chute des achats atteindrait 38 % d’une campagne sur l’autre.
La conjoncture économique morose du pays risque aussi de fragiliser sa demande. Certains observateurs du marché s’attendent par ailleurs à ce que les relations géopolitiques entre la Chine et les pays occidentaux impactent ses achats et qu’elle privilégie son partenaire russe.
Sur la campagne 2023/24, la Chine a importé 2,3 Mt de blé tendre et 3,3 Mt d’orges français, ce qui représentait respectivement 23 % et 49 % de nos exports.
Sur les trois premiers mois de la campagne 2024/25, elle n’avait pas encore importé de blé tendre français, tout comme l’an dernier. Et elle n’avait importé que 591 000 t d’orges française : une baisse de 63 % par rapport à 2023 sur la même période.