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Femmes en agriculture

Gouvernance des organismes professionnels : où sont les agricultrices ?


TNC le 27/06/2024 à 07:51
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La part d'exploitantes, engagées dans les organes de décision des OPA, varie de 10 à 30 % de l'échelon national à plus local. (© eric, Adobe Stock)

30 % des chefs d'exploitation et co-exploitants en Bretagne, 20 % en moyenne dans les instances décisionnelles agricoles : l'implication des femmes, si elle progresse, reste timide dans la région, à l'image de l'ensemble du territoire. D'où le travail mené depuis plusieurs années par le comité "Agriculture au féminin" de la chambre d'agriculture. Dernier bilan chiffré, avec l'identification des principaux freins et des propositions de solutions pour les réduire.

Entre les élections de 2007 et celles de 2019, la part d’agricultrices siégeant au sein des chambres d’agriculture de Bretagne a augmenté progressivement, de 18 % à 31 %. Nabila Gain-Nachi, chargée de mission égalité au niveau régional, y voit « l’effet positif » de la loi de 2012, mise en application en 2014 (article 70 de la loi n°2014-873 du 4 août), pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes et qui impose aux chambres d’agriculture au moins un ou une candidate de chaque sexe par groupe de trois candidat(e)s.

Entre 2007 et 2019 : de 18 à 31 % d’agricultrices élues.
(dans les chambres d’agriculture de Bretagne)

« Plus nombreuses dans les listes, elles le sont aussi à être élues », fait-elle remarquer lors du webinaire « L’engagement des femmes en agriculture », organisé par l’organisme le 10 juin puis diffusé sur sa chaîne youtube ChambAgriBzh.

Loin encore de la parité

Sur le dernier mandat, l’objectif de 30 % d’exploitantes dans les différentes instances de l’organisation professionnelle bretonne est atteint à l’échelon régional, mais pas dans tous les départements, en particulier dans les bureaux à l’échelle de la région comme départementale, le pourcentage se situe autour 20 % (là ils sont similaires) et d’un peu moins de 10 % seulement pour Chambres d’agriculture France

Soit 1 femme pour 13 hommes, le bureau national comptant 14 membres. « Peu nombreuses, elles portent sur le terrain des dossiers aussi primordiaux que leurs homologues masculins, par exemple liés à l’environnement », nuance l’experte des questions de genre dans le monde agricole.

20 % dans l’ensemble des OPA bretonnes et 10 % dans les coopératives.

Avant de comparer avec les données de La Coopération Agricole, issues d’une enquête menée en 2021 parmi les coopératives de son réseau : un petit 10 % d’administratrices également est présent dans les conseils d’administration, en très légère progression depuis le bilan précédent. « Le nombre de cotisantes et de cheffes d’exploitation est bien supérieur.

Pourtant 91 % des administrateurs estiment que le CA est représentatif de l’ensemble des associés », commente Nabila Gain-Nachi. Dans l’ensemble des OPA bretonnes, la féminisation des organes décisionnels s’avère lente : entre 2008 et 2019, elle s’est stabilisée à 20 %.

Des obstacles récurrents

En plus de ces résultats quantitatifs, la chambre d’agriculture régionale a réalisé une étude plus qualitative en collaboration avec l’UBS (Université de Bretagne Sud). En ressortent plusieurs freins à la prise de responsabilités des agricultrices. Le premier : « le mode de fonctionnement basé sur des modèles masculins : réunions le soir, avec parfois une 3e mi-temps, entre autres ». Certaines productrices interrogées, et même des producteurs, dénoncent « un machisme persistant de manière visible ou invisible », expliquant les réticences à s’investir et les abandons en cours de route.

Aux femmes de surmonter les barrières.

« Aux femmes de surmonter les barrières, de gagner en confiance, en légitimité », déplorent d’autres. « Celles qui y sont parvenues ont trouvé leur place », constate malgré tout la chargée de mission égalité-parité. Ont été cités ensuite : « le manque de réseau et de formation, ainsi que la difficile conciliation vie pro/perso, entre le métier d’agricultrice, les travaux domestiques et la gestion de la famille qui incombent encore beaucoup aux femmes, dans le monde agricole peut-être un peu plus ». « Des travaux sont en cours pour lever ces difficultés », indique Nabila Gain-Nachi.

Des adaptations, parfois pas très compliquées

Plusieurs pistes, quelques-unes assez simples à mettre en œuvre, méritent en effet d’être explorées telles que « de nouvelles formes de gouvernance (co-présidence ou présidence tournante homme/femme) et des adaptations organisationnelles (horaires, lieux, fréquences des rencontres, avec possibilité de visio).

Explorer de nouvelles gouvernances et modalités d’organisation.

​​​​Autres leviers : le versement d’une allocation financière pour garde d’enfants et/ou réalisation de tâches domestiques, ou encore le développement de groupes locaux de femmes en non-mixité pour améliorer la confiance en soi notamment, comme cela existe déjà dans les chambres d’agriculture, les Civam, etc. avec des bénéfices indéniables sur leur investissement. » À compléter par des démarches volontaristes et surtout réglementaires, conclut-elle.