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Lactalis

La Confédération paysanne dépose un dossier au Parquet national financier


TNC le 09/01/2019 à 19:30
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Parmi ceux qu’elle appelle « les prédateurs de la valeur », la Confédération paysanne a annoncé qu’elle allait « transmettre au Parquet national financier » des « éléments démontrant l’opacité et l’évasion fiscale opérée par Lactalis et ses filiales ». Des « éléments » que le syndicat considère comme une « extorsion de la valeur créée par les producteurs de lait ».

En ce début d’année 2019, le groupe laitier Lactalis reste plus que jamais dans le viseur de la Confédération paysanne. Le syndicat a profité de la présentation de ses vœux 2019, mercredi 9 janvier, pour annoncer son intention de « déposer un dossier au parquet national financier » contenant des « éléments mettant au jour un système d’évasion fiscale » par Lactalis, ses filiales et sociétés holding.

La Confédération paysanne indique, dans son communiqué, avoir « poursuivi un travail d’enquête » depuis sa manifestation de février 2018 devant le tribunal de Laval. À l’époque, le syndicat réclamait « la publication des comptes de Lactalis et l’ouverture d’une enquête judiciaire sur les filiales du groupe, suite aux révélations de la presse sur sa filiale luxembourgeoise Nethuns ».

Le syndicat soupçonne donc le premier collecteur laitier privé « d’évasion fiscale massive » grâce à de « multiples montages sociétaires autour de la société holding BSA (Besnier SA, ndlr) ». Le syndicat estime que « l’opacité et l’évasion fiscale » constitue une « extorsion de la valeur créée par les producteurs » de lait.

Selon la Confédération paysanne, « Lactalis s’appuie sur le mode de facturation a posteriori des livraisons de lait, imposé aux éleveurs, et le délai de paiement correspondant pour créer des dettes et des créances fictives ». « Selon les éléments en notre possession, Lactalis a mis en place un système de refacturation intra-groupe particulièrement complexe ainsi qu’un système d’achat fictif d’actions. »

« L’équivalent de 12 centimes par litre pendant toute la crise laitière »

Et le syndicat de poursuivre ses accusations : « Ainsi les deux-tiers de la dette de BSA International, qui détient la filiale luxembourgeoise, sont composés de facturation intra-groupe. Entre 2015 et 2016, les capitaux propres de Nethuns ont été multipliés par 2225, passant de 993 893 euros à 2,225 milliards d’euros, et ce en pleine crise du lait ! Si on ramène ces profits à l’ensemble de la collecte laitière de Lactalis dans le monde, cela aurait permis un supplément de 12 centimes d’euro le litre durant la crise laitière, sur tous les litres de lait collectés par Lactalis. »

« Ce siphonnage de la valeur créée par les producteurs et productrices, par un jeu de créances de dettes fictives et d’achat d’actions, nous interroge aussi quant à sa sincérité au regard des règles fiscales, autant de sujets qui relèvent directement des compétences du parquet national financier. »

« Ces profits colossaux démontrent l’extorsion de Lactalis du travail des éleveurs laitiers, qui lui a permis de construire historiquement sa fortune sur le dos des éleveurs laitiers français.  La dénonciation du comportement de Lactalis est importante car son comportement a un impact majeur sur le schéma laitier global en France et dans le monde.

« Preuve d’un enrichissement, au détriment de la rémunération des producteurs, ces deux milliards d’euros sont ainsi partis offshore sans être taxés, grâce à un jeu de créances, dettes et achat d’actions. Ces envois de fonds ne sont pas traçables et sont anonymes. L’argent peut être ainsi envoyé dans n’importe quel paradis fiscal. Ces deux milliards de profits auraient ainsi été « déguisés » en remboursement de dettes fictives, garanties par des créances du groupe, elles-mêmes fictives, pour être dissimulées aux yeux du fisc français et probablement belge », renchérit le syndicat dans son dossier de presse.

Par ailleurs, « la Confédération paysanne va prendre ses responsabilités de syndicat en mettant tous les moyens en œuvre pour que BSA France, structure centrale du groupe, publie ses comptes comme le prévoit la loi », a expliqué Nicolas Girod, secrétaire national du syndicat et éleveur dans le Jura.