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La Répression des fraudes sévit, 38 millions d’amende pour E. Leclerc


AFP le 14/08/2024 à 12:50

Michel-Edouard Leclerc avait dit s'y attendre, c'est chose faite : la Répression des Fraudes sévit et vient d'infliger une sévère amende au premier distributeur alimentaire français, E.Leclerc, accusé d'avoir dépassé la date limite de négociations avec des fournisseurs.

Le groupe, via sa centrale d’achat européenne Eurelec, a écopé mercredi d’une sanction d’un peu plus de 38 millions d’euros – la plus élevée prononcée dans ce genre de dossier – pour ne pas avoir respecté les délais des négociations avec 62 de ses fournisseurs.

En septembre 2020, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait déjà infligé une amende de 6,34 millions d’euros à Eurelec pour « non-respect allégué de la réglementation française relative au formalisme des négociations entre fournisseurs et distributeurs ».

Contactée par l’AFP, cette enseigne leader du secteur n’a pas souhaité commenter. Mais son porte-voix Michel-Edouard Leclerc s’était exprimé en février, disant s’attendre à des assignations et des sanctions dans la foulée des négociations commerciales, estimant même être visé « personnellement » par un « groupe de députés » de la majorité.

Car cette année, les règles du jeu commercial ont changé. Habituellement, industriels et distributeurs ont jusqu’au 1er mars pour s’accorder sur les conditions de vente d’une large part des produits vendus en grandes surfaces le reste de l’année. Mais le gouvernement avait exceptionnellement avancé la date butoir de ces négociations, dans l’espoir d’une répercussion plus rapide en magasin des baisses de prix de certaines denrées, après une période de forte inflation.

Les dates limites avaient donc été ramenées au 15 janvier pour les fournisseurs réalisant moins de 350 millions d’euros de chiffre d’affaires, et au plus tard le 31 janvier pour les plus gros fournisseurs.

Des contrôles menés par la DGCCRF avaient été renforcés pour calmer la crise agricole. En effet, en début d’année, les agriculteurs avaient mené des actions et bloqué des axes pour exiger un « revenu décent ».

Coup d’arrêt législatif

Cette fronde avait remis en lumière les lois Egalim, censées protéger la rémunération des exploitants, alors que près d’un ménage agricole sur cinq vit sous le seuil de pauvreté (contre 13 % au niveau national).

La loi Egalim 1, promulgée en 2018, est ainsi censée avoir « inversé la construction des prix » lors des négociations commerciales, en partant des coûts de production.

Egalim 2, promulguée en 2021, a généralisé les contrats écrits sur trois ans minimum entre l’agriculteur et l’entreprise qui va transformer ses produits, ainsi que rendu illégales les négociations sur le coût de la matière première agricole (viande, lait, etc) et instauré un mécanisme de révision automatique des prix.

La loi dite Descrozaille, du nom du parlementaire (Renaissance) qui a porté ce texte adopté en 2023, a étendu cette mesure aux produits de marque distributeur, propriétés des supermarchés (Reflets de France, Marque Repère…).

Les blocages d’autoroutes par des agriculteurs impatients de mieux gagner leur vie ont mis sur les rails un Egalim 4.

Mi-février, au plus fort de la crise agricole, le gouvernement avait donc confié aux députés de la majorité Anne-Laure Babault et Alexis Izard la mission de formuler, avant l’été, des pistes d’évolution des règles encadrant les négociations entre agriculteurs et industriels d’une part, et industriels et distributeurs d’autre part.

Mais ce projet de texte a été suspendu par la dissolution de l’Assemblée nationale.

Par ailleurs, en février, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire avait indiqué avoir identifié 124 contrats, signés entre industriels et distributeurs dans le cadre des négociations commerciales, qui ne respectaient pas la loi Egalim et avait envoyé des injonctions pour contraindre les entreprises concernées à s’y conformer.