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Législation sur les NGT : à quel calendrier peut-on s’attendre ?


TNC le 10/10/2024 à 14:39
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Thierry Langin, président de l'AFBV, et Philippe Dumont, membre de l'AFBV. (© TNC)

Après plusieurs avancées au niveau européen depuis 2019, la proposition de règlement de la précédente Commission européenne a été déclinée en deux textes de compromis successifs en 2023 et 2024, sans pour autant obtenir de majorité absolue au Conseil de l’Europe. Le dossier pourrait-il avancer, et aboutir, en 2025 ou 2026 ?

Si l’Association française des biotechnologies végétales (AFBV) a bon espoir de voir progresser la proposition réglementaire relative aux nouvelles techniques génomiques, les NGT, il faudra encore faire preuve de « beaucoup de pédagogie », et être « très patient », explique Philippe Dumont, responsable des relations internationales de l’association, le 10 octobre.

Thierry Langin, président de l’AFBV, et Philippe Dumont, membre de l’AFBV. (© Terre-net Média)

Un dossier bloqué sans majorité qualifiée

Le dossier ne peut avancer sans un vote positif à majorité qualifiée des États membres dans le Conseil. Or, un premier texte de compromis a échoué à recueillir cette majorité en décembre 2023, puis un second a obtenu le vote positif de 17 États membres, mais sans pour autant représenter les 65 % de la population européenne, une proportion nécessaire pour la majorité qualifiée.

Pour l’obtenir, des leviers sont à activer afin de recueillir de nouveaux votes positifs, notamment de la part de la Pologne et de l’Allemagne, qui ont voté contre en mars, mais où de nouvelles élections pourraient changer la donne. Le vote favorable de la Roumanie pourrait par ailleurs être débloqué si le sujet de la conformité avec le protocole de Carthagène est résolu. Le pays craint en effet le blocage de ses exportations agricoles si les NGT de catégorie 1 (c’est-à-dire les variétés assimilées aux plantes conventionnelles) sont considérées comme OGM (lire encadré ci-dessous).

La Commission européenne considère que les NGT de catégorie 1 ne rentrent pas dans ce cadre : elles reproduisent un caractère qui existe déjà, et qui n’est donc pas inédit, ou les mutations effectuées ne surmontent pas les barrières naturelles. En revanche, à ce jour, aucun document ne permet de sécuriser cette position.  

En cas d’accord, quelle temporalité ?

Si la majorité qualifiée finit par être obtenue au Conseil, les négociations commenceront en trilogue (Commission, Conseil et Parlement), pour adoption du texte.

Le règlement prendra effet deux ans après l’adoption, c’est-à-dire à partir de 2027 ou 2028. On aurait de premières variétés en 2031-2032, estime Philippe Dumont. Car si aujourd’hui, les laboratoires sont au travail, le règlement actuel rend difficile de mener les essais aux champs. Or, « tant qu’on ne peut pas phénotyper, évaluer la performance des plantes éditées au champ, on ne peut pas prouver leur valeur ajoutée », déplore Thierry Langin, président de l’AFBV et directeur de recherches au CNRS. Au-delà de l’enjeu pour les laboratoires, ajoute-t-il, « l’enjeu économique est très fort » puisque les NGT permettent de gagner énormément de temps par rapport aux méthodes de sélection classique, qui nécessitent une quinzaine d’années.

Pour l’AFBV, les NGT constituent un outil supplémentaire non négligeable dans l’adaptation des plantes au changement climatique et donc pour « redonner espoir à nos agriculteurs », confrontés « non pas à une crise mais à une mutation majeure », estime l’association.

Pour participer activement au débat, les membres de l’AFBV entendent bien mener un travail pédagogique auprès des députés (nationaux et européens) et mettre en avant non seulement les atouts de ces techniques, mais également rappeler les conclusions des agences sanitaires, notamment l’EFSA, qui considère que d’un point de vue scientifique, les plantes issues des NGT de catégorie 1 sont totalement équivalentes à celles obtenues par la sélection conventionnelle.