Les politiques publiques sont néfastes pour les marchés et l’environnement
TNC le 30/06/2020 à 17:05
Dans un rapport publié le 30 juin, l’OCDE et la FAO constatent que les politiques publiques agricoles, qui représentent 500 milliards de dollars par an pour les agriculteurs des 54 pays étudiés, entretiennent des distorsions sur les marchés, empêchent de préparer la résilience du secteur agricole, et ont des conséquences négatives sur l’environnement.
Si les pays investissent dans le domaine agricole, « le soutien actuel à l’agriculture est en grande partie dépourvu d’utilité, voire dommageable. Alors que les budgets nationaux sont soumis à de fortes pressions à cause du Covid-19, le moment est propice à une réduction du soutien à l’agriculture, générateur de distorsions, et à un recentrage des efforts et des ressources, d’autant qu’elles sont limitées, sur des interventions qui produisent de meilleurs résultats pour le secteur et la société dans son ensemble », estime le directeur des échanges et de l’agriculture de l’OCDE.
Le rapport annuel de l’OCDE et de la FAO, publié le 30 juin, constate en effet les effets négatifs importants des politiques publiques agricoles, observées dans 54 pays du monde en 2019 (au sein de l’OCDE, de l’Union européenne, + 12 grandes économies émergentes). En moyenne, 469 milliards d’euros par an ont été dépensés sous forme de soutien direct aux agriculteurs sur la période 2017-2019, mais plus de deux tiers de ces transferts publics passent par des instruments ayant le potentiel de créer de fortes distorsions. « Ces formes de soutien ont une forte tendance à maintenir les agriculteurs dans des activités non compétitives et peu rémunératrices », souligne le rapport.
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Le soutien aux revenus des agriculteurs « est rarement un appui aux objectifs de productivité et de durabilité », précisent également l’OCDE et la FAO. S’ils sont parfois liés à des contraintes environnementales, ils ne sont généralement pas corrélés au résultat. Le rapport recommande aux pays de mettre en place davantage de paiements au titre de produits particuliers autres que des denrées de base, ainsi que sur des biens définis et quantifiables d’intérêt public.
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Améliorer la résilience des agriculteurs
Autre défaut des politiques publiques, pointé par le rapport : la majorité des dispositifs de gestion des risques reposent sur des mécanismes subventionnés d’assurance et de stabilisation ou sur des aides apportées au coup par coup lors de crises importantes, ce qui nuit au développement des initiatives privées de gestion des risques. L’OCDE et la FAO recommandent ainsi de concentrer l’action publique sur les risques systémiques et catastrophiques « pour lesquels il n’est pas possible d’élaborer des solutions privées », et de cibler les investissements qui permettent aux agriculteurs de renforcer leur résilience, notamment vis-à-vis du changement climatique.
L’accompagnement public est par ailleurs assez faible (un huitième des soutiens) sur le plan de l’innovation et de l’amélioration de l’environnement économique, or « cela permettrait aux systèmes agricoles et agroalimentaires de répondre plus efficacement aux besoins de l’industrie, aux attentes de la société et aux pressions sur l’environnement », insiste le rapport.
Supprimer les restrictions commerciales liées au Covid-19
L’OCDE et la FAO évoquent également les mesures mises en place sous l’effet de la pandémie de Covid-19 : soutien aux agriculteurs et à la chaîne d’approvisionnement alimentaire, initiatives visant à maintenir en activité de secteur, aide aux consommateurs et personnes vulnérables, facilitation des échanges ou au contraire restriction des exportations pour favoriser le marché intérieur. S’il est trop tôt pour évaluer l’impact de ces dispositifs, le rapport explique que l’absence de clause de caducité de certaines d’entre elles, liées à la production et l’assouplissement de la réglementation environnementale, « risquent de conduire à une rigidité institutionnelle pérenne et problématique sur le plan économique et environnemental ».
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L‘OCDE et la FAO préconisent par ailleurs de « supprimer le plus vite possible les restrictions commerciales » instaurées dans le cadre de la pandémie, pour permettre au marché de « remplir ses fonctions de répartition et d’envoi de signaux ». La crise doit cependant permettre de tirer certains enseignements quant à l’efficacité des formes d’interventions gouvernementales pour anticiper et réagir aux chocs.