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Les syndicats majoritaires lancent « l’acte 2 » de la colère en France


AFP le 18/11/2024 à 09:17
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(© Compte X @FDSEAIDF, @coordinationrur, @ConfPaysanne)

"France, veux-tu encore de tes paysans?" : le cri de colère résonnait lundi du Var à la Picardie, partout où l'alliance syndicale majoritaire FNSEA-JA a lancé plus de 80 actions symboliques, prélude à un nouveau cycle de mobilisation. (Article mis à jour à 13h50)

Au Cannet-des-Maures (Var), quelque 300 agriculteurs ont déposé de la terre sur la route et planté des croix symbolisant la mort de l’agriculture française, qu’ils jugent menacée par l’accord de libre-échange que l’UE négocie avec les pays latino-américains du Mercosur.

Un petit cercueil porte l’inscription « la mort est dans le pré », des banderoles aux couleurs de la FNSEA proclament « Stop aux promesses, place aux actions » ou encore « Agri acte 2 : on est de retour ».

A Avignon (Vaucluse), une centaine d’agriculteurs, selon la police, se sont déployés sur des allées bordant le Rhône, pour faire un semis de protestation contre l’entrée de produits agricoles étrangers. « Notre fin sera votre faim », clamaient les membres du syndicat.

Près de la frontière belge, des agriculteurs contrôlent les poids-lourds.

Devant la préfecture de Vesoul, 180 agriculteurs ont déposé des panneaux de signalisation de villages et déversé trois bennes remplies de cannes de maïs.

Des rassemblements sont en cours à Angoulême (Charente), et des opérations escargot dans les Deux-Sèvres.

« 85 points de manifestation sont en train de se mettre en route, on ne souhaite pas de blocage agricole concrètement comme on a pu le voir l’année dernière », a indiqué lundi matin sur RMC Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs, citant comme exemples d’actions « des barrages filtrants, des feux de la colère, des manifestations d’agriculteurs devant les préfectures ».

Dimanche, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a prévenu les agriculteurs qu’il y aurait une « tolérance zéro » en cas de « blocage durable » des routes.

Dès dimanche soir, des agriculteurs s’étaient rendus en cortège près de la base aérienne de Villacoublay, près de Paris, pour dénoncer le projet d’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur, bloquant deux des trois voies de circulation sur la nationale 118, où une partie d’entre eux étaient toujours présents lundi matin avec leurs tracteurs après y avoir passé la nuit.

« Ce qu’on veut c’est exprimer sur l’ensemble du territoire cette détresse agricole et ce besoin de refixer le cap », a souligné Pierrick Horel.

« Ampleur sans précédent »

Yohann Barbe, porte-parole de la FNSEA au micro de Europe 1 également lundi matin, a estimé que « l’ampleur, elle va être à nouveau et sans précédent puisqu’on sent quand même des agriculteurs toujours aussi agacés par un gouvernement qui traîne à réagir. »

Moins d’un an après un ample mouvement de colère dans les campagnes, qui avait abouti en janvier à des blocages de sections d’autoroutes dans le pays, les syndicats agricoles appellent à nouveau leurs troupes à manifester mais en ordre dispersé, à l’approche de leurs élections professionnelles qui se tiennent en janvier.

Percutés par les mauvaises récoltes et les maladies animales émergentes, ils estiment n’avoir toujours pas récolté les fruits de la colère de l’hiver dernier : la concrétisation des 70 engagements alors pris par le gouvernement Attal a été ralentie par la dissolution de l’Assemblée nationale. Et ils jugent les normes toujours aussi complexes et les revenus insuffisants.

Le feu aux poudres avec le Mercosur

Si les taxes sur le carburant agricole (GNR) avaient été un des ferments de la mobilisation l’an dernier, c’est l’aboutissement du projet d’accord de libre-échange de l’Union européenne avec les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) qui pourrait mettre le feu aux poudres cette année.

En dépit de l’opposition de la classe politique comme des acteurs agricoles français, la Commission européenne, poussée par plusieurs pays comme l’Allemagne et l’Espagne, semble déterminée à signer d’ici à la fin de l’année cet accord qui permettra notamment aux pays latino-américains d’écouler plus de bœuf, poulet ou sucre sans droits de douane en Europe.

C’est pourquoi la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et son allié Jeunes agriculteurs (JA) ont choisi de relancer la mobilisation agricole lundi et mardi, dates de la tenue d’un sommet du G20 au Brésil.

« Nous allons continuer de nous opposer » à l’accord, a assuré dimanche Emmanuel Macron, en déplacement en Argentine avant le G20, cherchant à « rassurer les agriculteurs ».

« Révolte agricole » ?

Sur le terrain, la mobilisation, qui pourra « durer jusque mi-décembre », se traduira par des rassemblements devant les préfectures et sur des places, ponts ou ronds-points « de l’Europe ».

Quelques opérations-escargot pourraient perturber le trafic automobile mais l’objectif de la mobilisation n’est pas de « bloquer » ou « d’ennuyer » les Français. Il s’agit plutôt de faire passer le message selon lequel l’agriculture vit aujourd’hui « une situation d’urgence, dramatique dans certains endroits », avait souligné dimanche le président de la FNSEA Arnaud Rousseau sur BFMTV.

« Si d’autres ont d’autres modes d’action, veulent utiliser la violence ou, comme je l’ai entendu, veulent (…) affamer Toulouse, ça n’est pas notre mode d’action », a-t-il souligné, en référence aux appels de certains responsables de la Coordination rurale (2e syndicat agricole) qui ont proposé ces derniers jours d’« encercler » ou d’« affamer » certaines métropoles.

La Coordination rurale a choisi d’attendre la tenue de son congrès (mardi et mercredi) pour amplifier sa mobilisation. Le syndicat promet « une révolte agricole » avec un « blocage du fret alimentaire » dès mercredi dans le sud-ouest si « aucune avancée » n’est constatée sur le dossier du Mercosur.

Opposée depuis 25 ans aux traités de libre-échange, la Confédération paysanne, 3e force syndicale, a participé à des rassemblements anti-Mercosur à Bruxelles ou en Aveyron, manifestant symboliquement devant le restaurant McDonald’s de Millau que ses militants avaient démonté en 1999.